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DEPAQUIT, Jules(1869-1924) : Latoupie-Bottin (1900).
Saisie du texte : O. Bogros pour lacollectionélectronique de la MédiathèqueAndréMalraux de Lisieux (29.XII.2008)
[Ce texte n'ayantpas fait l'objet d'une seconde lecture contient immanquablement desfautes non corrigées].
Adresse : Médiathèque André Malraux,B.P. 27216,14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01
Courriel : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros]obogros@ville-lisieux.fr
http://www.bmlisieux.com/

Diffusionlibre et gratuite (freeware)
Texteétabli sur un exemplaire(Bm Lx : GF 245) du n°36 du 1er Juillet 1900 (3e année) de la revue Cocorico

Latoupie-Bottin
par
Jules Depaquit


~ * ~

Depuis des années, Latoupie s'adonne à la lecture du Bottin, celui deParis bien entendu, car le Bottin des départements le laisse froidcomme une carafe frappée.

Singulière conformation d'une âme !

Quandil le sait par coeur, il va trouver le propriétaire d'un grand café surles boulevards dont je tairai le nom, car j'ai horreur de toute réclamequi ne m'est pas payée. Il lui dit :

— Pardon, monsieur, mais vous n'auriez pas besoin d'un Bottin de Paris, par hasard ?

—Justement si, mon ami, répond cet excellent homme. Le mien commence às'user et j'allais le remplacer. Veuillez avoir l'obligeance de memettre l'article en mains.

— Alors, touchez-là, Monsieur.

— Comment cela ?

— Le Bottin en question, c'est moi.

Et Latoupie met en deux mots le propriétaire du café au courant de la situation.

—Fort bien, dit cet homme, je vous arrête, car j'aime les attractionsvraiment originales et celle-ci en est une. Vous entrerez en fonctionsce soir, vous serez logé, couché, nourri, blanchi et vous aurez vingtfrancs par mois. Cela vous va-t-il ? En ce cas, topez là !

— Parfaitement, c'est une chose entendue, dit Latoupie...

Alphonse Allais ?

7, rue Detaille, au troisième, la porte à gauche, répondait imperturbablement Latoupie.

Jean Goudezki ?

23, passage de l'Élysée-des-Beaux-Arts, au premier, la porte en face, répondait non moins imperturbablement Latoupie.

Dix années après ces évènements, je revis Latoupie. Il était triste, vieilli et découragé.

— Eh bien ? lui demandai-je.

— Eh bien ! mon cher monsieur, je ne suis plus Bottin.

— Ah bah !

—Oui, il arrivait à des clients de me demander pour s'assoir dessus. Jene sais s'ils faisaient cela par ignorance ou par malice, mais en toutcas cela m'affligeait profondément. Alors, voyez-vous, j'ai lâché.

— Et maintenant ?

—Maintenant, je suis Dictionnaire français-latin au LycéeLouid-le-Grand. C'est moins rémunératif, mais c'est plus distingué, eton a plus d'égards pour moi. Vous comprenez, Monsieur, un Dictionnairefrançais-latin !!!

Heureux Latoupie !