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DUBOSC, Georges (1854-1927) : Les Ancêtres paternels de GustaveFlaubert(1924). Saisie du texte : S. Pestel pour la collectionélectronique de la Médiathèque AndréMalraux de Lisieux (03.XI.2004) Texte relu par : A. Guézou ; Seconde relecture : Y. Leclerc(02.IV.2005) Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216,14107 Lisieux cedex -Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01 Courriel : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros]obogros@ville-lisieux.fr http://www.bmlisieux.com/ Diffusion libre et gratuite (freeware) Orthographe et graphie conservées. Texte établi sur l'exemplaire de lamédiathèque des Chroniques du Journal de Rouen dudimanche 17 février 1924. LesAncêtres paternels de Gustave Flaubert par Georges Dubosc ~*~En ces dernièresannées, on a cherché àétablir très documentairement les origines des Flaubertet particulièrement de Gustave Flaubert. Le premier, unérudit de Rouen qui n’est pas oublié, M. F.Clérembray, dans Flaubertismeet Bovarysme, publié en1912, souleva la question de façon sérieuse, que vintbientôt appuyer la brochure publiée en 1913 par M. Reibel,vétérinaire à Villenauxe, dans la régionmême, sous le titre : LesFlaubert, vétérinaireschampenois, éditée à Troyes.L’étudede M.A. Chamboseau au Mercure de France (1er janvier 1922) apporta encore denouveaux éclaircissements que vient corroborer une nouvelle ettrès intéressante étude de M. J. Chevron, paruedans le fascicule d’octobre-décembre de la Revue historique dela Révolution française, sous le titre A propos desancêtres champenois de Gustave Flaubert au XVIIIe siècle.Citons aussi le Gustave Flaubertchampenois, de Ch. Gaudier, paru en1913. * ** La famille des Flaubert ou des Flobert, on rencontresouvent les deux orthographes, est certainement une des plus vieillesfamilles de la Champagne, et le nom y est très répandu.On a trouvé des Flaubert dans plus de soixante paroisses de laMarne et de l’Aube. Les Flaubert, devenus normands, qui nousintéressent, sont originaires du canton d’Anglure qui setrouvetout à l’extrémité du département delaMarne, sur la lisière du département de l’Aube.C’est uncoin de la Champagne pouilleuse traversé par l’Aube, parlaSeine et par le canal de la Seine à l’Aube. Anglure, quiest lechef-lieu de canton, avec son église du XIVe siècledédiée à Saint-Sulpice et à Saint-Antoine,avant 1789, formait une châtellenie féodale, dont le vieuxchâteau avec ses deux tours se dressait dans une île del’Aube. Tout ce canton d’Anglure, qui était plus unpays deculture que de vignoble, était surtout une régiond’élevage dont les centres étaientMarcilly-sur-Seine,pays d’élevage de chevaux ou existe encore le haras deBarbanthall et Saint-Just, avec son petit hameau de Le Sauvage, grosbourg où se fait un grand trafic de chevaux. Riend’extraordinaire à ce que, dans ce canton, existâtdenombreuses familles de maréchaux-experts et devétérinaires-jurés comme le furent les Flaubert,surtout quand eurent été créées lesécoles de Lyon et d’Alfort, en 1760 et en 1767. Delà,ces vétérinaires rayonnaient sur de nombreux villagesagricoles : Bagneux, un pays assez marécageux oùdemeurèrent les Flaubert pendant une partie du XVIIIesiècle, Chesles, Baudemont, Celle-sous-Chantemerle, LaChapelle-Lasson, Granges-sur-Aube. Esclavolles, Conflans-sur-Seine, unegrosse bourgade dont l’église étaitdédiéeà Saint-Etienne, Saint-Quentin-le-Verger,Villiers-aux-Corneilles, aujourd’hui sur le cantond’Ecury-sur-Coole.Presque partout, il se trouvait un vétérinaire royal. Dès 1669, le syndic de Bagneux, le village qui fut un des paysd’élection des Flaubert, était un nomméDenisFlaubert, dont le fils était un des plus forts et desplus grands conscrits de la paroisse, et à ce titre futdésigné pour servir dans la milice. Déjà laréputation de grandeur et de force des Flaubert étaitétablie. En 1676, en 1677, en 1692, on trouve encore, nousapprend M. Chevron, des Flaubert qui sont syndics de Bagneux. Un autre,Nicolas Flaubert, procureur du Roy en l’Hôtel-de-Ville deTroyes,à la date de 1696, quoique n’étant pas noble, faitenregistrer ses armoiries qu’un Armorial de Champagnedécritainsi : D’azur, à unchevrond’or, accompagné de deux« flammes » du même et flanqué d’un lisdejardin aussi d’or, soutenu d’un croissant de même etaussi auchef de gueules, chargé de deux étoiles d’or.Ces« flammes d’or » étaient de grosses lancettesdevétérinaires, ce qui prouve que les Flaubert pratiquaientdéjà leur art. L’aïeul le plus reculédeGustave Flaubert, son bisaïeul, semble avoir étéConstant-Jean-Baptiste Flaubert, né à Bagneux, le 14octobre 1722, et qui avait un frère aîné Michel,né en 1731 et qui devait mourir le 3 février 1759. Iln’avait pas le titre de vétérinaire, mais, commesonfrère, celui de maréchal-ferrant expert. Il se maria deuxfois, à Marguerite Laurent, puis à HélèneMarcilly. Ses trois fils, le triobien connu desvétérinaires champenois, étaient issus de sonpremier mariage : Jean-Baptiste, Nicolas et Antoine Flaubert. * ** Jean-Baptiste Flaubert, le grand-oncle du romancier, étaitné dans le village de Saint-Just-Sauvage, qui se trouveactuellement sur le canal de la Haute-Seine et qui fut, dans leComté de Champagne, le siège d’une baronniepuissante. Ila gardé des temps anciens une église du XVesiècle, avec un portail sculpté et un cimetièreoù l’infortuné maréchal Brune dort sonderniersommeil. Jean-Baptiste Flaubert était né là, le 15août 1750, et était entré, aux frais de sa famille,le l4 mars 1774, à l'Ecole vétérinaired’Alfort,qui avait été fondée en 1767. Il en étaitsorti en 1776 et, l’année suivante, il avaitétéenvoyé combattre une épidémie àFayl-Billot. Ce fils aîné de Constant-Jean-Baptiste Flaubertexerçaitson art, comme on disait alors, au village de Bagneux mais ilcéda la place à son frère Nicolas Flaubert quandcelui-ci sortit, à son tour, de l’Ecole d’Alfort, en1780, etalla s’installer à Nogent-sur-Seine. Pour quelle cause,quatreans plus tard, les deux frères, en 1784, firent-ils unnouveau chassé-croisé ? Toujoursest-il que Jean-Baptiste revint dans ce petit village champenois deBagneux, où il demeura jusqu’à sa mort en 1832, etqueson frère Nicolas Flaubert alla le remplacer àNogent-sur-Seine. Jean-Baptiste devait être un vétérinaireexpérimenté, car une lettre conservée aux Archivesdépartementales de la Marne, datée de 1792, attestequ’ilfut appelé à la Fère-Champenoise pour luttercontre une épidémie de morve. Une commissiond’inspectionavait été nommée, qui visitait avec soin lesécuries, examinait les animaux et marquait d’une lettre auferrouge les bêtes malades. Jean-Baptiste Flaubert ordonnamême d’abattre une jument morveuse, appartenant à unsieurClaude Sertin, et en dressa un procès-verbal d’autopsie,reproduit dans l’étude si intéressante de M. A.Chevron. Jean-Baptiste Haubert avait épousé une femmeHélène Marchand, qui, lors des débuts de laRévolution, fut accusée de fanatisme et de propagandereligieuse, motifs qui décidèrent le comité desurveillance de Sézanne, une petite ville voisine, à lafaire arrêter, le 23 fructidor, an II. Nanti d’uncertificat decivisme, Nicolas Flaubert n’avait point étéincriminé, mais il fut dénoncé par un de sesconcitoyens, Gédéon-Louis Jolly, et il futarrêté sous le prétexte qu’il avaittiré descoups de fusil sur plusieurs personnes. On l’accusait aussid’allerà l’église, d’y entraîner les enfants,d’y «entonner des chants dans un langage barbare, incompréhensible». Comme on l’a vu, il n’en avait pasété demême pour sa femme Hélène Marchand. Onl’avaitaccusée de prêcher sur les places, de parcourir les rueset les carrefours en chantant des cantiques, de remplacer lecuré à l’occasion. Un extrait du registre de laSociété populaire de Saint-Just représente MmeJean-Baptiste Flaubert comme jouant le rôle de Théos,allant même jusqu’à interdire lacélébrationdes fêtes décadaires. Ce mot de Théos nes’applique point à une sorte de divinité antique,commel’ont cru certains biographes de Flaubert. Il s’agit toutsimplementd’une comparaison avec le rôle joué alors, àlamême époque, par la célèbre visionnairenormande, Catherine Théot, folle mystique, qui se disaitl’Evenouvelle, et qui se livrait à dés manifestationsbizarres, dans lesquelles on voulut compromettre un instantRobespierre. Incarcérée, elle fut mise sous mandat d’arrêtetses papiers furent placés sous scellés. Toutefois, elles’était défendue avec véhémence,aidée par son mari. L’accusation fléchit et ellefutremise en liberté. La vaillante Hélène Marchandeut cinq enfants. Le dernier fut Hilaire-Jean-Baptiste Flaubert,né à Nogent-sur-Seine, le 4 juin 1784. Lui aussi futvétérinaire, étudia à l’Ecoled’Alfort, de1808 à 1811, fit la campagne de Russie commevétérinaire du 2e Cuirassiers. On le retrouve ensuiteà Arcis-sur-Aube, en 1815 ; à Aubigny-sur-Marne en 1816,vétérinaire au 2e dragons 1820 etvétérinaire civil à Arcis, en 1824. Ledeuxième enfant d’Hélène Marchand futJean-Baptiste-Constant Trobert (?), Flaubert, né àBagneux, le 28 décembre 1819, élève del’Ecoled’Alfort, de 1839 à 1843, vétérinaire au 13ed’Artillerie, en 1845, puis au 12e Chasseurs, le 11 mars 1847,quivécut longtemps en Algérie. * ** Le second fils de Constant-Jean-Baptiste Flaubert fut Nicolas Flaubert,le grand-père direct de Gustave Flaubert. Lui aussi,était né à Saint-Just, le 15 août 1754 et ilétait entré à l’Ecole d’Alfort, le 2novembre1775, protégé vivement par un M. Daucourt, qui favorisaaussi son frère Antoine. Sorti en 1780, établi àBagneux, Nicolas Flaubert n’avait pas reçu undiplôme quipermettait aux anciens élèves d’Alfort,établis enChampagne, d’exercer aussi la profession de maréchal et detenirboutique ouverte, sans être obligés de se faire recevoirdans les communautés de maîtrises et jurandes. Ilprésenta une requête dans ce sens, àl’intendant deChampagne, Rouillé d’Orfeuil, et reçut enfin cediplôme spécial, le 8 octobre 1780. Dans une enquêtedemandée par la ministre de Calonne, sur lesvétérinaires de Champagne, on trouve dans uneréponse du subdélégué de Sézanne,que Nicolas Flaubert était âgé d’environ 30ans ;qu’il était marié depuis environ un an ;qu’en ce moment,il habitait Maizières-la-Grande-Paroisse, dansl’élection et le diocèse de Troyes. « Onn’a rienà lui reprocher sur sa conduite ». Il se rendait utile, eneffet, dans Bagneux et aux alentours. On paraissait content de sestalents, « sauf qu’il travaillait à trop grandsfrais.» Après avoir résidé àMaizières, il avait été s’installer àNogent-sur-Seine, à la place de son frèreaîné. Ce grand-père de Gustave Flaubertétait un fort bel homme, qu’un passeport dépeintcommeayant « 5 pieds 3 pouces, le visage rond, lescheveux et sourcils bruns, les yeux bleus. » Il avaitépousé Marie-Apolline Millon, dont il eut deux enfants. Pourvu d’une commission de Bertier, intendant de lagénéralité de Paris, Nicolas Flaubert en obtintune nouvelle pour visiter les chevaux et les bestiaux appartenant augouvernement, placés chez les paysans champenois. On lui devaità ce sujet quelqu’argent, sur lequel il reçut unacompte de 51 livres. En 1793, Nicolas Flaubert est nommé maréchal-des-logispour le transport des subsistances militaires (Entreprise ClaudeMoreau), aux appointements de 90 livres. Il était en tenuemilitaire et avait un cheval pour service. Une adresse à laConvention, à la date du 14 janvier 1794, lesdénonça comme malversation dans leur entreprise etvoilà Nicolas Flaubert et Claude Moreau arrêtés ettraduits devant le Tribunal révolutionnaire. Nicolas Flaubert se défendit vigoureusement, appuyé parsa femme, Marie-Apolline Millon, conseillée par J.-B. Personne,Deputé du Pas-de-Calais, ancien avoué àSaint-Omer. Elle s’entremit vaillamment et recueillit denombreusessignatures pour une pétition où signèrent plus de100 communes de tout ce coin de Champagne. Cependant, laprocédure du Tribunal révolutionnaire rendit inefficacestous les efforts faits pour rendre le malheureux Flaubert à safamille. Le procès se termina le jeudi 27 février 1794par un jugement condamnant le principal accusé, Claude Moreau,à la peine de mort,qu’il subit le jour même. Lemême jugement avait déclaré Flaubert innocent et ilallait être mis en liberté, quand une «dénonciateur » acharné l’accusa de «proposinciviques ». Le MoniteurUniversel (14 ventôse 1794),dit eneffet que Flaubert fut convaincu d’avoir tenu des proposinciviques etcontre-révolutionnaires. Cette dénonciation contre Nicolas Flaubert suffit àmotiver sa condamnation à la déportation dans lamême audience du 9 ventôse. Frappé siinopinément, cet homme, qui avait une grande forced’âme,adressa au député Personne, une protestation, oùil rappelle les pétitions faites en sa faveur, lues à labarre de la Convention et déposées au Comité deLégislation. Il ajoute qu’il a sauvé de la gourmeet dela morve plus de 145 chevaux. « Je réclame donc votrezèle, dit-il, moins pour moi que pour ma femme et mes enfants.» Sa femme ! C’était aussi une compagne trèsvaillante, quiosa se présenter à la Convention et y lire uneéloquente supplique en faveur de Nicolas Flaubert,enfermé depuis dix-sept mois dans les cabanons de Bicêtre.Sa demande fut renvoyée au Comité de Sûretégénérale le 30 nivôse de l’an III. Entretemps, leConseil général de Nogent-sur-Seine, qui avaitdénoncé primitivement Flaubert, revint sur ses opinionspremières et constata que la présence d’un artistevétérinaire comme Nicolas Flaubert, étaitabsolument nécessaire. Tous les jours, en effet, les chevaux desmaîtres de postes, achetés trois ou quatre mille livres,périssaient sans secours. Les directeurs et professeurs de l’École nationaled’Alfortsignèrent aussi une protestation appuyée par Godin,Chabert, Flandrin, Barruel, Dechaux, en date du 4 brumaire, an III.Enfin, le 3 pluviôse, an III (23 janvier 1795), le Comitéde Législation ordonna la mise en liberté du citoyenNicolas Flaubert. Il rentra alors à Nogent. De son mariage avecMarie-Apolline Millon, il eut deux enfants, dontAchille-Cléophas Flaubert, le futur médecin et chirurgiende l’Hôtel-Dieu de Rouen, baptisé àMaizières-la-Grande-Paroisse, alors de l’électionetdiocèse de Troyes et de nos jours, du canton deRomilly-sur-Seine, dans l’Aube, le 15 novembre 1784, ayant pourparrainAchille-Rosalie-Félicité Pétel et pour marraineM. M. Guillard. Le grand-père Flaubert était venuà Rouen, le 10 février 1842, lors du mariage de son filsAchille-Cléophas, avec Mlle Feuriot. Il habita alors chez sonfils qui demeurait rue du Petit-Salut, 8. Son herbier existe àl’ancien Musée d’Art normand. Agé de 57 ans, 8 mois, 12 jours, Nicolas Flaubert mourutà Nogent-sur-Seine, dans sa maison, n° 186, rue del’Hospice, le 7 mai 1814, à 6 heures du matin. Sa mort futdéclarée par son gendre, François Parain,orfèvre à Nogent, le père Parain qu’on voitfigurer dans la Correspondance.Mme Nicolas Flaubert, néeMillion vécut encore dix-huit ans et mourut à 77 ans,aussi à Nogent-sur-Seine, rue de l’Étape-au-Vic, le2 mai1832, chez son petit-gendre Louis-Théodore Bonenfant quidéclara son décès. A cette date, Gustave Flaubert,qui avait alors onze ans, put très bien connaître sagrand-mère. Il y eut un troisième fils de ce Constance-Jean-BaptisteFlaubert, ce fut Antoine Flaubert, né le 15 mars 1759, àBagneux, et qui fut, comme ses deux autres frères,vétérinaire. Il avait fait ses études àl’Ecole d’Alfort, où il était entré le14 juillet1777, comme élève boursier, entretenu sur les fonds de laprovince de Champagne, mais, avec engagement pris par son père,qu’il exercerait dans l’élection de Champagne. Onpossèdeaux Archives départementalesde la Marne les notes que ledirecteur Bourgelat adressait à l’intendant de Champagne,Rouillé d’Orfeuil. On y voit que la pensiond’élève d’Alfort revenait à 120 livres:l’uniforme, les livres, les scalpels, le tablier de cuir : entout, 242livres. Bien qu’il fût souvent souffrant, Antoine Flaubertétaitfort assidu à ses études. Cependant en 1780, le directeurse plaint qu’il s’est « dérangé». « Lamaladie qu’il a éprouvé, dit-il, était lasuite deson libertinage et des fréquentation des mauvais lieux de Paris». Antoine Flaubert n’en fut pas moinsdiplômé, le1er mars 1781. Dans une note, on voit qu’ils’établit àArcis-sur-Aube, qu’il était marié depuis deux ans,qu’il n’avaitpoint d’enfants, et qu’il aurait bien voulu joindreà sonmétier de vétérinaire, une boutique demaréchalerie, n’ayant aucune gratification, pension oulogement,fournis par l’administration. Il ne faudrait pas croire que Gustave Flaubert ne connut pas cesorigines champenoises et nogentaises de sa famille. Tous les deux ans,au moins, en effet, la famille, entière, se rendait àNogent-sur-Seine. « C’était un grand voyage aécrit Mme Francklin-Grout, la nièce de Gustave Flaubert,qu’on faisait en chaise de poste, à petitesjournées,comme au bon vieux temps. Cela avait laissé d’amusantssouvenirsà mon oncle ». Il se rendit ainsi à Nogent auxvacances de 1832 ; en 1833, après avoir passé parFontainebleau ; en 1835, en 1841, en 1845, d’où ilécrità Alfred Le Poitevin. Ils étaient alors reçus chezl’oncle Parain « qui avait épousé la soeur demongrand-père, dit Mme Francklin-Groult ». L’oncleParainvenait aussi très souvent à Croissetoù il passait une partie de l’année,déjeunantfort légèrement et allant fumer sa pipe dans le Pavillon.Souvent l’oncle Parain envoyait des caisses de friandises auxenfantsFlaubert. Il y a de tout ça dans L’Educationsentimentale, pour laquelleFlaubert avait fait un voyage en 1864, le long de la Seine, Corbeil,Melun, Montereau, Sens. Une lettre bien curieuse qu’ilécriviten 1869 à son cousin, Louis Bonenfant, montre que celui-ci luiavait adressé des notes sur Nogent-sur-Seine et que la petitecousine Emilie lui avait transmis un « vocabulaire nogentais». Il nous semble bien que le nom du personnageprincipal de L’Educationsentimentale,Moreau,n’est qu’un souvenir du pauvre Claude Moreau,commissionnaire auxarmées, qui avait été incarcéré dansles prisons de la Terreur, en même temps que le grand-pèreNicolas Flaubert et avait été guillotiné... Onvoulut faire changer ce nom de Moreau, sous prétexte qu’ilexistait encore peut-être des descendants à Nogent,Gustave Flaubert ne voulut jamais y consentir !... GEORGES DUBOSC |