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MARTIN, Alphonse (1854-1930) : La Police municipale du Havre au XVIIIesiècle (1892).
Saisie du texte : O. Bogros pour la collection électroniquede la Médiathèque André Malraux de Lisieux (27.III.2015)
[Ce texte n'ayantpas fait l'objet d'une seconde lecture contient immanquablement desfautes non corrigées].
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Orthographe etgraphie conservées.
Texte établi sur l'exemplaire de la Médiathèque (Bm Lx: n.c) du Recueil des publicationsde la Société Havraise d’Etudes diverses de la 59e année – 1892– Deuxième trimestre publié au Havre par l'imprimerie Micaux.


La Police municipale du Havre
au XVIIIe siècle

par
Alphonse Martin
Membre résidant.
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Il ne faut pas s'attendre, sous ce titre de « Police municipale», à une étude sur le personnel de l'ancienne police du Havre, parceque, à proprement parler, il n'y avait pas de compagnie d'agents depolice, telle que nous la connaissons aujourd'hui : on ne peutqualifier ainsi, les quelques clercs-sergents, la milice desquarteniers et les deux archers, entretenus par l'Hôpital Général duHavre, pour maintenir l'ordre dans notre ville et dans ses faubourgs.
 
Nous nous occuperons spécialement ici des règlements de police et deleurs pénalités, dont quelques-uns sont curieux et bizarres, si on lesrapproche de nos mœurs et de nos ordonnances actuelles.
 
Dans le langage ordinaire, nous dit le célèbre jurisconsulte normandHouard, le mot police indique la juridiction où tout ce qui peutnuire à la tranquillité d'une ville est souverainement réprimé.
 
Montesquieu nous déclare que : dans l'exercice de la police, c'est lemagistrat plutôt que la loi qui punit ; elle exige peu de formalités,des corrections plutôt que des punitions, des règlements plutôt que desexemples et des menaces.

Toutefois, cette justice quasi-paternelle fut sur le point d'êtretransformée en véritable audience avec toutes ses conséquences fiscalespar la substitution, aux magistrats élus, de véritables fonctionnairespourvus de titres héréditaires, qu'il aurait fallu rétribuer. En effet,le roi Louis XIV, qui faisait argent de tout, avait créé, en 1699, danstoutes les villes où il existait une juridiction royale, et moyennantfinance, des offices de lieutenants-généraux de police, de procureursdu roi, greffiers et huissiers audienciers.
 
Ces Juges de police eurent pendant quelque temps, la connaissance desrèglements et des lois concernant le trafic des blés et des grains ; del'exécution des statuts des arts et métiers ; des règlements desmanufactures, de l'observation des dimanches et fêtes, des scandalesdans les églises, de l'assistance et de l'entretien des enfantstrouvés, des permissions à accorder aux comédiens, des publicationspour la récolte des fruits, la confiscation des marchandisesdéfectueuses ; l'entretien des rues, la réception des médecins,chirurgiens et apothicaires.
 
Cette organisation tout à la fois fiscale et municipale ne dura pas, lavéritable administration communale reprit ses droits primitifs, etc'est ainsi que le règlement de police générale du Havre fut renouveléen 1742 par le Conseil de Ville. Peu de modifications ayant étéapportées à ce règlement dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, onpeut le considérer comme ayant formé la règle locale jusqu'à laRévolution de 1789.
 
La principale préoccupation de nos anciens édiles concernait le reposhebdomadaire qui devait être observé, de même que celui des joursfériés. Ce chômage périodique édicté, surtout dans un but religieux,avait aussi cet avantage de protéger, dans une certaine mesure, lestravailleurs contre des excès de production — que l'on est bien obligéde regretter dans beaucoup de cas ; il assurait aussi, une fois parsemaine, une certaine liberté à l'ouvrier, au patron et au commerçant.

A l'exemple de la protestante Angleterre, les boutiques de la villedevaient rester closes les dimanches et fêtes sous peine d'une amendede vingt livres ; les transports de denrées et de marchandises étaientégalement interdits. Il y avait exception pour les rôtisseurs, lespâtissiers et boulangers, dont les magasins devaient rester fermésseulement aux fêtes solennelles. La même exception était faite enfaveur des marchands de tripes, d'herbes, de légumes, qui tenaientboutique ouverte ; en hiver, de sept à neuf heures du matin, et detrois heures et demie à quatre heures et demie du soir ; en été, de sixà neuf heures du matin et de trois heures et demie à cinq heures, etnon en dehors de ces heures, sous peine de trois livres d'amende.

On se plaint aujourd'hui dans notre ville de l'envahissement, nonseulement, des ouvriers venant des environs, mais encore de ceux quiarrivent de l'étranger. Nos anciens administrateurs avaient prévu lesinconvénients résultant de cette immigration et ils avaient édicté desmesures préventives pour l'éviter.

« Défenses étaient faites aux bourgeois et habitants de cette ville, debailler à louage les maisons ou portions d'icelles, à aucuns forains ouétrangers, ni de les recevoir dans leurs maisons pour y demeurer, soitgens de métier ou autres, sans au préalable leur être apparu d'acte deprésentation et d'acceptation de la compagnie, sous peine auxcontrevenants de chacun cinquante livres d'amende. »

Plus tard, ces aubergistes reçurent l'ordre d'inscrire exactement, surun registre spécial, les noms de ceux qu'ils logeaient chez eux et deles amener tous les jours à l'Hôtel-de-Ville pour les examiner et lesconfronter avec leurs passeports. Ceux qui se proposaient de résiderquelque temps au Havre, devaient se munir d'un permis de séjour, payerl'impôt de la capitation et contribuer à toutes les charges de laville. La moindre plainte déposée contre eux entre les mains desofficiers municipaux entraînait de droit le retrait immédiat du permis.

Du reste, comme le fait observer M. G.-A. Lemale dans son Etude sur le Gouvernement du Havre sous les ducs de Saint-Aignan,cette sévérité à l'égard des étrangers avait jusqu'à un certain pointsa raison d'être. La ville du Havre, resserrée dans des limitesétroites, ne pouvait plus s'étendre, et la municipalité croyait de sondevoir de contenir l'accroissement du nombre des étrangers, et deprotéger la population contre les embarras et les dangers d'uneagglomération trop considérable d'individus et qui est devenue funesteaujourd'hui.
 
A une époque où l'on n'avait pas encore songé à capter les sourcesabondantes de St-Laurent, l'eau potable, fournie seulement par cellesde Sainte-Adresse, était assez rare dans la ville du Havre, et l'on neprenait point trop de précautions pour la conserver dans toute sapureté. Il était défendu, comme aujourd'hui, de laver du linge ou despoissons dans les cuves des fontaines publiques, d'y abreuver lesbestiaux et les chevaux, de puiser de l'eau avec des futailles.Toutefois, exception était faite pour les brasseurs, qui avaient lafaculté de prendre de l'eau au vivier.

Les règlements de police s'occupaient avec un soin tout particulier del'approvisionnement des habitants, de l'ordre dans les halles et lesmarchés, ainsi que des moyens de prévenir les accaparements par lesmarchands, en mettant directement en rapport les producteurs avec lesconsommateurs.

Les halles étaient ouvertes à neuf heures en été et à dix heures enhiver, et pour « donner lieu aux bourgeois et habitants de pouvoirfaire commodément leurs provisions, il était défendu aux boulangers,meuniers, brasseurs et autres regrattiers, d'entrer dans ces hallesmoins d'une heure et demie après l'ouverture, et ce, sous peine deconfiscation de grains avec amende de vingt livres. »

Pour éviter toute fraude, il était interdit à ces marchands de faireentrer dans les halles leurs représentants ou d'autres personnesinterposées.
 
D'un autre côté, pour maintenir la concurrence et ainsi éviter lacherté des vivres, il était défendu aux bourgeois et habitants d'allerau-devant des marchands venant du dehors pour acheter leurs produitsavant qu'ils ne fussent exposés à la halle.
  
Pour maintenir l'égalité chez certains industriels, notamment à l'égarddes cordonniers, dès qu'il arrivait au Havre une certaine quantité decuirs, les gardes des métiers en vérifiant la qualité, achetaient lelot tout entier et le partageaient ensuite entre tous les maîtres parégales parts.
  
L'exportation des grains était assujettie à l'autorisation de lemunicipalité chargée de veiller à l'approvisionnement des habitants ;l'importation des grains ou fruits était également réglementée en cesens que les maîtres de navires, barques ou bateaux, étaient tenus dedéclarer la nature de leurs chargements ; la municipalité réglait leprix selon les échantillons présentés, pour le pain, la boisson, lachandelle, le charbon de terre, le bois, les oranges, etc.

Le marché n'était pas moins surveillé que les halles, ici encore leshabitants étaient préférés aux marchands, en effet « les poulaillers,rôtisseurs, pâtissiers, taverniers ou autres regrattiers, ne pouvaiententrer dans le marché, ni dans la poissonnerie, pour y faire leursachats, qu'après huit heures du matin en été et neuf heures en hiver.Les poissonniers n'avaient pas le droit d'acheter le poissondirectement ou indirectement, ils devaient en laisser la vente libre àceux qui l'apportaient et les bourgeois avaient le privilège de s'enfournir en été jusqu'à dix heures du matin et en hiver jusqu'à onzeheures. »

Malgré cette réglementation, le marché était souvent le théâtre descènes tumultueuses, les marchandes de poisson étaient déjà fortimpolies, à tel point qu'à la fin du XVIIe siècle on avait placé aumilieu de la place où il se tenait, un carcan pour « donner etexprimer la terreur aux poissonniers et aux poissonnières, fruitiers etrevendeurs qui commettent journellement des abus en s'emportant les unscontre les autres avec des paroles outrageuses. » Après avoir étésupprimé, ce carcan fut rétabli pour maintenir en respect les maîtresboulangers.

La plus grande partie des rues du Havre, autant que l'on peut en jugerpar celles qui ont conservé leur aspect primitif, étaient fortétroites. Il était donc impossible d'autoriser les vastes marquises etles étalages ou tables de café que nous voyons aujourd'hui dans nosnouvelles voies. Les anciens règlements interdisaient avec raisonl'occupation des rues par des établis, bancs, bois, charrettes, pouvantgêner la circulation.

Mais ces défenses n'étaient guère respectées et l'on pourrait citer denombreux exemples d'infractions de ce genre.

Un jour, notamment, en 1706, un charretier, un meunier et un brément(chargé du transport des liquides) furent appelés devant les échevinsdu Havre parce qu'ils laissaient habituellement devant leurs portes,de jour et de nuit, des harnais et des voitures. Ils répondirent qu'ilsn'avaient pas d'autre endroit pour placer ces objets encombrants.
 
Malgré ces défenses plusieurs fois renouvelées, les habitants étaientpeu soucieux sous le rapport de l'hygiène publique. Les débrisprovenant de l'abattage des bestiaux et les viandes confisquées commeinsalubres étaient jetés à la mer à marée basse, par les bouchers etles tripiers. De plus, ceux-ci avaient l'habitude de nourrir, dansleurs maisons, des pourceaux, des lapins et des pigeons ; des canardsbarbotaient dans la rue des Gallions, mais le nouveau règlement depolice de 1743 fit défense aux chaircutiers (sic), aux rôtisseurs etaux taverniers, de conserver ces animaux chez eux ; ils devaient lesfaire disparaître dans le délai de quinze jours sous peine d'amende etde confiscation. Les dénonciateurs avaient droit au tiers de l'amendeet du produit des choses confisquées. Le surplus était attribué àl'Hôpital Général du Havre.
 
Cette interdiction n'empêcha pas un jour un boucher d'abattre desbestiaux dans les rues ; un autre tua et brûla un porc dans la rue deParis, mais ce sans-gêne lui coûta dix livres d'amende.
 
Le nettoiement de la ville s'opérait, tant bien que mal, au moyen de deux tombereaux fournis par un entrepreneur. Ces voitures étaientdécorées aux armes de la ville et munies d'une petite clochetteannonçant leur passage ; elles circulaient tous les jours, sansexception, depuis huit heures du matin en été, à partir de neuf heuresen hiver, jusqu'à ce que le nettoyage fut terminé.

Voici l'itinéraire de ces tournées utiles, sinon inodores :

Quartier Notre-Dame : les quais, les rues de la Fontaine, desViviers, d'Estimauville, de la Vieille-Prison, St-Michel, St-Julien,d'Albanie, Françoise et successivement les rues transversales.
 
Quartier St-François : les rues Royale, de la Crique, Dauphine, de laFontaine St-François, du Grand et du Petit Croissant, ensuite lesautres rues et la Citadelle.
 
Étant donné l'insuffisance du matériel employé, l'heure tardive àlaquelle commençait le service et la longueur du parcours, il estprobable que la malpropreté régnait toute la journée et qu'il n'étaitpas rare de rencontrer des voitures de vidange en plein jour au milieude la rue Paris.
 
Il y a loin de notre système actuel permettant de conserver presqueindéfiniment dans l'intérieur des habitations ce que la convenance nousinterdit de nommer, avec l'usage ancien de petits récipients en bois,vulgairement appelés brus, qui n'étaient vidés que tous les deux jours.
 
On a souvent répété qu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil, envoici une nouvelle preuve. L'usage des petites boîtes ou paniers quenous apercevons chaque matin alignés sur nos trottoirs, et qui ont reçuassez irrespectueusement le nom d'un préfet de la Seine, était connu ily a cent cinquante ans ; en effet, le règlement de police de 1743faisait défense « de jeter dans les rues des immondices provenant desmaisons, mais de les tenir dans des paniers pour être renversés dansles tombereaux publics de la Ville. »

Les règlements de la police municipale s'occupaient naturellement desmoyens à employer pour l'extinction des incendies qui se déclaraientdans la ville. Mais en l'absence de pompiers casernés, surtout lorsquel'on ne connaissait ni le télégraphe, ni le téléphone, les secoursétaient fort lents à arriver, on en jugera par les dispositions prises,au siècle dernier, pour rassembler les travailleurs sur le lieu dusinistre, ce qui arrivait assez souvent, car dans une ville aussi malbâtie et aussi étroite qu'était le Havre, les incendies devaient êtrefréquents et désastreux.
 
Les gardes du métier des plâtreurs-couvreurs, c'est-à-dire les syndicsde la corporation ou en cas d'absence les anciens, maîtres, apportaientsur le lieu du sinistre quatre de leurs échelles, deux grandes et deuxpetites ; les gardes du métier de calfat étaient soumis à la mêmeobligation. Ceux des métiers de charpentiers de maisons et decharpentiers de navires devaient aussi, au premier signal, se rendre àla maison incendiée munis de leurs haches. Enfin, les gardes et lesanciens maîtres de la corporation des tonneliers apportaient leurs plusgrandes cuves pour recueillir l'eau destinée aux pompes.
 
Ces obligations se trouvent dans le règlement municipal du 7 Avril1854, mais elles sont devenues inutiles par les perfectionnementsapportés dans le service des sapeurs-pompiers.

Devant cette légion de travailleurs, nous aimons à croire que lesprogrès du feu s'arrêtaient promptement, mais quelle lenteur avant demettre en train tous ces pompiers improvisés.
 
Ajoutons que l'entrepreneur de nettoiement de la ville était tenud'apporter également son concours, car il devait amener, devant laporte du magasin des pompes et des seaux, les deux seuls tombereauxemployés à ce travail de salubrité.
 
Les prêts d'ustensiles par les plâtreurs-couvreurs, les charpentiers,les calfats et les tonneliers, obligatoires, sous peine d'amende,étaient rétribués au moyen d'une indemnité fixée à cinquante sols parchaque échelle fournie par les charpentiers, à trente sols par échellede calfat et quarante sols par cuve. Seuls les charpentiers recevaient,pour leur salaire personnel, une rétribution de trente sols, les autresservices étaient gratuits.
 
Pour assurer l'exécution de ce règlement, une audience que l'on peutcomparer à celle du tribunal de simple police, se tenait chaque semaineà l'Hôtel-de-Ville, sous la présidence de l'officier commandant enl'absence du Gouverneur du roi.
 
A cette audience, les contrevenants, dénoncés et assignés verbalement,étaient condamnés aux amendes fixées par les règlements de police. Cesamendes, payées sur le champ, étaient déposées dans un tronc, disposé àcet effet, en faveur de l'Hôpital Général du Havre, qui avait obtenul'attribution de ce produit. Quant aux récalcitrants, c'est-à-dire ceuxqui ne voulaient acquitter l'amende qu'ils avaient encourue, ilspouvaient être immédiatement conduits en prison par le détachement dela garnison posté à cet effet à l'Hôtel-de-Ville.
 
On nous permettra de regretter quelques points de cette justicesommaire et peu coûteuse qui présentait certains avantages pour lasociété. D'abord, l'attribution aux pauvres du produit des amendes,avait cette conséquence que les contrevenants acceptaient de meilleuregrâce une pénalité qui devait profiter à de plus malheureux qu'eux.
 
Cet usage n'a pas disparu entièrement, et on le retrouve encore dansbeaucoup de communes peu importantes, où le maire, se constituantarbitre des différends et des contraventions légères, appelle devantlui, sans aucune procédure, les auteurs des infractions qui lui sontsignalées. Au moyen d'une amende peu considérable, versée immédiatementau profit du bureau de Bienfaisance, le magistrat municipalconciliateur évite à des personnes souvent honorables toute promiscuitéavec des habitués de la simple police, et toute trace d'unecontravention quelquefois insignifiante.

Quant à l'application immédiate de la contrainte par corps, nos mœursactuelles s'accommoderaient difficilement d'un procédé aussi rigoureux,et nous ne voudrions pas le préconiser aujourd'hui.
 
Plus tard, c'est-à-dire dans les dernières années du XVIIIe siècle,l'autorité judiciaire, qui avait la satisfaction de ne compter au Havreque trente-sept cabarets et auberges, c'est-à-dire un sur quatre centquarante-huit habitants, au lieu d'un sur cent, comme on peut leconstater aujourd'hui, vit peu à peu se développer considérablement lenombre des billards, c'est-à-dire des maisons que cette innovationavait converties en véritables tripots. En 1785, le nombre de cesétablissements s'était élevé à vingt-trois, et ce qui s'y passait étaitloin d'être irréprochable, comme le témoigne un règlement dressé le 12Novembre 1785 par le lieutenant du bailli de Caux siégeant au Havre.

« Le nombre de ces jeux met la vigilance des parents en défaut, et lesfils de famille, sûrs de n'être point observés, vont perdre dans cesmaisons dangereuses et leurs mœurs et leurs fortunes ; des commis denégociants, des jeunes marins y consomment un temps précieux etdissipent le prix de leur industrie ; ils contractent un goût dedépense et de prodigalité qui les porte à commettre des infidélités. Ilfaut donc supprimer la plupart de ces billards, où il se fait des parisénormes sur les numéros des billes que le hasard fait échoir auxjoueurs avant les parties. »

Ce règlement portait qu'à l'avenir l'autorisation de la police seraitnécessaire pour ces jeux ; qu'il ne pourrait y être joué que les jeuxportés sur la pancarte, avec défense d'engager des paris sur lesnuméros des billes, sous peine de cent livres d'amende. Les billardsdevaient fermer à huit heures du soir en hiver et à neuf heures en été.

Sans être aussi rigoureux que nos anciens magistrats sur ce moyend'envoyer les jeunes gens se coucher à l'instar des poules, noustrouvons qu'il y a beaucoup d'analogie entre nos anciens établissementsde billard et certains cafés-concerts ; les reproches que l'onadressait il y a un siècle aux premiers seraient parfaitementapplicables aux seconds.