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L’Église de Beuvillers : Une NouvelleFormule de l’Art Décoratif Religieux (1911).
Saisie du texte : S. Pestel pour la collectionélectronique de la MédiathèqueAndréMalraux de Lisieux (17.IX.2013)
Texte relu par A. Guézou.
Adresse : Médiathèque intercommunale André Malraux,B.P. 27216,14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01
Courriel : mediatheque@lintercom.fr, [Olivier Bogros]obogros@lintercom.fr
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Diffusionlibre et gratuite (freeware)
Orthographeetgraphieconservées.
Texteétabli sur l'exemplaire de la Médiathèque (Bm Lx : Norm31bis) de la Revue illustrée du Calvados, 5eannée n°12 - décembre 1911.

L’Église de Beuvillers

Une Nouvelle Formule de l’Art Décoratif Religieux

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Revue illustrée du Calvados - Décembre 1911 [Pdf]Les merveilleux élancements des colonnes et des archivoltes que leMoyen-Age et la Renaissance ont prodigué dans la construction de leurséglises, le souci que gardaient les architectes religieux de ne pass’écarter des principes rituels, sont cause que jusqu’à nos jours ons’est défié des décorations murales qui mettaient en œuvre, la fresque,la mosaïque ou le revêtement de marbres précieux.

L’art chrétien français semble en effet ne comporter dans ses principesessentiels aucun de ces artifices, alors que l’architecture italienneen a fait le plus large usage.

Chez nous, les « maîtres de l’œuvre » retiraient tous leurs effets dela seule pureté des lignes et beaucoup d’entre eux préférèrent même, à d’excessives sculptures, la beauté de la pierre nue.

Cependant, au cours des siècles, il ne fut pas rare de voir les voûteset les murailles se couvrir de fresques, souvent rehaussées d’ors, quirappelaient, ainsi que les vitraux, les épisodes de la vie des patronsde l’église ou les faits remarquables qui s’étaient déroulés dans sesmurs.

Plus tard, soit zèle restaurateur, soit inconscient vandalisme, onrecouvrit d’un épais badigeon ces peintures qui avaient à défautd’autres mérites, celui de constituer de précieux documents pourl’histoire de la région.

On peut voir des exemples de ces peintures ajoutées, puis supprimées, àNotre-Dame de Froide-Rue, à Caen, notamment, et à St-Jacques-de-Lisieux.

Dans beaucoup d’églises modernes, les décorateurs se rattrappèrent dela continence voulue qu’on leur avait imposée et peignirent avec plusou moins de bonheur, les voûtes, les murs et jusqu’aux piliers. Malgréle luxe et l’ingéniosité qu’ils y mirent, l’ornementation ainsiobtenue, n’arrivait pas en général à créer l’atmosphère solennelle etrecueillie qui doit être celle d’un édifice religieux.

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Il est évident que ce but ne pouvait être atteint par la seuledécoration florale au pochoir dont on a tant abusé.

Il était tout naturel que l’artiste ayant à décorer une église recourûtau symbolisme et aux allégories touchantes que renferme lechristianisme.

C’est ce thème que M. L. Barillet, élève de Gérome, a traité avectalent, dans la décoration de l’église Sainte-Cécile de Beuvillers,près Lisieux, et il y a été intelligemment et heureusement secondé dansla partie purement décorative par M. P. Machart .

- La voûte principale a reçu les attributs eucharistiques, et celle duchœur est presque entièrement couverte par un immense Christ encroix. Autour de lui, les symboles du dogme catholique, l’arc-en-ciel,l’auréole de branches d’olivier, les douze colombes, le sang divin quiruisselle…. Deux suites de personnages occupent le bas de la voûte àdroite et à gauche sur une longueur de 9 mètres.

Le côté droit est celui de la jeunesse : au milieu un prêtre célèbre lamesse, autour de lui se pressent des communiants, des jeunes filles,une mère tenant son enfant sur les bras, une petite fille offre desfleurs, symbole du printemps de la vie, plus loin des communiants, desjeunes gens, un novice, un soldat.

Au-dessus de leur tête cette inscription :

Sicut novellæ olivarum Ecclesæ filii sint in circuitu mensæ Domini.

La seconde galerie est consacrée à l’âge mur et à la vieillesse. Cesont des pauvres, puis des cultivateurs avec leurs instruments detravail, un ménage sur le déclin de la vie, un petit garçon qui offredes fruits.

Au milieu, un prêtre dont les cheveux ont blanchi, revêtu du surplis etde l’étole, fait le geste de bénir. A côté de lui, les ouvriers del’usine, représentant la manufacture, avec leurs instruments detravail, la navette pour figurer les tisserands, la clef pourreprésenter les mécaniciens ; vient ensuite un jeune ménage, puis unegrand’mère en prière dont le bras est soutenu par une petite fille,gracieux bâton de vieillesse.

Cette galerie est encadrée par ce texte, tiré de l’Ecriture : « Peccata nostra pertulit in corpore suo super lignum, ut, peccatismortui justitiæ vivamus.

Immédiatement au-dessous des galeries du chœur et soutenant lacorniche, l’artiste a mis en action les huit Béatitudes.

La coupole représente la Gloire du Christ et l’apothéose de Cécile.

Enfin des médaillons entre chaque fenêtre représentent les principauxpersonnages qui ont figuré dans la vie et l’histoire de la patronne dela musique. Les personnages, comme aussi d’ailleurs toutes lespeintures décoratives de l’église, sont dans toute l’acception du motdes « peintures murales », faisant corps, et pour employer l’expressionconsacrée « se tenant bien », se fondant avec tout l’ensemble,s’harmonisant parfaitement avec le ton général.

C’est de plus une heureuse tentative dont le résultat montre qu’uneintelligente décoration pourrait donner un intérêt d’art considérableaux pauvres et mesquines églises qui en sont les plus dénuées.