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Extraits du Bulletinde la Société d'Horticulture et de Botanique du Centre de la Normandie,n°5 - 1876.
Saisie du texte : O. Bogros pour la collectionélectroniquede la Médiathèque André Malraux de Lisieux (22.IX.2015)
[Ce texte n'ayantpas fait l'objet d'une seconde lecture contient immanquablement desfautes non corrigées].
Adresse : Médiathèque intercommunale André Malraux,B.P. 27216,14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01
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Diffusionlibre et gratuite (freeware)

Orthographeetgraphie conservées.
Texte établi sur les exemplaires de lamédiathèque (Bm Lx: Norm 1101) 


EXTRAITS
du

BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ D'HORTICULTURE
DU
CENTRE DE LA NORMANDIE

N°5 - 1876

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RAPPORT
Sur une visite de pêchers de plein vent, à, Orbec, dans le jardin de M. de La Rouvraye

MESSIEURS,

Invités par l'honorable président de la Société à procéder à l'examende deux pêchers de plein vent, nous nous sommes rendus, M. EugèneRivière et moi, à Orbec, dans le jardin de M. de La Rouvraye.

Après nous être rendu compte de l'exposition où les arbres fruitiersétaient plantés, et avoir constaté qu'abrités des vents du Nord par lescollines avoisinantes, et encadrés par divers bâtiments qui concentrentsur eux les rayons solaires d'été, ils se trouvent dans d'excellentesconditions pour une fructification abondante, nous apprenons de labouche de M. de La Rouvraye l'origine de ces pêchers.

Ils proviennent, dit M. de La Rouvraye, de noyaux jetés au rebut, ausortir de la table, parmi d'autres mélangés aux détritus végétauxprovenant du jardin.

Aucun soin de stratification, aucun secours de l'art horticole n'aprésidé à leur germination que l'on peut considérer, en ce cas, commefortuite et accidentelle. Plusieurs noyaux germèrent et donnèrent naissance à différents sujets,parmi lesquels furent choisis ceux qui présentèrent une apparence plusvigoureuse.

Transplantés, deux de ces pêchers, qui nous ont paru être livrés à leurpropre développement, offrent une végétation luxuriante, dont la cause,à notre avis, doit être attribuée non-seulement à la fraîcheur du sol,mais encore aux soins de défoncement et d'amendements spéciauxpratiqués dans les carrés avoisinant la bordure où se trouvent lesarbres fruitiers dont il est question. Les racines ont donné, en effet, libre cours à leur tendance naturelle,qui les pousse à rechercher le sol remué, bonifié, généreux.

De là, pour les arbres fruitiers qui ont fait l'objet de notreinspection, une physionomie toute particulière : tige droite ; troncbrun-verdâtre, abondamment lenticellé ; tête bien conformée ; largesfeuilles longuement lancéolées, d'un vert foncé et brillant, àpétiole rougeâtre ; rameaux solides, fermes, bien colorés du côté où lesoleil exerce sa plus vive action ; fruits à duvet abondant, fortementcolorés, régulièrement arrondis, très-gros, pesantsmême (quelques pêches gracieusement offertes par M. de La Rouvraye auprésident de la Société accusaient des poidsvariant de 225 à 295 grammes, et offraient une circonférence de 25 à 28centimètres). Peau se détachant assez facilement de la chair. Chair peuadhérente au noyau, pourvue d'une eau abondante, blanche, unpeu verdoyante, colorée de veines rouges autour du noyau, parcourue parquelques filaments verdâtres, et offrant au goût une légère acidité. Noyau fort, ovoïde, arrondi sur les flancs, terminé par unepointelongue, aiguë, logée dans une cavité rayée de jaune sur fond rouge,sillonné très-profondément.

La saveur du fruit, en tant que produit d'un arbre de plein vent, estagréable ; mais elle est, sans conteste, celle générique aux fruits de cette catégorie ; les filaments verdâtres, presqueligneux, qui sillonnent la chair, nous confirment eux-mêmes lecertificat d'origine.

Impossible nous a été de déterminer avec la précision désirablel'espèce véritable des pêchers en question, malgré les ressemblances presque typiques que nous paraissaient présenter les fruitsavec ceux de variétés déjà connues et depuis longtemps recommandéescomme méritantes. En effet, les semis de pêchers, plus que tout autre, sont soumis à unefoule de hasards, et les arbres que l'on obtient ont une tendance plusou moins accentuée à reprendre les caractères de l'espèce sauvage ; aussi est-ce une bonne fortune d'obtenir quelquesarbres de mérite sur un nombre un peu considérable de noyaux semés. Tel a été le cas des pêchers soumis à notre examen.

Quoique nous n'ayions pu affirmer le nom à donner aux pêches dont il estquestion, nous avons engagé M. de La Rouvraye à tenter lamultiplication par greffe sur prunier.

De cette façon , l'espèce s'améliorera et sera certainement, par lessoins de culture spéciale appliquée au pêcher d'espalier, ramenée à sontype originel. L'acidité disparaîtra, et la saveur toute particulièredu fruit compensera largement les soins du propriétaire.

Avant de quitter le domaine de M. de La Rouvraye, où l'accueil le plussympathique et le plus courtois a accueilli les membres de lacommission, nous nous sommes entourés de tous les renseignementspossibles pour arriver à une détermination exacte ; les relations del'honorable président de la Société avec plusieurs professeursd'arboriculture nous faciliteront certainement cette recherche, àlaquelle nous portons le plus vif intérêt.

L. BASSIÈRE.

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Application de l'Engrais chimique à la culture des Liliacées.

Avant de vous exposer les résultats de l'application que j'ai faite del'Engrais chimique, je crois utile d'entrer dans quelques détails surla composition des corps organisés.

Quatre substances ont une importance majeure ; on les retrouve toujoursassociées dans l'organisme végétal ; ce sont le carbone, l'oxygène,l'hydrogène, l'azote ; à ces corps, il faut ajouter le soufre, lephosphore, le manganèse, le chlore, le fer, etc., et surtout lescomposés alcalins de quelques métaux, tels que la chaux, la silice, lasoude, la potasse.

Mais c'est toujours à l'état de, combinaison que ces diversessubstances peuvent entretenir la vie dans tout végétal et lui fairesubir d'incessantes transformations.

Ainsi le carbone, qui forme la majeure partie de la charpente solidedes plantes, ne peut être absorbé que sous forme d'acide varbonïque,soit libre, soit combiné avec d'autres composés ; de même del'hydrogène, de l'azote et des autres substances énumérées plus haut.

De plus, les substances diverses ne peuvent être assimilées ettransformées en organes, qu'en subissant d'incessantes compositionset recompositions. Une partie de leurs éléments est rejetée audehors ;une autre est conservée et devient, sous des formes diverses, partieintégrante de la plante.

Les végétaux sont donc des laboratoires de chimie, travaillant sansrelâche à la composition des substances qui sont le véhicule de la viesur ce globe.

A leur tour, les animaux, qui sont des appareils de réduction,recomposent les végétaux et les ramènent ainsi au monde inorganique.

C'est grâce à ce va et vient, antagonisme apparent, qu'ils semaintiennent et peuvent durer en quelque sorte indéfiniment. Arrivant àla nutrition, à l'accroissement des plantes, nous trouvons qu'ils sontdus à l'absorption, par les feuilles, des gaz contenus dansl'atmosphère, et aussi à l'absorption dans le sol, par les racines, desubstances nutritives solubles provenant de la décomposition trèsavancée de débris ou détritus végétaux ou animaux.

Cette assimilation par les plantes des éléments qui concourentdirectement à leur constitution, et forment la base de leur existenceet de leur développement, a été l'objet d'études et de recherches de lapart de MM. de Saussure, Liebig, Boussingault, Dumas, Payen et d'autressavants dont le nom est inséparable des progrès de l'agronomie.

Ils ont pris pour base principale de leurs expériences lefumier de ferme, composé de détritus organiques en décomposition,favorisantsur le lieu même la production d'une plus grande quantité d'acidecarbonique et d'ammoniaque en contact avec les racines des plantesconfiées au sol.

Or, quand on mélange dans une terre des débris organiques, des engrais,on lui restitue une portion de matières minérales variées, dontl'efficacité est d'autant plus grande qu'elles sont plus divisées.

Mais dans l'alternance presque continue des récoltes, la quantité desels ou d'oxyde passant en dissolution diminue d'une façon sensible audétriment de certaines plantes qui ne trouvent plus dans le sol lesconditions normales de fertilité et de fructification.C'est donc la nécessité de maintenir la fertilité du sol, de restituerà celui-ci ce qu'il a fourni aux récoltes, qui a donné lieu à lacréation d'un engrais de composition variable dans de certaines limitessuivant la nature des végétaux à cultiver et suivant lesrécoltes à obtenir.

L'Engrais chimique qui fait l'objet de ce rapport possède une formuledont je ne connais pas les termes précis.

C'est sur l'analyse du froment et celle du fumier de ferme que s'estappuyé l'inventeur pour le composer ; en additionnant une dose plusforte d'azote à celle fournie en partie par le sol et en partie parl'atmosphère, en distribuant dans la couchesuperficielle du sol, qui s'enrichit peu à peu, des éléments qu'on luirapporte, en distribuant, dis-je, l'acide phosphorique, la chaux, lefer, ces derniers à l'état de sulfate, il arrive à suppléer àl'insuffisance fisance des principes indispensables à une bellevégétation et à un rendement rémunérateur.

Voulant me rendre un compte exact des qualités de l'engrais chimique,je m'adressai à un de nos honorables collègues, M. Gibourdel, qui memit gracieusement à même de tenter l'expérimentation sur les liliacées.

Je divisai l'essai en deux cultures :

Culture no 1. — Après avoir fait dissoudre 40 grammes de l'engraischimique dans 10 litres d'eau, je plantai 24 jacynthes, 2 douzaines detulipes duc de Thol, 48 crocus variés, dans des pots de 11 centimètresde diamètre et remplis de sable de carrière ; tous les huit jours,j'arrosai avec la solution à raison de 40 grammes chaque fois. Tous les quatre jours, arrosement avec de l'eau pure.

Culture no 2. — La même quantité de plantes furent à la même époqueconfiées à des pots de 11 centimètres, remplis de terreau composé partiers de terre de jardin, de terreau de feuilles, de terre de bruyère. Tous les quatre jours, arrosage avec de l'eau pure.

A partir du 4 janvier 1876, j'arrosai tous les huit jours les plantesno 1 avec la solution portée à 60 grammes pour 10 litres d'eau (c'étaità l'époque où les hampes de fleurs commençaient à  pointer), sans cesser l'arrosage à l'eau pure tous les quatre jourspour les sujets des deux catégories.

Au premiers mars, toutes les plantes étaient en fleurs ; la seuledifférence que je constatai, c'est dans le feuillage des plantes de la1re catégorie, qui était plus vert et plus sombre que celui des plantesde la 2e. La tenue des hampes, le coloris étaient excellents etidentiques dansles deux cas. De cette expérimentation, à laquelle j'ai apporté le plusgrand soin,je tire cette conclusion : que les plantes de la 1re catégorie n'ont dûleur végétation et leur inflorence qu'à l'addition desubstances minérales solubles contenus dans l'engrais chimique ; caron ne doit pas ignorer que le sable siliceux ne sert qu'à diviser lesol, et ne contient pas une nourriture convenablement préparée pourl'assimilation. Quant aux plantes de la 2e catégorie, elles sontarrivées à leurdéveloppement complet, à leur inflorence rationnelle par suite de lacomposition convenable du mélange de terreau auquel elles étaientconfiées. Aucun ne leur a manqué des 12 ou 14 éléments indispensables àune végétation normale.

Les principaux avantages à recueillir de l'emploi de l'engraischimique, sont : Economie de main d'oeuvre pour la préparation descomposts qui n'ont plus de raison d'être ; Economie de temps pour lerempotage, qui n'est plus nécessaire,puisque les plantes se contentent de pots d'une dimension exigue etpeuvent y parcourir toute leur carrière végétative ; Propreté dansl'opération de l'arrosage, ce qui n'arrive pasd'ordinaire, surtout quand il est fait usage d'engrais liquides d'uneodeur dégoutante, ou de matières animales d'une prompte décompositionet dégageant des miasmes désagréables, qui s'imprègnent dans le tissudes plantes et leur sont nuisibles.

J'engage mes collègues à répéter cette expérience sur toutes sortes devégétaux, en leur recommandant toutefois de se servir de terre dejardin ; le résultat devra être plus concluant en faveur dece nouveau mode de culture, dont les bienfaits ont été reconnus déjàpar des horticulteurs de haut mérite.

L. LOUTREUL.

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L'INFLUENCE SOCIALE DES FLEURS

Il faut le reconnaitre, les fleurs ont leur influence dans la familleet dans la société. Ce n'est pas seulement pour le plaisir desyeux,pour le charme de l'odorat ou la parure de la beauté, qu'elles sontsorties des mains du créateur ; elles sont nées pour donner à nosmaisons cette douce gaieté, ce charme plein de douceur quiles font aimer.

Brillantes, fraîches et parfumées, elles répandent autour d'ellesquelque chose d'elles-mêmes : les caractères les plus violentss'adoucissent dans leur voisinage en se pénétrant à leur insu de bontéet de poésie.

Les fleurs, en effet, réclament des soins intelligents et délicats; sion les veut belles (et on le veut toujours) il les faut arroser, lesmettre au soleil, les émonder, les soutenir avec un tuteur, les dressercontre une muraille, leur donner à tout instant un coup d'oeilami. Les plus simples même, comme les humbles violettes, ne dédaignentpas les témoignages de sympathie de celui qui les possède.

En échange des soins qu'elles réclament, elles rendent plus d'unservice : on est payé au centuple du temps qu'on leur donne. Veut-onque la maison conjugale devienne un petit paradis où le mari et lafemme, le père, la mère et les enfants embellissent leur vie d'uneaffection mutuelle et d'un dévouement sans bornes ? Qu'on entoure defleurs cette maison ! Qu'on en remplisse tous les appartements ! --Les heureux habitants de l'île de Jersey l'ont bien compris ; ils ontle culte du foyer domestique et l'amour de la famille ; leurs maisonsparfumées et fleuries ont réalisé l'idéal du doux chez-soi, de l'home,swelt home, que les anglais connaissent si bien et dont nous voudrionsvoir le goût se répandre un peu plus dans notre pays. L'esprit defamille est en effet la première vertu du citoyen. « Les vertus privéespeuvent seules garantir les vertus publiqueset c'est par la petite patrie, qui est la famille, qu'on s'attache àla grande ; ce sont les bons pères, les bons maris ; les bons filsqui font les bons ci toyens. » (1)

Ceux qui aiment les fleurs, aiment à les cueillir, à en donner, à en recevoir. Elles sont entre voisinsun objet perpétuel d'échanges peu coûteux, mais pleins de charmes.Elles contribuent puissamment à établir et à maintenir entre eux debonnes relations, au grand déplaisir des fauteurs de procès qui voientavec désespoir diminuer ainsi tous les jours le nombre des chicanesrelatives au mur mitoyen.

En résumé, on peut considérer les fleurs comme d'excellentesconciliatrices ; on doit reconnaître qu'elles servent àl'adoucissement des moeurs et au relèvement de l'esprit de famille, etil convient d'en propager l'amour et le culte avec tout le zèle, qu'onapporte à une oeuvre patriotique.

E. GROULT.
(1) Portalis, exposé des motifs du code civil.