[Prospectus]Le Cabinet des Fées ou collectionchoisie des contes des fées, et autres contes merveilleux...-Paris : Impr. Chardon, 1785.- 4 p. ; 27,5 cm. Saisie dutexte et relecture: O. Bogros pour lacollection électronique de laMédiathèque André Malraux deLisieux (15.I.2007) Adresse : Médiathèque André Malraux,B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex -Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01 Courriel : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros]obogros@ville-lisieux.fr http://www.bmlisieux.com/ Diffusionlibre et gratuite (freeware) Orthographe et graphie conservées à l'exception des s longs, i/j, u/v qui ont été restitués. Texteétabli sur l'exemplaire de la Médiathèque (Bm Lx : nc). LE CABINET DESFÉES, OU COLLECTION CHOISIE DES CONTES DESFÉES, ET AUTRES CONTES MERVEILLEUX, En 31Volumes in-12, avec les mêmes Figures de l’Edition de Paris,in-8°. LEsuccès qu’a obtenu la première Editionin-8° decet Ouvrage, a engagé l’Editeur à prendre des arrangemens pourune seconde Edition à laquelle on n’épargnera ni soins ni dépenses ;& pour répondre à l'empressement du Public en lui facilitantl’acquisition de cette charmante Collection, nous nous sommes décidés àla mettre à la portée de tout le monde par la modicité de son prix.Elle consistera en 31 très-grosvolumes in-12,sur beau papier,caractère de Philosophieneuve, contenant tout ce que l’Edition in-8°,renfermera avec les mêmes Planches faites sous la direction de MM.Delaunay & Marillier. Le prix de chaque volume broché sera de43 sols. Quoique l'utilité des gravures dans ces sortes d'Ouvrages soit suffisamment reconnue, les personnes qui ne s’ensoucieront pas, pourront également acquérir cette Collection sansfigures, à raison de 35 sols le volume broché. Leshuit premiers volumes paroîtront en Novembre 1785 ; & la suitede mois en mois par livraisons de deux Volumes. Onsouscrit pour l’Edition in-12,avec figures & sans figures,& pour celle in-8°.en 31 volumes, dont 10 paroissentactuellement, à Genève, chez BARDE, MANGETET COMPAGNIE,Imprimeurs-Libraires ; & à Paris, Chez CUCHET,Libraire,Editeur des OEuvres de le Sage, & de celles de l'Abbé Prévost,rue & hôtel Serpente, & chez les principaux Librairesde l'Europe. On ne demande point d'argent d'avance,tant pour l’Edition in-12que pour celle in-8., mais seulement unengagement conforme au modèle suivant. Je soussigné,promets & m'engage de prendre la Collection des Contes desFées, & de payer la somme de 48 s. par chaque Volume in-12.broché, avec figures, - (ou la somme de 35 s. par chaque volume in-12.broché, sans figures) - (ou la somme de 3 liv. 12 s. par chaque Volumein-8°.broché, avec figures,) selon l'ordre des livraisons. A ce 178 PROSPECTUS. LESContes des Fées, nés chez les Orientaux, traduits, imités &embellisparmi nous, après avoir joui du succès le plus brillant, ont subi cettedégradation qui altère insensiblement tous les genres de lalittérature, & les réduit à une nullité qui semble ne leurlaisserque le souvenir d'un vieux mérite : après avoir fait l’occupation desbons Auteurs de la fin du siècle dernier, ils ont dû offrir auxmodernes un champ vaste de morale, d'invention & d'agrément. CesOuvrages furent extrêmement accueillis dans leur origine ; c'estpeut-être le seul genre de littérature qui se soit répandu aussiabondamment & avec tant de rapidité parmi toutes lesclassesdes citoyens : ils ont dû ces grands succès à deux avantages essentielsqu'il est rare de trouver réunis dans les Ouvrages d'imagination,l' instruction &l'amusement.Cette heureuse réunion les fit mettre entre les mains de la jeunesse,en même-tems que les personnes d'un âge mûr en faisoient leursdélassemens. Lamorale mise enaction, & présentée sous les traits de la fiction, estcertainementl'idée la plus heureuse pour faire couler sans force & sansgêneles sentimens de la vertu dans un jeune coeur. On néglige peut-êtretrop aujourd'hui ce moyen ; on veut de trop bonne heure une éducationsérieuse ; on veut que l'enfant raisonne avant qu'il soit raisonnable ;& qu'est-ce qu'un être précoce ? Phénix vouloit des enfans quidevinssent un jour des gens raisonnables ; Fantasqueaimoit mieux avoir de jolis enfans, & pourvu qu'ils brillassentàsix ans, elle s'embarrassoit fort peu qu'ils fussent des sots à trente(*). Onn'ignore pas que les Contes de Fées facilitoient l'instruction avecd'autant plus de succès, que l'attention de l'Elève, nécessairementlégère dans un âge tendre, étoit fixée par le merveilleux desenchantemens, & que le style simple & naïf d'une partiede cesContes étoit plus à sa portée. On le voyoit suivre le fil desévènemens, en attendre la fin, s'intéresser aux malheureux, détesterles méchans, & applaudir aux punitions & auxrécompenses. Amesure que ses facultés se développoient, son imagination vive&ardente goûtoit davantage le style poétique & figuré desOrientaux,& souvent il devoit à ces lectures les germes du talent& dugénie. Cette méthode d'instruction réunissoit encore le double avantage d'entretenirla bonhommie dans les familles, & de lier plus étroitement lespères aux enfans, & les enfans à leur pere. Qu'elles étoienttouchantes ces soirées de familles, où les caresses se prodiguoient àl'envi, où la simplicité formoit le lien du cercle ! Les meres étoientles bonnesde leurs enfans ;elles leur faisoient des Contes, & selon l'humeur de l'Elève,c'étoit la bonne ou la mauvaise Fée qui figuroit le soir. Siles Contes des Fées sont instructifs pour les jeunes gens, ilsacquièrent un plus grand degré d'utilité, selon les gradations del'âge, & le développement des passions, parce qu'ils renfermentdestableaux fidèles de toutes les actions de la vie, & des véritésdetous les tems. Lamorale n'est pas le seul avantage que présentent ces sortes d'Ouvrages; un mérite particulier les distingue des autres productions du génie,celui, comme nous l'avons dit, d'être agréables à tous les lecteurs. «Sous ce merveilleux qui frappe l'imagination de l'enfance, les Contesde Fées contiennent des moeurs admirables, soit dans les caractères,soit dans les évènemens extraordinaires, soit dans les récompenses& les punitions qu'on y fait paroître ; & quoiqu'on lesaitdestinés d'abord pour les jeunes personnes, ils ne laissent pas d'amuseragréablement ceux qui sont d'un âge mûr & formé ».Tel est le sentiment de l'abbé Lenglet Dufresnoy. Aprèsavoir présenté la Féerie sous ses divers rapports d'utilité, il estnécessaire de parler de ce genre littéraire, de lui rendre tout sonlustre, d'indiquer les causes qui lui ont donné naissance, &quidoivent le rendre toujours recommandable. Lemerveilleux, né de l'imagination des Poëtes, est souvent une manièresymbolique & ingénieuse de s'exprimer, un voile jeté surd'importantes vérités qui ne sont jamais mieux senties que lorsqu'on aeu plus de peine à les découvrir ; c'est un jeu de l'esprit, qui n'aquelquefois d'autre but que de plaire par son invention. Les ouvragesoù il est prodigué avec l'art, le goût & le génie nécessaires,onttoujours joui des premiers honneurs dans la littérature. Parmiles ouvrages de ce genre, il en faut distinguer de deux sortes ; lesPoëmes & les Contes. Le merveilleux s'y trouve le même ; il n'yade différence que dans la majesté du sujet, & le but qu'ons'estproposé. Le Poëme élève l'ame & lui imprime des idées denoblesse& de grandeur. Le Conte, plushumble dans son style,est aimable par sa délicatesse & sa simplicité. Dans lepremier,les Dieux opèrent la fiction ; on les voit embrasser la querelle deshéros, les suivre dans les armées, combattre au milieu d'eux, lescouvrir de leur égide, paroître sur des nuages avec toute la majestédivine ; ou se cachant aux yeux des mortels, sous la forme d'un aigle,planer sur la tête d'un guerrier & le protéger : dans lesecond,des êtres non moins imaginaires, des Fées opèrent des prodiges aussiétonnans ; on les voit se métamorphoser elles-mêmes, accorder cettefaculté aux hommes, changer une chaumière en un palais magnifique,faire d'un champ aride un paysage délicieux ; s'occuper également dusort des peuples, de l'éducation des monarques, de celles desparticuliers, de l'élévation d'un empire, des vertus d'une princesse,& de la sagesse d'une bergère. LesContes des Fées sont l'histoire du coeur & l'école des rois ;lesmonarques, les princes, qui en sont les personnages dominans, lessublimes leçons qu'on y trouve, indiquent assez que ces Contes n'ontété créés que pour former & perfectionner le coeur de ceux quisontdestinés à gouverner, & qu'il a été nécessaire de mettre sur lascène des puissances d'un ordre supérieur, qui eussent le droit de dire& de faire sentir la vérité. Que de moyens n'a-t-il pas falluemployer ici, lorsqu'ils ne pouvoient être que proportionnés à lafoiblesse des hommes ? Alors n'est-on pas forcé d'admirer la richessede ces moyens, l'originalité de l'invention, la beauté des détails,& le ton simple & naïf de la Féerie, en même tems qu'onyéprouve ce charme qui est le propre des ouvrages d'imagination, quiséduit & qui ne permet pas d'en interrompre la lecture ?C'étoitsans doute ce qui faisoit dire à Lafontaine : SiPeau-d'Ane m'étoit conté, Lesmeilleurs Auteurs modernes ont senti le prix de ce genre littéraire.J.J. Rousseau, Voltaire, Crébillon, Voisenon, Diderot &beaucoupd'autres s'y sont exercés avec succès ; mais à l'exception de Rousseau,tous en ont écarté la simplicité & la décence, caractèresdistinctifs & recommandables de la Féerie ; ce qui prouveseulementqu'ils ont fait un abus de leur génie, abus qui les exclutnécessairement de la Collection que nous offrons au Public, danslaquelle nous ne ferons entrer que des Contes choisis & propresàremplir les objets indiqués dans ce Prospectus. Enconsidérant donc les Contes des Fées comme des Ovrages propres, soit àl'éducation de la jeunesse, soit à l'instruction des personnes d'un âgemûr, ou comme susceptibles d'amuser agréablement toute espèce delecteurs, leur collection ne peut manquer d'être accueillie, n'eût-elleencore que le mérite de réunir des membres épars, qu'il est impossiblede trouver, & de reparoître à nos yeux comme une galerie detableaux des meilleurs maîtres anciens, dont on fait revivre lescouleurs. LISTE COMPLETTE
Lu & approuvé, ce 18septembre 1784. Signé,DE SAUVIGNY. De l'Imprimerie de CHARDON,rue de la Harpe, près celle de la Parcheminerie. (*) La Reine Fantasque, contede Fée, par J.J. Rousseau. |