Aller au contenu principal
Corps
DUPREY: Simplerécit de manifestations extraordinaires des esprits qui sesont produites à Lisieux : par la facultémédianimique de Mlle Marie D... et de M. Duprey, avec ousans leur volonté.- Rouen : Giroux et Renaux,1863.- 23 p ; 21 cm.
Saisie du texte : S. Pestel pour la collectionélectronique de la MédiathèqueAndréMalraux de Lisieux (17.II.2006)
Texte relu par : A. Guézou
Adresse : Médiathèque André Malraux,B.P. 27216,14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01
Courriel : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros]obogros@ville-lisieux.fr
http://www.bmlisieux.com/

Diffusionlibre et gratuite (freeware)
Orthographe et graphieconservées.
Texteétabli sur l'exemplaire de lamédiathèque (Bm Lx : norm brc 51) .

SIMPLE RÉCIT
DE
MANIFESTATIONS
EXTRAORDINAIRES
DES ESPRITS
QUI SE SONTPRODUITES A LISIEUX,  PAR LA FACULTÉMÉDIANIMIQUE
DE Mlle MARIED….. ET DE M. DUPREY, AVEC
OU SANS LEURVOLONTÉ.


~*~

AVERTISSEMENT.

Les manifestations des Esprits, n’ayant lieu que par lapermission ou la volonté de Dieu, et dans le but de nousprouver leur immortalité, ne doivent pas devenir un objet despéculation.

C’est pourquoi le produit de la vente de cette brochure estdestiné aux Ouvriers sans travail, qui sont aussi desesprits souffrants et malheureux, et qui ont besoin de notre secoursmatériel, comme les esprits qui ont quitté cetteterre ont besoin de notre secours spirituels (la prière).

C’est le même principe de charité quinous recommande de soulager les uns et les autres.


~*~

SIMPLE RÉCIT
DE
MANIFESTATIONS EXTRAORDINAIRES DES ESPRITS.

~*~

Au mois de décembre 1859, trois personnes réuniesdans une maison de la rue du Canfran, à Lisieux, selivraient à des expériencesmagnétiques qui consistaient à faire tourner desassiettes par le toucher de la main. Mlle Marie D…. proposade soumettre la table à la mêmeépreuve. Elle est bien lourde (1), lui dis-je, mais que celane nous arrête pas.

Je commençai par éloigner la table du murd’une distance de 15 à 20 centimètresenviron. Puis nous posâmes les mains dessus, Mlle Marie etmoi, l’autre personne s’étantécartée, pour demeurer simple spectatrice. -Aussitôt on entendit de petits coups frappés surun meuble qui était au bout de cette table et delégers craquements dans le bois même de la table.Puis la table fut repoussée brusquement contre le murd’où je l’avaiséloignée. Un instant après, elle fitun soubresaut qui fut suivi presque immédiatementd’un fort coup frappé du côtéde Mlle Marie, qui me dit qu’elle avait peur. Je la rassuraiet nous continuâmes. On entendit encore de nouveauxcraquements très-forts, mais, cette fois, ils avaient lieud’un bout de la table à l’autre etautant de mon côté que de celui de Mlle Marie.

Je désignai alors un nombre de coups qui devaientrépondre à oui et à non. Sic’est un Esprit qui fait agir cette tablem’écriai-je, qu’il réponde oui. - J’obtins oui. - Je lui demandai les initiales deson nom et de ses prénoms, en lui disant de frapper autantde coups qu’il y avait d’initiales. Trois lettresnous furent indiquées, correspondant l’une au nomet les autres aux deux prénoms. Ces initialesétant celles du nom et des prénoms d’unproche parent de Mlle Marie, mort depuis vingt ans, je demandai sij’avais affaire à l’Esprit de ce parent.- Il me fut répondu oui. - Je posai alors à cetEsprit, quelques questions qui m’étaientpersonnelles, mais il n’y répondit que lorsque jeme fus décidé à les lui poser tout baset sans être entendu. C’est que, sans doute, lesrévélations qu’il me faisait et qui mesatisfirent ne devaient, pour plus d’une raison,n’être connues que de moi. - Notreséance fut interrompue par l’arrivéed’une personne devant qui nous ne voulions pas la continuer.

19 Janvier 1860. - Nouvelle expérience. Nousétions trois personnes, dont unen’était que spectatrice. Mlle Marie et moi, nousavons obtenu de la table des mouvements de va et vient, mais riende régulier. J’attribuai cette conduite del’Esprit à des motifs particuliers qui pouvaientle contrarier. Ce qui me fit faire cette supposition, c’estque, pendant que nous opérions, des coups étaientfrappés autour de nous contre les murs et les meubles.

4 Février 1860. - L’expérience de cejour-là fut provoquée par des coups assez fortsque nous entendions près de nous. Mêmesopérateurs et mêmes témoins,même lieu et même table. - A peineeûmes-nous placé le bout des doigts sur la table,qu’elle se mit en mouvement. Puis un fort coup futfrappé sur le bout occupé par Mlle Marie. - Jedemandai alors à l’Esprit que pourrépondre oui, il fît avancer la table vers moi, et que pour répondre non, il lafît aller dans un sens opposé. - A mapremière question, la table s’avançavivement vers moi, puis continua d’avancer àmesure que les questions se succédaient ; aprèsavoir parcouru trois mètres environ, elle finit parm’adosser contre un meuble qui se trouvaitderrière moi. Comme elle me pressait fortement le ventre, jela saisis des deux mains pour la repousser, mais je ne pus yréussir, ce qui me surprit beaucoup. Je ne parvinsà l’arrêter qu’en priant MlleMarie de retirer ses mains et en employant moi-même toutesmes forces.

Nous recommençâmes à la toucher, et auxpremières questions que j’adressai àl’Esprit, la table en se secouant de droite àgauche revint sur moi et se mit à me presser de nouveau.Quand elle ne put plus avancer, elle se souleva decôté pour se renverser sur moi. Mlle Marie et moi,nous posâmes les mains dessus en appuyant fortement pour lafaire retomber, mais ce fut inutilement. Elle ne reprit sa positionordinaire que lorsque nous eûmes retiré nos mains.J’essayai de la repousser et je rencontrai toujours lamême résistance. J’adressai encored’autres questions à l’Esprit et elle sesouleva de nouveau contre moi.

Comme les personnes présentes manifestaient quelquescraintes à mon sujet, je les rassurai en leur disant que,loin d’avoir peur, j’étaistrès-satisfait de ce résultat.

Je demandai à l’Esprit de repousser la table dansun sens opposé, si mes questions ne lui convenaient pas. Ille fit aussitôt.

Je lui demandai ensuite s’il voulait que nous cessassions cesépreuves : il répondit par le signe oui. Alorsje le priai de bien vouloir remettre la table à sa place ;il s’empressa d’obéir. Nouscontinuâmes de toucher la table du bout des doigts, durant leparcours qu’elle avait à faire ; mais ce toucherétait probablement inutile, car elle marchait si vite quenous avions peine à la suivre. Elle regagna sa place, quiétait entre deux meubles et juste de sa dimension, avecautant d’adresse que si elle eûtété transportée par des mainshumaines. - Ce que je viens de raconter avait lieu pendant le jour.

Dimanche 26 février 1860, 8 heures du soir. - De petitscoups ayant été frappés parl’Esprit sur la table, Mlle Marie me demande d’yposer les doigts, car son toucher sans le mien ne produisait aucuneffet, pas plus que le mien sans le sien. Aussitôt la tablese met en mouvement, on entend de forts coups dans la substance dubois. Je pose des questions auxquelles il est répondu par oui et par non.

Des voisins assistaient à cette expérience, nousétions cinq personnes. Une d’elles demande quelquechose secrètement et il y est répondu par lesigne oui. Après quoi, la table s’avancevivement vers moi, m’adosse contre une armoire et me pressefortement entre ce meuble et elle, se soulevant tantôtd’un bout, tantôt de l’autre, parmouvements brusques et saccadés. Puis elle vient appliquersa surface sur ma poitrine et se trouve, dans cette position,enlevée de terre à la hauteur de 70centimètres environ. Mlle Marie, qui se tenait au boutopposé à moi, avait suivi malgré ellel’évolution de la table contre moi et ses doigtsse trouvaient, par conséquent, sur le bord le plusélevé.

A ce moment il s’est produit unphénomène des plus curieux :

Comme je priais avec instance Mlle Marie de retirer ses mains, pour medélivrer de l’étreinte de cette table,elle me répondit qu’elle ne le pouvait pas,qu’une force supérieure lui retenait les mains etles bras. Enfin elle parvint à se dégager, maisnon sans de grands efforts, ni sans avoir étéramenée plus d’une fois, malgré savolonté.

Aussitôt que la table ne fut plus en contact avec les mainsde Mlle Marie, je la posai à terre, ou, pour mieux dire,elle y descendit d’elle-même ; puis je la pris pourla remettre à sa place, mais elle étaitd’une pesanteur extraordinaire, et, dans le trajet, de fortscoups étaient frappés tantôt sous unbout, tantôt sous un autre, et la faisaient osciller entremes mains, malgré moi.

Une autre table un peu plus petite s’étantdéjà agitée sans qu’on ytouchât, nous y posâmes les doigts et elleproduisit des mouvements saccadés. Je proposai de la fairemarcher seule en tendant les mains vers elle et à unecertaine distance ; elle s’avança tout de suitevers nous.

J’expliquai alors aux assistants que les Espritsn’ont aucune préférence pour lesinstruments de leurs manifestations, et que le premier objet venu leurconvient autant qu’une table. Pour le prouver, Mlle Marie etmoi nous touchâmes une chaise qui se mit aussitôten mouvement, ainsi que plusieurs autres objets.

Parmi ces objets il se trouvait une croix de coquillage quin’échappa point à l’influencede notre toucher, ce qui me parut extraordinaire. J’avisaialors un Christ placé sur un meuble ; la croixétait en bois peint en noir et le Christ en os. Je le prispour voir s’il serait aussi docile que la croix de coquillage; mais nous eûmes beau le toucher, il ne fit pas le moindremouvement, ce qui produisit une certaine sensation sur les personnesprésentes. Ce fait attestait que l’image du Christest sacrée et inviolable pour les Esprits.

Comme parmi les assistants il y en avait de peu sérieux qui,par ignorance, étaient disposés à rirede tout, je leur fis observer qu’il ne fallait pas rire de ceque nous ne connaissions pas, que ces faits étaientd’un ordre élevé et se produisaientpour convaincre l’homme qu’il y a au-dessus etautour de lui des êtres invisibles et puissantsqu’il doit respecter. Malgré mes observations,quelques-uns ne pouvaient s’empêcher de rire envoyant les objets se mouvoir sans cause apparente.

Il survint alors un incident auquel j’étais loinde m’attendre :

Les tables et les chaises se mirent d’elles-mêmesen mouvement ; une chaise fut renversée violemment. Enmême temps des coups se firent entendre commefrappés tantôt contre les meubles,tantôt sous les tables. Ils se succédaientà quelques secondes d’intervalle et quelquefois deseconde en seconde. Les rieurs ne riaient plus en présencede ces manifestations insolites que j’essayai plusieurs fois,mais inutilement, de faire cesser.

J’avais beau remettre les chaises et les tables àleur place, elles se déplaçaientaussitôt. De ma vie je n’avaiséprouvé une pareilleanxiété. Je ne savais quel parti prendre. Enfinl’idée me vint de prier les personnesprésentes de se retirer un instant, pour nous laisserinterroger seuls l’Esprit et tâcher d’enobtenir la cessation de ces bruits qui prenaient des proportionsinquiétantes.

Les spectateurs partis, nous nous mîmes en rapport avecl’Esprit au moyen de la plus grande table, mais sans latoucher ; car nous n’osions plus toucher à aucunobjet, tant nous étions émus. Nous nous tenionsà un mètre environ de cette table, quià cette distance répondit à mesquestions par les signes convenus. L’Esprit par cetintermédiaire affirma que ces manifestationsn’avaient d’autre but que de frapperl’imagination des rieurs qui n’avaient puêtre convaincus par des faits ordinaires, et de me convaincremoi-même de la possibilité de pareillesmanifestations, que j’avais déjà vuesmentionnées et auxquelles j’hésitaisà croire.

Durant cette communication, le bruit continuait toujours ;l’appartement était inhabitable. Je priail’Esprit de faire tout cesser, et, pour preuved’acquiescement à ma demande, de remettre lestables et les chaises à leur place ; ce qu’il fitaussitôt, sans que nous eussions besoin de nous mettre encontact avec ces objets. Puis un fort coup fut frappé sur latable, et à partir de ce moment, l’ordre futrétabli.

Je rappelai alors les personnes qui étaient sorties ; ellesne se décidèrent pas à rentrer sansune grande frayeur. Elles nous rapportèrentqu’entendu du dehors, dans la jardin, le bruit des coupsfrappés et du déplacement des objets ressemblaità de vrais grondements de tonnerre. Ce bruit avaitduré à peu près une demi-heure. Dansla nuit il se reproduisit en partie et empêcha de dormir leshabitants du rez-de-chaussée aussi bien que ceux desétages supérieurs.

Samedi 3 mars 1860, milieu du jour. - Une personne voisine de MlleMarie, étant en visite chez cette dernière aumoment où je m’y trouvai, la conversation futamenée sur les manifestations que je viens de raconter. Lavisiteuse n’y avait aucune foi. Pour la convaincre, nousposons les doigts sur la table qui aussitôt se met enmouvement ainsi qu’une autre table ; puis les deux tables semeuvent seules, sans l’influence de notre toucher. Une chaiseest renversée en même temps que de forts coups sefont entendre contre les meubles et sur les tables.

Il est impossible de peindre la stupéfaction de la personnequi se montrait si incrédule un instant auparavant. -J’ai peur, nous dit-elle, je n’oserais pas resterseule dans cet appartement. - Mlle Marie et moi, nous n’avonspoint peur, et comme le bruit continuait toujours, j’ajoutai: Eh bien ! croyez-vous maintenant aux Esprits, àl’existence d’êtres invisibles ? vousvoyez bien qu’il n’y a ici aucune supercherie. - Lapersonne s’en alla satisfaite et convaincue. Aprèsson départ, le bruit cessa de lui-même.

Je priai alors mon Esprit familier de bien vouloir faireécrire par la main de Mlle Marie un avis sur cesmanifestations ; il fit écrire seulement : Je ne le puispas.

______

Je passe sous silence d’autres épreuves quin’ont rien présentéd’extraordinaire et que nous faisions pour notre instruction,Mlle Marie et moi. Il faut dire que, lorsque nous étionsseuls, il ne se produisait jamais le plus léger mouvementdéréglé. L’Esprit que nousinterrogions, et qui était notre Esprit familier, ne nous atoujours témoigné que de la bienveillance.C’était même une chose admirable etimposante que de voir cette table répondre avec tant decomplaisance à toutes mes questions. Quandl’Esprit ne croyait plus devoir répondre, ilrepoussait la table jusqu’à sa place et toutétait fini. Il y a eu certaines séancesoù il a répondu jusqu’à 54questions qui contenaient des mots, des noms et des dates àfaire composer par des coups frappés. Ces communicationsm’intéressaient en ce sens qu’ellesémanaient bien directement de l’Espritlui-même et non de la pensée du médium,comme cela peut arriver au médium écrivain.
______

Dimanche 25 mars 1860. - Nous faisons écrire un Esprit parcoups frappés dans la substance du bois. Comme nousn’en obtenons rien de sérieux, nous lui demandonspourquoi il nous répond de la sorte. « Pour rire,» nous dit-il. - D. Tu aimes donc à rire. - R.Oui. - D. Es-tu méchant ? - R. Non. - D. Es-tu heureux ? -Oui. - Es-tu libre ? - Oui. - Es-tu content d’êtreavec nous ? - Oui. - Veux-tu t’en aller ? - Non. - Eh bien !fais-nous écrire quelque chose.

Il nous faire écrire trois mots dont les deux premiersétaient en latin. J’en connaissais le sens, maissi le troisième eût été danscette langue, je ne l’eusse pas compris. Cela prouvait quecet Esprit était fixé sur mon savoir. Comme cesmots n’exprimaient encore rien de sérieux, je neles rapporte pas. Je continuai à l’interroger. -D. As-tu appris le latin ? - R. Oui. - As-tu étéprêtre ? - R. Non. - Veux-tu nous faire écrire unnom que nous allons t’indiquer ? - R. Oui. - D. Eh bien !fais-nous écrire Marie. Tous les coups frappésrépondirent au numéro de chaque lettre formant cenom. Je le remerciai en le priant de s’en aller. Je luidemandai avant s’il voudrait revenir ; il répondit: oui. Puis tout fut fini.

Ce qu’il y a de plus difficile à expliquer,c’est comment les Esprits peuvent produire des bruits aussiforts qui ne ressemblent en rien aux bruits matérielsordinaires, car, durant cette épreuve, les coupsfrappés comme au dessous de la table avaientété si violents, que celle-ci sautait ainsi queles objets qui se trouvaient dessus.

Jeudi 29 mars 1860, milieu du jour. - L’Esprit commenceà se manifester par de grands coups frappés commeau-dessous de la table ; il la fait se soulever à chaquecoup et lui imprime en même temps des mouvementssaccadés. Je le prie d’être raisonnableet nous faire écrire quelque chose par coupsfrappés ; il fait écrire : Ne te fâchepas. Je lui demande son nom, il répond par uneplaisanterie. Je lui demande encore depuis combien de temps il aquitté la vie terrestre, il nous faire écrire1047 ans ; il a toujours maintenu ce chiffre. Après cela, ilfait avancer la table vers moi ; je cherche à la repousser,mes efforts sont inutiles. Je me lève pour la saisir et latransporter loin de moi ; il m’est impossible de lui fairefaire le plus léger mouvement. Elle paraissaitscellée sur le plancher. Je me rassieds, aussitôtelle revient sur moi, mais avec tant de force que je suisobligé de me lever pour n’être pasrenversé. Elle me pousse, étant debout,jusqu’à ce qu’elle m’ait faitm’adosser contre l’armoire dont il adéjà été question. Elle semet alors à se balancer tantôt d’unbout, tantôt de l’autre, par des mouvementsbrusques et saccadés, puis s’enlèvecomme elle l’avait déjà fait et vients’appliquer à plat contre ma poitrine en mepressant, comme cela avait eu lieu dans une desprécédentes épreuves, mais cette foisavec une violence encore plus grande et au point de gêner marespiration. - Je prie Mlle Marie de se retirer ; elle merépond qu’une force, qui la pousse parderrière, l’empêche de reculer et luiretient les mains en même temps. Après de grandsefforts, elle finit cependant par se dégager. Je pus alorsme débarrasser de la table, que je fis redescendreà terre sans éprouver de résistance.Comme j’étais à bout de force, je disà l’Esprit de cesser son action et de remettre latable à sa place. Celle-ci part àl’instant sans le secours d’aucun contact, etparcourt avec une vitesse remarquable, tout en se traînantsur ses pieds, l’espace de trois mètres, qui laséparait de sa place.

Après quelques moments de repos, et sur la demanded’une dame qui prie que l’on appelle son Espritfamilier, nous touchons de nouveau la table avec le désirque cet Esprit se communique à nous. La table se remetaussitôt en mouvement. - D. Toi, qui fais mouvoir cettetable, es-tu bien l’Esprit que nous avonsl’intention d’interroger ? - R. Oui, - D. Veux-tunous faire écrire depuis combien de temps tu es mort, oumieux rentré à la vie spirituelle. - R. Oui. -Frappe autant de coups qu’il y ad’années que tu as quittél’existence terrestre.

Il frappe 30 coups pour 30 ans.

D. Veux-tu nous faire écrire ton nom ? - R. Oui. - Il faitécrire Jan. J’ai déjàremarqué que les Esprits se soucient peu de lavéritable orthographe et se bornent à produiresimplement les lettres qui forment la prononciation.

Je demandai à la dame intéressée sielle avait connu une personne de ce nom et s’il y avait 30ans qu’elle était morte. - Oui, dit-elle, et il ya juste 30 ans que je l’ai perdue. « Pauvre Jean,ajouta-t-elle, je n’aurais jamais cru qu’au bout de30 ans, tu serais venu faire écrire ton nom en maprésence » Ce Jean ne se trouvant pas àcette époque à Lisieux, il n’y avaitparmi les assistants que cette dame qui l’eûtconnu, ce qui ne laissa pas de faire sur eux une grande impression.L’esprit de Jean, après avoirété durant son existence matériellesympathique à cette dame, en était devenul’Esprit familier depuis sa rentrée au mondespirituel. Ce qui prouve que l’Esprit du parent ou del’ami qui nous a aimé sur la terres’intéresse encore à nous du sein del’autre vie. - Après cette communication,j’ai remercié l’Esprit quis’est retiré, à en juger parl’immobilité de la table.

Un instant après, la table se remetd’elle-même en mouvement. Je demande si elleobéit à l’Esprit qui aprécédé celui qui vient de nousquitter ; elle répond : oui. Je prie alors cet Esprit denous faire écrire quelque chose de sérieux(toujours par coups frappés), il nous fait écrire: Tu me tourmentes. Puis il se met à bouleverser lestables et les chaises. Ces dernières, il les renverseà terre tantôt violemment et avec bruit,tantôt sans bruit, mais avec tant de rapidité quec’est à peine si on avait le temps de les voirtomber. Ce vacarme est encore augmenté par des coupsvigoureux, ressemblant à des coups de marteau etfrappés notamment contre l’armoire dont oncraignait à chaque instant que les portes ne fussentbrisées. Une chaise, qui se trouvait sous une tableprès de la porte d’entrée donnant surl’escalier et sur laquelle était couchéun chat, fut retirée de dessous cette table etrenversée sur le palier avec une telle adresse et une tellepromptitude que le chat partagea son sort, avant d’avoir pufaire le moindre mouvement. Ce pauvre animal fut pris d’unesi grande frayeur qu’on crût pendant quelques joursqu’il n’en reviendrait pas. - L’agitationdes tables et des chaises cessa après le départdes personnes présentes, que la curiosité avaitamenées là.

30 Octobre 1860, entre trois et quatre heures du soir.

Ce jour-là, me trouvant à Lisieux,j’allai voir Mlle Marie. Comme elle m’attendait,elle avait prévenu de mon arrivée deux personnesqui devaient venir nous chercher pour aller faire desépreuves chez elles, le propriétaire de la maisonoù logeait Mlle Marie ne voulant plus qu’on lescontinuât chez lui.

Je demandai à l’Esprit, au moyen de la table quenous avions employée précédemment,s’il consentirait à se manifester dans la maisonoù nous allions aller ; il répont : oui. Surcette même table le couvert fut mis et nous dinâmestranquillement. Les personnes attendues vinrent au moment oùnous allions prendre le café et se disposèrentà le prendre avec nous. La table se mit alors en mouvementsans la moindre sollicitation de notre part. J’interrogeail’Esprit, sans toucher la table, et le priai de cesser, vuque le propriétaire avait interdit toute manifestationbruyante. Je lui dis que dans la nouvelle maison où nousallions nous transporter, il ferait ce qu’il voudrait. Ilprofita bien de la liberté, comme on le verra par la suite.Le bruit cessa et rien ne vint nous interrompre pendant que nousprenions le café. Mais l’Esprit, soit que notreconversation se prolongeât trop à songré, soit pour tout autre motif, se mit à secouerla table si violemment que les objets ne pouvaient tenir dessus, etcette fois il ne voulut plus cesser.

Cette table était d’une forme carrée ;elle avait des traverses qui reliaient ses pieds de chaque bouttransversalement. Je mis mes deux pieds sur une de ces traverses et ypesai de tout mon poids, en quittant mon siége et me tenantseulement appuyé sur le bout de la table. Malgréces efforts, j’étais entraînépar elle. Nous fûmes obligés de partir pour ne pasvoir se renouveler le vacarme dont nous avionsdéjà ététémoins. L’une des personnes quiétaient venues nous chercher avaitdéjà peur, mais l’autreétait rassurée par notre ferme contenance.

Arrivés dans l’autre maison, noustrouvâmes dans l’appartement où nousallions opérer deux tables qui avaient chacune environ 1mètre 85 cent. de longueur. Nous en prîmes une ;mais à peine, Mlle Marie et moi,l’êumes-nous touchée seulement du boutde  l’index de chaque main, qu’elleavança tout de suite vers moi. Je dis tout de suite, car jene sais si l’on aurait pu compter l’intervalled’une seconde entre le toucher et le mouvement.

Je priai l’Esprit de vouloir bien nous laisser appelerl’Esprit familier des personnes chez qui nousétions. J’appelai celui de l’uned’elles, qui répondit par un mouvement de latable. - D. Es-tu bien l’Esprit familier de telle personne ?- R. Oui. - D. Veux-tu nous faire composer ton prénom parcoups frappés avec les pieds de la table ? Il frappe lenombre de coups correspondant aux lettres duprénom  Eugène. - D. Donne-nouségalement ton nom de famille. - Il fait composer Mary. -D. Depuis combien d’années as-tu quittéla terre ? - Il frappe cinq coups pour cinq ans.

Je procédai de la même manière pourl’Esprit familier de la deuxième personne. Cetesprit fit composer le prénom Alexandre et le nom Cauchon, et frappa trois coups pour indiquer qu’ilétait mort depuis trois ans.

Qu’on juge de l’étonnement de cespersonnes qui assistaient à ces épreuves pour lapremière fois et qui voyaient serévéler des noms d’amis connusd’elles seules ; car, quant à moi, jen’en avais jamais entendu parler.

Il y eut encore un autre fait remarquable ; c’est que pourfaire écrire le mot Alexandre, l’Esprit fitfrapper un S au lieu d’un X, ce qui faisait Alesandre. -N’est-ce pas la prononciation usitée dans lepatois de votre pays ? demandai-je ; - il me fut répondu oui. - Est-ce pour cette raison, dis-je àl’Esprit, que tu as fait frapper un S ? - ilrépondit oui.

Après cette épreuve, je priai mon Espritfamilier, qui est aussi celui de Mlle Marie, de faire écrirequelque chose par la main de cette dernière, qui se mità tracer les mots suivants : Je suis votre Esprit familier,vous êtes dans la maison d’honnêtes gensqui n’ont rien à craindre des mauvais Esprits,parce qu’elle n’en est pasfréquentée. Aussitôt, et comme pourdonner un démenti à cette assertion,l’Esprit tapageur s’empare de la main de Mlle Marieet lui fait faire violemment de grands traits sur le papier. Puis, illui fait écrire des choses si grossières que jedéclarai ne pas vouloir les lire à lasociété. L’Esprit alorsramène de force la main de Mlle Marie et lui faireécrire, en s’adressant à moi : Si tune lis pas ce qui est écrit, je tourmenterai Marie demain ouun autre jour. - Je vais lire, lui dis-je, si tu me promets de ne pastourmenter Marie. Il le promit (2). - Je lusl’écrit et le brûlai ensuite.J’ai su depuis que l’Esprit avait tenu sa promesse.

Cette lecture faite, la table avance vers moi ; je prie Mlle Marie den’y pas toucher. Elle avance seule en me pressant et en meforçant de reculer avec mon siége,jusqu’à ce que je me trouvearrêté par l’autre table demême grandeur qui se trouvait derrière moi.Après m’avoir bien pressé le ventre parmouvements saccadés, elle se renverse sur mes genoux etcherche dans cette position à me frapper à lafigure. Il s’établit alors une lutte, pour ainsidire corps à corps, entre moi et cette table, qui agissaitdans ses mouvements comme si une personne deboutl’eût poussée par derrièrecontre moi. Les spectateurs tremblaient pour moi ets’écriaient à chaque instant :« Elle va vous faire du mal. » Enfin je finis parm’en débarrasser en la faisant retomber sur unbout. Puis elle fut renversée violemment par terre. Cettelutte avait duré environ dix minutes ; il étaittemps qu’elle cessât, carj’étais au bout de mes forces.

Mais tout n’était pas encore dit : voici quel’autre table, contre laquelle j’étaisadossé, se met aussitôt en mouvement, sans quel’on y touche. Une cafetière en fer-blanc, quiétait dessus, est jetée violemment par terre ; onla relève et on la pose sur un autre meuble ; elle est denouveau rejetée et lancée à unecertaine distance. D’autres objets qui se trouvaient surcette table ont le même sort. A ce moment un coup effrayantest frappé dans une des fenêtres ; on croyait lesvitres brisées, mais il n’en étaitrien. Un autre coup, semblable à un coup de marteau, estfrappé contre la porte d’entrée del’appartement. Comme cette porte ouvrait en dedans, elle futpresque fermée par la violence du coup. Il y avait sur unecheminée des objets en verre, en faïence, enporcelaine ; il en sortait un bruit pareil à celuiqu’ils eussent produit, s’ilss’étaient entrechoqués. Lemême bruit se faisait entendre dans un placard ; oneût cru que la vaisselle, en grande quantitérenfermée dans ce meuble, se brisait. Une personne quivoulait y prendre quelques objets n’osa en approcher. MlleMarie, ayant plus de courage, essaya à son tour. Une portede ce placard fut poussée violemment contre elle, avantqu’elle eût pu mettre la main sur quoique ce soit,et la meurtrit. Je saisis alors cette porte et la maintinsd’une main ; on put s’assurer ainsi que rienn’était brisé. Tant que je fuslà, le bruit cessa dans le placard, mais, aussitôtque je me fus retiré, il recommença ainsi que lescoups contre les portes. D’un autrecôté, les chaises étaientjetées par terre ; nous les relevions, elles yétaient jetées de nouveau, tantôt avecviolence, tantôt sans bruit, et avec une vitesse surprenante.Les tables étaient aussi en mouvement, non-seulement lesdeux dont il a été question, mais encore unetroisième, qui était ronde et chargéede vaisselle.

Il y avait bien une heure que ceci durait, à partir dumoment où nous avions commencé ; nousétions tous désolés, inquiets.J’avais en vain supplié l’Esprit demettre un terme à ses manifestations trop bruyantes, lorsquel’idée me vint de sortir et de faire uneprière fervente que j’improvisai pour lacirconstance. Quand je rentrai, tout cessa ; un fort coup futfrappé contre une des portes du placard, et puisl’on n’entendît plus rien. Nous noussentîmes alors soulagés d’un grand poidset nous respirâmes plus librement. Nousn’étions nullement tentés derecommencer, parce que nous avions remarqué que chaque foisle bruit prenait des proportions plus grandes.

J’ai su depuis quel était l’Esprit,auteur de ces manifestations. Il a fini par se nommer Jean Pierre.C’est l’Esprit d’une personne quej’ai très-bien connue, et qui estdécédée il y a quinze ans.J’ai souvent encore recours à lui pour faireécrire mes médiums et moi-même, quandun Esprit évoqué ne vient pas.

Les faits que je viens de rapporter avec la plus grande exactitude, enomettant toutefois quelques détails qui auraient inutilementallongé le récit, se sont passés, pourla plupart, chez M. Chouelle, propriétaire, rue du Canfran,à Lisieux, et chez M. Dubreuil, restaurateur, mêmerue. Ils sont assez récents pour que des personnessérieuses puissent prendre des informationsauprès de ceux qui en ont ététémoins et qui sont incapables de tromper.

Malgré tous mes efforts, je n’ai jamais pu lesrenouveler. Je ne pouvais rien sans Mlle Marie, ni Mlle Marie sans moi.J’ai vu bien des médiums, mais aucun n’apu la remplacer efficacement. L’Esprit familier qui nous estcommun nous avait avertis qu’il en serait ainsi. Voicil’explication qui nous a étédonnée de cette singularité et qui aété publiée dans la Revue spirite(3), livraison du mois de juillet 1860, p. 194. La cause de cettepuissante médiumnité commune entre Mlle Marie etmoi, serait due à des liens de parentéd’une existence antérieure, existence qui nous aété révélée avecdes détails très-étendus. Ces sortesde rencontres ne sont pas rares et ne sont pas l’effet duhasard ; elles sont permises par Dieu, dans un but que ne pouvonsconnaître.

Comment pouvions-nous produire ces manifestations, Mlle Marie et moi,c’est ce que je ne saurais dire. Toujours est-ilqu’en les provoquant nous ignorions quel serait leurcaractère et que nous allions au devant del’inconnu. On a vu que nous n’avions pas lafaculté de les diriger et qu’ellesémanaient d’un pouvoir supérieurà la volonté humaine.

Un an après ces expériences que je n’aipu continuer avec un médium autre que Mlle Marie, ils’est développé en moi une autrefaculté non moins singulière, c’estcelle de faire écrire sur mon simple désir, parla puissance des Esprits, toute personne qui veut aborderl’épreuve avec bonne foi etsincérité. Comment cela se fait-il ? Jel’ignore. Il suffit que la personne pose la main avec uneplume sur le papier. Quelquefois la main écrit tout de suite; quelquefois ce n’est qu’après quelquesminutes et même une demi-heure et plus d’attente.Souvent aussi l’épreuve ne réussit pas,les personnes ne pouvant dès la première fois semettre en rapport avec leur Esprit familier. D’un autrecôté, j’en ai vu reproduire du premiercoup l’écriture et jusqu’à lasignature que l’Esprit appelé avait dans sonétat matériel. J’ai aussi faitécrire assez bien plusieurs personnes qui ne savaient pasécrire et qui n’avaient jamais écrit.

Une de ces dernières, qui se montrait incréduleet à qui je proposai d’essayer, écrivitaussitôt qu’elle eut la main sur le papier et avecune vitesse extraordinaire. Elle écrivit vingt-cinq lettresqui étaient bien faites, mais ne formaient aucun mot.Pourquoi a-t-elle des lettres plutôt qu’un autresigne, puisqu’elle n’avait jamais su faire aucunelettre. C’est là encore un fait inexplicable.Cette personne s’est tellement effrayée de voir,contre son attente, sa main courir sur le papier,entraînée par une force invisible,qu’elle n’a jamais osé recommencer. Sonimpression avait été si profondequ’elle ne voulait même pas qu’on luirappelât le souvenir de cette expérience.

Je citerai encore un autre fait non moins étrange, quim’est arrivé à Paris, rue de Ponthieu,n° 24, chez un tonnelier.

C’était au mois de novembre 1861. Les personnesqui se trouvaient dans cette maison paraissaient croiresérieusement à tout ce que je leur disais surl’existence des Esprits et sur leurs manifestations. Ellesproposèrent de faire un essai sur une jeune fille de huitans et demi, qui était la nièce du tonnelier.Aussitôt sa main se mit à écrire. Toutle monde croyait que l’enfant faisait elle-mêmeagir sa main. Une personne vint lui boucher les yeux avec ses mains ;l’enfant continua d’écrire lisiblementet bien. Je dis alors qu’il fallait lui bander les yeux avecun mouchoir. Dans cette position, la petite fille se mit àfaire une écriture ronde très-lisible. Au bout dechaque ligne elle revenait pointer ses i et barrer ses t, prenait de l’encre et continuait son mot interrompu sansqu’on eût pu distinguer à quel endroitavait eu lieu l’interruption. - Quand je lui demandai commentelle savait qu’elle n’avait plus d’encre,elle répondit : Je ne sais pas, cela me mène lamain pour aller en prendre. - Elle écrivit ainsi huitlignes ; quand elle était au bout du papier, elle revenaitpour commencer une autre ligne en conservant la distance voulue et ensuivant toujours la ligne droite.

Les personnes témoins de cette épreuve furentstupéfaites. Elles m’avouèrentqu’auparavant elles ne pouvaient croire à lapossibilité de faits si extraordinaires, et que, si elles nem’avaient pas manifesté leurincrédulité, c’était toutsimplement pour ne pas me contredire. L’oncle de la petitefille s’étant mis à dire : Maisn’y a-t-elle point vu ? Je répondis : Eh bien !il faut recommencer ; qu’on lui bande les yeux demanière à ce que personne ne puisse conserveraucun doute. Cette opération terminée,l’enfant se mit à écrire et encoremieux que la première fois. - Dans le milieu de ladeuxième ligne, le mot je ne se trouvait pas assezchargé d’encre. La main de l’enfant,après avoir trempé sa plume dansl’encrier, rechargea ce même mot, en suivantexactement le premier contour des lettres qui le composent. - A la finde la troisième ligne se trouvait le mot tourmentez, maisil n’y avait de place que pour les deux premièressyllabes tourmen, l’enfant fit un trait-d’union,quoiqu’elle ne fut pas assez instruite pour savoir que cetrait était nécessaire, et transporta ladernière syllabe tez au commencement de la ligne suivante.

Cette deuxième épreuve produisit encore huitlignes, mais cette fois l’Esprit avait signé Auguste. La signature, qui ne ressemblait pas àl’écriture des huit lignes, fut reconnue pourcelle de l’Esprit d’un proche parent del’enfant. Quant à l’écriture,c’était celle de l’enfantécrivant dans les conditions ordinaires. Enfin, parmi ceshuit lignes il n’en était aucune quidépassât le bord du papier. On pouvaitmême remarquer qu’à la fin de certaineslignes, les mots se trouvaient plus serrés pour pouvoirtenir dans la même ligne. Les lignes étaientdroites et à égale distance les unes des autres ;les accents aigus et circonflèxes y étaient tousmarqués.

Après une expérience aussi concluante, iln’était plus permis de douter ; je fis ensuiteécrire l’oncle et la tante de la petite fille. Latant qui ne savait pas écrire put produire del’écriture lisible.

Le lendemain matin je conduisis cette jeune fille devant M. AllanKardec pour la faire écrire devant lui et les yeuxbandés, afin qu’il pût juger parlui-même ce fait extraordinaire.L’expérience eut le mêmesuccès ; M. Allan Kardec futémerveillé de voir une enfant douéed’une pareille faculté, et il prit son nom et sonadresse.

CONCLUSION.

Dès les premiers jours où j’essayaid’obtenir les manifestations des Esprits, soit par des faitsmatériels, soit par l’écriture, je necompris pas le but de ces manifestations et en cela je ressemblaisà bien d’autres. En voyant un Esprit merépondre avec tant de docilité au moyend’une table, je croyais que l’on pouvait toutsavoir par les Esprits, surtout ce qui concerne l’avenir. Mesnombreuses expériences ne tardèrent pasà me désabuser et à me convaincre quesi le monde des Esprits sort de son état normal, cen’est pas pour satisfaire notre curiosité, maispour nous prouver l’immortalité de notre Esprit,c’est-à-dire de ce moi qui pense et agit en nous; pour répondre victorieusement à cette question: quelque chose de nous subsiste-t-il après la destructionde notre corps ? question qui a exercé depuis dessiècles le génie des plus grands philosophes.

Aujourd’hui l’existence du monde invisiblen’est plus une hypothèse, grâce auxmanifestations des Esprits qui l’habitent (4). Quand cesderniers révèlent leur présence aumoyen d’une table, comme étant l’objetle plus à notre portée, en la soulevant pour luifaire frapper, avec les pieds et aussi exactement que le ferait unêtre visible, le nombre de coups correspondant aunuméro de chaque lettre dans l’alphabet (5) ;quand par les lettres ainsi indiquées ils composent leur nomet leurs prénoms ; ou bien encore quand ils se communiquentpar l’écriture en conduisant la main dumédium ; quand ils nous apprennent par des signesévidents qu’ils sont les Esprits de nos parents oude nos amis, est-il possible de ne pas se rendre à depareils témoignages ?

Laissons à leur croyance ceux qui ne voient dans ces faitsque l’oeuvre du démon ; ayons plus deconfiance en la bonté divine. Soyons persuadésque Dieu ne permet pas que nous soyons trompés, lorsque nousrecherchons la vérité avec bonne foi.C’est bien l’Esprit d’un parent oud’un ami qui se manifeste à nous, quand nousl’interrogeons avec des intentions pures. Nous ne sommesexposés à être trompés quedans le cas où une futile curiosité est notreseul mobile. Dieu veut nous apprendre par là que nous nedevons pas abuser d’une des plus grandes faveursqu’il nous accorde, pour nous consoler dans les peines denotre existence terrestre. Car obtenir la preuve patente et positiveque les Esprits de nos parents existent spirituellement,c’est obtenir en même temps la preuve que notreesprit continuera d’exister après saséparation d’avec notre corps. Cette certituden’est elle pas consolante ? D’un autrecôté, si nous parvenons à savoir, eninterrogeant l’Esprit d’un parent ou d’unami, quelle est sa situation heureuse ou malheureuse àl’état spirituel, et comment il peut avoir besoinde nous, nous qui n’ignorons pas de quelle manièreil a vécu, ne pouvons-nous pas dans le sort qui lui estfait, puiser l’enseignement le meilleur et le plus propreà nous guider dans notre vie matérielle ?

En permettant au monde spirituel de se communiquer à nous,Dieu a voulu nous faire sortir du matérialisme oùnous sommes plongés. Croyons que, selon la puretéde nos désirs, il autorise les Esprits à nousinstruire de tout ce qui peut nous être utile pour notreavenir spirituel, mais qu’il leur interdit de lever le voilequi cache notre destinée future ici-bas, destinéeque nous devons subir avec résignation et comme uneépreuve qu’il nous a imposée.

                                DUPREY.

N.B.  Je me propose de publier incessamment une autre brochurequi contiendra le récit des communications importantes quej’ai obtenues par l’écriture, ainsi quedes réflexions sur le but et sur la valeur de cescommunications considérées au point de vue moral.


NOTES:
(1) Cette table avait environ 1 mètre 30centimètres de longueur sur 70 centimètres delargeur.
(2) J’étais allé chez cette personnesix semaines auparavant, et le soir du jour où je partis, cemême Esprit, je ne sais pour quelle cause, avait, par coupsfrappés, fait un grand vacarme depuis huit heuresjusqu’à onze heures du soir. Cette personne fut sieffrayée qu’elle fut obligéed’appeler les voisins et qu’elle restaindisposée pendant plusieurs jours. C’està partir de ce moment que le propriétaire avaitinterdit ces épreuves dans sa maison.
(3) Journal d’Études psychologiques,publié sous la direction de M. Allan Kardec, paraissant du1er au 5 de chaque mois, par cahiers de 2 feuilles au moins, grandin-8°. Paris, rue Sainte-Anne, 59 (passage Sainte-Anne).
(4) Lorsque ces manifestations sont bizarres, surtout celles quidégénèrent en tapage, c’estque les personnes qui les provoquent ou qui y assistent ne lesentourent pas d’assez de respect et n’ont pas debut sérieux ; - C’est que les Esprits se guidentsur le besoin qu’ils ont d’agir moralement avecplus ou moins de force sur des témoins que de simples faitsne convaincraient pas. Car, ils ont une mission à remplir,et leur turbulence a une portée. (Voir la Revue spirite deMars, 1863, Entretiens d’outre-tombe).
(5) Les exploiteurs, qui cherchent à imiter les tablesfrappantes, emploient souvent des tables à trois pieds etfont frapper à l’opposé du pointtouché. Je ferai observer, pour mettre en garde contre toutesupercherie, que, lorsque la table obéitréellement à l’impulsion d’unEsprit, elle se soulève pour frapper par lecôté ou le bout, si elle est carrée oulongue. Elle est touchée seulement du bout d’undoigt de chaque main et non par le côtéopposé à celui où se fait entendre lecoup.