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TRAVERS, Julien (1802-18..) : Notice biographique sur M. EphremHouël du Hamel, inspecteur-général des Haras(1887).
Saisie du texte et relecture : C. Thuret pour la collectionélectronique de la Médiathèque AndréMalraux deLisieux (04.VI.2004)
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Orthographe et graphieconservées.

Texte établi sur un exemplaire (BmLx : Norm850) de l'Annuaire des Cinqdépartements de l'ancienne Normandie publié parl'Association Normande à Caen en 1887.


Notice biographique sur
M. Ephrem Houël du Hamel
Inspecteur-général des Haras
par
M. Julien Travers

   Après la douleur de perdre un homme vraimentsupérieur qui, bien jeune, fit sous moi sa rhétorique aucollège de St-Lo, et resta mon ami jusqu'à son dernierjour, je regarde comme un devoir de rappeler son active etféconde carrière, ses connaissances aussi variéesqu'étendues, son caractère à la fois ferme etsympathique, son profond amour pour sa famille et l'attrait de soncommerce avec les milliers d'hommes qu'il a connus en Europe et enAmérique. Le grand rôle qu'il a joué parmi leshauts personnages au milieu desquels il a vécu, et constammentsoutenu avec énergie la nécessité de releverl'état d'abaissement où l'élevage des chevaux setrouvait en France, l'ardeur de son dévouement auxintérêts de sa patrie, tout ce qu'on connaît de M.Ephrem Houël par l'honorabilité de ses relations, par sapersévérance à faire triompher la plupart de sesidées justes, le recommandent à ses contemporains, et, jene crains pas de le dire, à la postérité.

Fils de M. Gabriel Houël du Hamel et de MmeHouël, née Cauchard de Fréneville, il vit le jourà Torigni-sur-Vire, le 28 juillet 1807. « Il descend, ditun de ses biographes, d'une ancienne famille normande, qui a pourberceau la paroisse du Tourneur, près de Vire, et dont le nom seretrouve parmi ceux des guerriers qui suivirent le duc Guillaumeà la conquête de l'Angleterre. » Son père,que j'ai beaucoup connu, avait dans le sang l'ardeur et la valeur despaladins du moyen âge. Il se distingua par sa bravoure sous lepremier empire, fut blessé à la bataille d'Austerlitz,quitta le service militaire, entra dans l'administration des haras, etfut chargé de fonder le dépôt d'Annecy en Savoie.Il avait pris sa retraite lorsqu'il vint me présenter ses deuxfils (Ephrem et Eutyme), pour leur faire faire en même tempsleur année de rhétorique. C'était avantl'année scolaire qui précéda celle de monex-élève, le futur illustre astronome, Urbain Le Verrier,que je m'honore d'avoir eu pour ami jusqu'à son dernier jour.Des deux frères Eutyme et Ephrem Houël, Eutyme étaitle plus calme et annonçait un penseur, peut-être unréformateur politique. Malheureusement, il fut bientôtemporté par une maladie de poitrine, ne laissant que desébauches dont pas une ne fut achevée. Après samort, son frère m'en donna un cahier intitulé : Opiniond'un citoyen français sur quelques résultatsméconnus de la civilisation. Ce début d'un livresérieux traite de la garde nationale, rapidementimprovisée par le gouvernement de Juillet, et de la peine demort qu'il discute et finit par condamner. M. Ephrem me remit lemanuscrit en décembre 1837.
 
Ce cher Ephrem, doué d'une excellente mémoire et d'unevive imagination, me prouva de très bonne heure son goûtpour la poésie. Plus d'une fois, il m'apporta des passages deVirgile, traduits en vers français,brillants, sans doute, mais entachés de fougue romantique. Je nele mettais en garde que contre l'excès de ses hardiesses.
 
Dés la fin de 1829, son père le fit entrer dansl'administration des haras. Le jeune homme étaitpréparé : il visitait souvent le dépôtd'étalons de St-Lo; il y admirait les plus beaux chevaux dupays, étudiait leurs formes avec une sagacité qui nes'est jamais démentie et qui l'a placé au rang des plusgrands hippologues modernes.
 
Le premier ouvrage sérieux qu'il publia fut une grandefeuille de papier fort, imprimée d'un seul côté,à St-Lo, chez Potier, et intitulé : Tableau synoptiquedes moyens de connaître l'âge des chevaux par l'inspectiondes dents. « Ce tableau, dit un rédacteur du Journal des Haras, composéd'après les ouvrages de LaFosse, de Persina et Girard, a étéréédité dans un grand nombre d'ouvrageshippiques. »
  
La vie de M. Ephrem Houël, à partir de ce Tableau synoptique, justementestimé, fut en partieconsacrée à des compositions dont nous allons entretenirnos lecteurs.
  
Réponse àquelques observations sur lesharas. Réflexions sur l'élève du cheval enNormandie. St-Lo, Potier, 1835, in-8° de 45 pages.
  
Le jeune officier des haras qui avait à l'avanceconsacré sa vie à l'administration, s'indigna desattaques dirigées contre elle par le Pilote du Calvados,interprète d'un bon nombre d'éleveurs de la Normandiequi, dans un intérêt privé, disputaient augouvernement le privilège d'acheter et d'entretenir desdépôts d'étalons ; il répondit auxagresseurspar des arguments victorieux. Avant de publier le manuscrit de saréponse, il m'avait souvent entretenu, à St-Lo, de sesprojets d'amélioration, qui dispenseraient la France d'envoyerdes millions chaque année en Allemagne et en Angleterre pour lesrecrues de sa cavalerie. Son principe était celui-ci : «Que l'éleveur élève bien et que le luxen'achète qu'en France. » Il y revenait par cetteformule : « Si le luxe n'achète pas, pas d'encouragement.- Si les éleveurs élèvent mal, pas de vente.» Les conséquences de cette polémique furentfécondes, grâce au zèle et au patriotismepersévérants de l'auteur.
 
Des diffèrentesespèces de chevaux enFrance depuis les temps les plus anciens jusqu'à nos jours.Avranches, Tostain, 1840, in-8° de 30 pages.

Le résumé simple et lumineux de cettebrochure est la nécessité de modifications dans lesanciennes races d'un pays, selon les besoins, selon les temps.

Traité complet del'élève ducheval en Bretagne, statistique hippique de la circonscription dudépôt d'étalons de Langonnet. Avranches ,Tostain, 1842 , in-8° de 332 pages.
   
En 1837, M. Houël fut envoyé commedirecteur au dépôt d'étalons de Langonnet, et fitune consciencieuse étude de la Bretagne. C'est lerésultatde cette étude qu'il publia en 1842 et divisa par chapitres endeux parties. Le chapitre quatre de la seconde partie donne uneidée des recherches et de l'érudition de l'auteur : ilfouille les oeuvres les moins connues du moyen âge, et montre ceque le cheval était pour le breton, et ce que le breton estencore aujourd'hui pour le cheval ; le poète, car M. Houëlétait souvent poète dans sa prose, s'exalte à lavue des fêtes bretonnes ; des courseseffrénées excitent à un haut point sonenthousiasme. Jugez-en :

   « Rien n'est gracieux comme leur pose noble etassurée, sur ces petits chevaux fringants et impatients, qui secabrent et mordillent leur frein rustique. Ils partent !!! souvent aunombre de dix à douze, quelquefois plus ; mais quel terrainont-ils à parcourir! C'est tantôt une route dure etinégale, tantôt des marais fangeux, tantôt dessentiers serpentant dans les rochers. Quand on n'a pas vu ces luttespérilleuses, on ne peut s'en faire l'idée ; là estun torrent à franchir, là une descente rapide suivied'une montée aussi rude, là un bourbier épais;rien ne les arrête; ils volent à travers lesbruyères, les rochers, les ravins, comme un groupe de sylphesaériens suspendus aux crinières des chevaux errants dansles bols... Ils font ainsi des courses de 4 à 5kilomètres. Rarement il arrive d'accident, le pied ferme ducheval, la main ferme et l'œil vigilant du cavalier sont leursauvegarde. Ils arrivent ! ! ! la foule separtage, des cris d'enthousiasme s'élèvent de toutesparts, chacun s'intéresse au victorieux : l'homme et le chevalsont l'objet des empressements de l'assistance ; le laurier et lesrubans brillent à leur tête. On veut savoir le nom ducheval, son âge, sa race : c'est le héros de lafête, on ne s'entretient que de lui : il a quatre ans ; il adéjà gagné deux moutons au pardon de Scaër,une génisse à celui de Rostrenen. L'annéedernière, il avait gagné dix moutons en divers lieux : ila battu un fils de Bijouà la course de St-Brieuc. Pour lui,il est fils de *Bédouin*, sa mère n'avait jamaisété battue !... On dirait une scène deNew-Market ; mais ce n'est pas pour 25,000 fr. que le breton a couru,c'est pour un mouton de 3 fr. Et on l'appelle barbare !... Ah !barbares sont ceux qui voient ce spectacle avec froideur; barbares sontceux qui n'ont pas compris tout l'avenir caché sous cetterusticité ; barbares sont ceux qui n'ont pas su tirer parti decet amour inné, instinctif, ardent, impérissable desbretons pour le noble compagnon de l'homme ! Que voulez-vousqu'ils fassent de plus? qu'ils aient de superbes harnais, quand ils ontà peine du pain ! des vêtements de soie quand ilsn'en ont pas de toile ! Ils font ce qu'ils peuvent !!! venezà eux ; ranimez avec de l'or la cendre de ce foyer et vousverrez l'étincelle qui en jaillira. »

L'homme qui a si bien connu la Bretagne, ses mœurs, sesmisères, ses ressources, serait bien étonné s'illa revoyait aujourd'hui ; il serait heureux du bien qu'il y a fait etdes améliorations qu'il avait introduites en fondant uneAssociation bretonne sur le modèle de l'Association normande dueà M. de Caumont.
 
L'année même où M. HouëL fit imprimerson livre sur l'élève du cheval en Bretagne, il futnommé chevalier de la Légion d'Honneur. La rosetted'officier se fit longtemps attendre, grâce aux luttes qu'il eutà soutenir contre de puissants et jaloux personnages, et denombreux industriels coalisés contre l'administration des haras.Cette administration fut défendue avec unepersévérante énergie par M. Houël, qui avaitpour lui tous les genres d'expérience, le talent de la parole,d'immenses lectures et la profonde connaissance du cheval dans laplupart des pays de l'Europe et dans une partie du Nouveau-Monde. Ilétait l'un des plus forts hippologues de son temps : digneélève du comte d'Aure, on l'admirait comme cavalier, tourà tour surveillant au haras du Pin, sous-directeur àBesançon et à Saint-Lo, directeur à Langonnet, audépôt de Paris et, en 1847, au célèbre harasdu département de l'Orne. On l'a dit avec justice :« son coup-d'oeil était tellement exercé,tellement sûr, qu'il jugeait à première vue desqualités et des défauts d'un cheval sans jamais setromper.
 
M. Houël s'était épris à juste titredu premier cheval de lacréation, du cheval arabe. C'est cetype qu'il a constamment recommandé comme modèle àtous les peuples du monde, sans qu'il pensât que tous puissents'approprier la beauté de ses formes et tout le mérite deses qualités. La variété des climats modifie lesraces animales comme les races humaines. M. Houël le savait mieuxque personne; mais il voyait toute amélioration de nos racesdans l'infusion, je dirais presque dans le dosage du sang arabe. Ilavait vu au fond de la Bretagne des courses au trot et des courses augalop sur de petits chevaux ardents, quoique mal nourris, maisimpropres à satisfaire aux besoins d'une grande nation qui abesoin de chevaux nombreux pour ses armées. Le luxe aussia ses nécessités, et l'art de l'élevage est seulen mesure de fournir au luxe de beaux produits.
 
Le directeur du dépôt d'étalons de Langonnet, hommede progrès s'il en fut, donna une impulsion heureuse encréant près de lui un hippodrome qui en fit créerquelques autres, à peu près sans influence, sur le restede la France. Depuis longtemps M. Houël roulait dans satête, parmi d'autres projets, l'établissement de coursesau trot dans toutes nos provinces. Normand, il aspirait à lescréer en Normandie. Né dans la Manche, dans ce beaudépartement, dont le Cotentin est le centre, le Cotentin, cenourricier des bons chevaux que prisent à juste droit leséleveurs de la plaine de Caen, mais qui ne les dressaientgénéralement que pour le luxe. M. Houël avait desvues plus larges ; il voulait créer une institution quirépondit à tous les besoins, et il n'en voyait laréalisation possible que dans les courses au trot. « Uneinstitution ne peut prospérer, disait-il, qu'en suivant lapensée qui l'a fait naître. Les courses au trot en Franceont pour but spécial le dressage du jeune cheval, son meilleurélevage, et son appropriation à tous les services. Il nefaut pas sortir de là. » Il n'en sortit jamais, et ce futson honneur de lutter plusieurs années de sa vie pour la fairetriompher. Le feu qu'il y mit, des démonstrations qu'il fit tantde fois avec une clarté parfaite, lui gagnèrent desapprobations et lui procurèrent des amis. De ses profondes etjudicieuses convictions sortit un livre dont je regarde la secondeédition comme son chef-d'oeuvre. Voici les titres de ses deuxéditions :

Traité des courses autrot. Paris, Dumaine, 1843, in-8° de112 pages.
   
Traité des courses autrot, 2°édition, revue et augmentée. Paris, Ch. Tomera, 1864 ,in-8° de 206 pages. (Cette édition fait partie de laBibliothèque du Sportsman, à 5 fr. le volume.)
  
La préface ajoutée à cetteédition contient 35 pages du plus haut intérêt.L'auteur y rend compte des difficultés qu'il a eues àvaincre pour déterminer les récalcitrants à leseconder. J'aime à croire qu'on me saura gré d'emprunterici quelques pages à cette préface. N'est-ce pas, enréalité, de l'autobiographie ?
  
« Depuis plusieurs années, j'avaisétudié tout ce qui pouvait se rattacher au systèmedes courses au trot; j'avais fait trotter ensemble etséparément des chevaux des différentsdegrés de sang et de diverses origines. J'avais calculéles vitesses selon les âges, les poids et les distances, j'avaissurtout approfondi sur divers sujets la question de savoir si l'alluredu trot de vitesse ne nuisait pas à la régularitéde la locomotion, et si le dressage du jeune cheval pouvaits'opérer par ce moyen. Enfin, j'avais complététoutes les études propres à établir un planréalisable, et je posai les bases d'un ensemble de dispositionsqui comprenait tout à la fois les moyens d'organisation et lesdétails d'exécution.
  
« Tout cela n'était pas chose facile,à une époque surtout où personne ne s'occupait descourses, et où il n'y avait que cinq hippodromes sur toute lasurface de la France.
  
« Ce fut en 1834 que, mon projet bienélaboré , j'en parlai pour la première foisà M. Dittmer, alors directeur général del'administration des haras, et l'un des hommes les plus remarquablesque j`aie rencontrés dans ma vie. II avait pour moi la plusgrande bienveillance, et il accueillit bien mon projet, qui cependantau premier abord lui parut étrange ; il l'examina avec soin, yréfléchit longtemps ; accoutumé qu il étaità n'entendre parler que de coursesau galop, ce nom de coursesau trot lui semblait bizarre, mais il ne l'effraya pas. Ilétait de ces hommes qui jugent froidement, avec conscience; etqui savent écouter. « L'idée me paraît bonne,dit-il, mais avant d'en parler au ministre, je veux consulter quelqueshommes spéciaux. »
  
« Deux jours après, je fus appelédevant une commission présidée par M. Vitet, alorssecrétaire général du ministère du commerceet de l'agriculture, et dont faisaient partie avec M. Dittmer plusieurspersonnages, officiers de cavalerie et autres. J'exposai mon plan et lebut de l'institution que je proposais ; on parla beaucoup, on discuta,on m'interrogea, et la conclusion fut que j'étais ungarçon travailleur et doué de quelque intelligence, maisque mon projet n'avait pas le sens commun. Je me rappelle mêmeque quelqu'un, dont j'ai oublié le nom, me dit que je neparviendrais jamais à faire trotter deux chevaux ensemble, quel'un d'eux au moins prendrait le galop au bout de vingt pas ! On sesépara..... Je fus rappelé par M. Vitet : «J'ai écouté ce que vous avez proposé, me dit-il;je rie suis pas un homme de cheval, mais je crois qu'il y a du bon dansvotre projet. Puisque ces Messieurs le déclarent impraticable,je ne puis rien faire ; mais tâchez de le faire adopter parquelques administrations locales, par quelques conseilsgénéraux , et le principe une fois admis , je vouspromets de le soutenir. » C'est à cette bonne parole queje dus le courage de continuer mes travaux.
 
Cependant M. Dittmer regrettait sincèrement l'issue de laconférence, et m'encourageait à suivre l'avis de M. Vitetet de m'adresser aux administrations départementales. J'avaisdéjà parlé de mon projet à deux hommes quim'honoraient de leur amitié, et qui étaient alorsà la tête de toutes les institutions qui pouvaientêtre utiles à la science et au pays : l'un était M.Pierre-Aimé Lair, l'autre était M. Arcisse de Caumont.Tous deux adoptèrent chaudement mes idées. Le plan descourses au trot fut développé dans les séances etles concours de l'Association normande, ainsi que dans lesréunions de la Société d'agriculture de Caen. M.Cailleux, secrétaire de la Sociétévétérinaire de Normandie, seconda nos efforts avec unzèle qui ne peut trop honorer son souvenir. J'ajouterai enfinque M. du Pont, alors directeur du dépôt d'étalonsde St-Lo, employa la juste influence dont il jouissait dans le payspour faire adopter une institution dont personne mieux que luin'appréciait les résultats futurs...... C'est ainsi quemûrie, patronnée, encouragée par l'éliteintelligente du pays, l'idée des courses au trot se fit jour peuà peu, comme tout ce qui porte en soi un cachet d'utilitéet d'avenir. Cependant ce n'était pas tout encore, la gravequestion financière était là, et quand il fallutaborder sur cet objet les conseils généraux, nouséprouvâmes un refus complet. C'est là qu'il fautplacer deux années de démarches, d'études, detravaux de toute espèce, de voyages, de fatigues et dedépenses à la recherche d'une occasion favorable,odyssée du reste peu intéressante pour le lecteur. Ellevint cette occasion, mais pas du côté où jel'aurais attendue. Ce ne fut pas un homme de cheval qui me vint enaide, c'était un marchand de vin ! La chose, mériteexplication.
  
« Un jour que je me désolais plus que decoutume de l'insuccès de mes efforts, je vis entrer chez moi unmonsieur de bonnes façons; il s'exprima ainsi
    
- Vous avez proposé un plan pourl'organisation des courses au trot ? - Oui, Monsieur. -Vous cherchez unemplacement pour un hippodrome, de l'argent pour donner des prix, uneorganisation enfin ! - Oui, Monsieur ! - Eh bien ! jevous offre tout cela; vous aurez une grande ville pourthéâtre, un hippodrome tout fait, des prix de course;fixons une époque. - Monsieur, répondis-jeenchanté, voici mon plan, veuillez y jeter les yeux. - Inutile,me répondit-il, le plan importe peu, c'est un spectacle que jeveux, voilà tout. Écoutez-moi ? la ville de Cherbourg estune ville de guerre, mais elle a peu de commerce, point d'industrie ;nous sommes quelques jeunes hommes qui nous occupons d'affaires ; pourmoi je fais le commerce des vins avec la Grande-Bretagne ; nousvoudrions attirer chez nous des étrangers par quelquesfêtes attrayantes. Les Anglais ont le goût du cheval et dela mer. Nous avons essayé des régates, elles n'ont pasrépondu à nos espérances, essayons des courses dechevaux; l'idée des courses au trot est nouvelle, c'est unattrait de plus.
  
« M. Le Magnen était un homme aimable, bienposé, j'acceptai son concours. Nous posâmes les basesd'une Société de courses à la tête delaquelle se placèrent les hommes d'intelligence et depatriotisme du pays, Société dont les statuts ont servide modèle à toutes celles qui se sontcréées en France depuis cette époque, et qui, onpeut le dire, tout en créant les courses au trot, ontdonné l'essor aux courses au galop, fort restreintes alors , etqui ne comptaient que cinq hippodromes : Paris, le Pin, St-Brieuc,Aurillac et Limoges.... L'administration municipale de Cherbourg nousvint en aide avec le zèle le plus louable...... Les courseseurent un grand retentissement..... M. Lair était venu toutexprès pour étudier par lui-même la nouvelleinstitution. Sans son concours, il m'eût étéimpossible de fonder un hippodrome à Caen, ce qui étaitle but de mes espérances, car cette ville est depuis dessiècles la cité chevaline par excellence, et estappelée à le devenir de plus en plus, à mesure quela France gagnera en amélioration.
  
«  Toutefois ce ne fut pas chose facile; ous'effraie si facilement du nouveau que les obstacles les plus ridiculesnous furent suscités. Il est inutile de les retracer ici, je neparlerai que des discussions qui eurent lieu relativement àl'emplacement de l'hippodrome. Tout le monde voulait le placer sur lesbuttes d'Allemagne, à l'endroit où M. Aumont avait faitétablir une piste pour l'entraînement de ses chevaux. M.Lair lui-même était de cet avis; il redoutait, avec justeraison, l'humidité du sol de la prairie, qui semblait toutd'abord mériter la préférence ; mais j'insistai sifortement pour cet emplacement unique au monde, par la proximitéde la ville, la splendeur des horizons et l'égalité dusol, que l'hippodrome y fut établi. Depuis cette époque,on a exhaussé la piste au moyen de terres rapportées, cequi remédie à l'inconvénient que l'on redoutait,et qui eût été véritablement un obstacledans les années pluvieuses.
   
«  Cependant l'administration desharas, de son côté, ne restait pas en arrière; M.Dittmer était au courant de tout ce qui se passait et M. Vitettint sa promesse ; les premières courses de Caen, qui eurentlieu en 1837, reçurent une allocation qui ne fit ques'accroître d'année en année, et maintenantl'hippodrome de cette ville est un des plus importants de France par lemérite des concurrents et la valeur des prix qui y sont courus.Comme je l'avais prévu, les luttes au trot en France ne furentque le prélude de nouvelles courses de vitesse qui bientôtprirent la première place sur le turf normand comme sur beaucoupd'autres.
     
«  Après avoirétabli les courses de Cherbourg et de Caen, il m'étaitfacile d'établir celles de St-Lo. - C'est ce qui eut lieu en1838. Un hippodrome fut dessiné dans les landes de la Meauffe,une société se fonda en quelques jours, le succèsobtenu à Cherbourg et à Caen avait facilité leschoses, le zèle fut général... »
  
Cette longue citation ne donne-t-elle pas une hauteidée de l'intelligence et du caractère de M.Houël ? L'ouvrage suivant atteste l'étendue de seslectures et le brillant d'une imagination qui déborde, et a valuà l'auteur une lettre d'Abd-el-Kader, dont j'ai l'original de lamain de l'Émir, ainsi que la copie dont la traduction aété attestée fidèle par l'illustreprisonnier de la France.
   
Histoire du cheval chez tousles peuples de laterre , depuis les temps les plus anciens jusqu'à nos jours.Paris, t. ler, 1848, t. II, 1852, 2 vol in-8°, 606 pages.
  
Ce fut le général Daumas qui fit passerà l'Émir l'ouvrage de M. Houël, à la fin dejanvier 1852. Abd-el-Kader ne l'eut pas plus tôt lu, qu'ilimprovisa cette réponse :

Louangeà Dieu l'unique,
Au savant illustre par sesconnaissances,
A sa Seigneurie M. EphremHouël, inspecteur général
des haras.
Que le salut soit sur vous!
 
Votre livre nous est parvenu. Il mériteraitd'être écrit sur la face du coeur avec de l'encre faite dunoir des yeux. Si Dieu avait donné l'intelligence aux chevaux etqu'ils eussent entrepris de décrire leurs qualités, ilsn'auraient eu ni à ajouter ni à retrancher à votrelivre. Il nous a causé un véritable plaisir; car lavérité des pensées, exprimées avecclarté et netteté, donne une idée juste du parfaitesprit de l'auteur, et semblable à un miroir poli, devant lequelse trouve une lumière, votre livre reflètefidèlement l'intelligence de l'écrivain. Quiconque liravotre ouvrage, sans vous connaître, comme nous qui ne vousconnaissons point, aura, d'après sa lecture seulement, la plushaute idée de la perfection de vos qualités.
 
    Je vous prie d'agréer mes sentimentsd'amitié etde gratitude pour l'envoi que vous m'avez fait.
 
        De la part d'Abd-el-Kader benMahhi Eddin, à la fin dumois de Rabia Etsani 1269 (moitié du mois de février1852).
         Pour copie conforme,
             Le commandantsupérieur du château d'Amboise,
                                   B. BOISSONNEY.

  
En 1847, M. Houël fut nommé directeur du harasdu Pin, et ce zélé directeur fut bientôt unzélé professeur de science hippique àl'École des haras. Les savantes leçons qu'il y donnapendant trois années furent recueillies et publiées dansun volume intitulé :
   
Cours de science hippique,professé àl'École des haras, par M. Ephrem Houël, pendant lesannées 1848, 1849 et 1850. Paris, au bureau du Journal desharas, 41, rue de la Fontaine-Molière, grand in-8°.
 
L'ouvrage est divisé en trois parties : la 1re contient la connaissance approfondie des raceschevalines; la 2e traite deleur production et de leur amélioration; la 3e de tout ce quiconcerne l'industrie chevaline. Les savants détails quedonnel'auteur font de ce livre un traité fort instructif, dontl'édition est depuis longtemps épuisée.
 
Les chevaux de pur sang enFrance et en Angleterre. 1re et 2epartie. Paris, 1859 et 1860, 2 vol. grand in-8°.

Cet ouvrage est un Stud-Book raisonné.« C'est, dit une note insérée dans le Journaldes haras, n° de février 1872 , l'histoire de touslesétalons remarquables par eux-mêmes ou pour leurs produitsqui composent la famille de pur sang en Angleterre et eu France. La Irepartie comprend l'histoire des chevaux arabes qui ont formé larace pure en Angleterre, et celle des chevaux de renom qui l'ontcontinuée. La 2e partie contient l'histoire de chevaux anglaisintroduits en France jusqu'à la même époque ainsique celle des étalons les plus remarquables nés en Francejusqu'à la même époque également. Chaquevolume qui suivra contiendra aussi l'histoire des introductions arabeset celle des célébrités de la race pure néechez les deux nations. » Je crois qu'une suite aété donnée à ces deux volumes, maisj'ignore le nom du continuateur.
 
L'industrie privée etl'administration des haras. -Réponse à M. le baron de Pierres. Paris, 1860,in-8°de 40 pages.
  
C'est une polémique dans laquelle M. Houëldéfendit chaleureusement l'administration des haras contre lesprétentions intéressées de l'industrieprivée. L'auteur avait rompu déjà bien des lancespour cette cause.
   
Notice sur le haras du Pin.Saint-Lo, JeanDelamare, 1863, brochure in-8°. Nous ne connaissons point cetteNotice que l'auteur a, sans doute, oublié de nous envoyer.
   
Les chevaux français etle commerce. Paris,Morris, rue Amelot, 1864, in-8° de 28 pages.
  
Cette brochure est, comme les autres, un complémentde ce qu'a écrit et recommandé tant de fois M. Houëlsur l'élevage et le dressage que, dès 1830, ils'indignait de voir négligés en Normandie
  
« Conçoit-on, me disait-il un jour, ungouvernement qui envoie acheter en Allemagne des chevaux pour sacavalerie, quand il a dans la Manche, dans le Calvados, dans l'Orne,des races qu'il serait si facile d'améliorer? Quelle ignorancede nos ressources ! Quel gaspillage de notre argent ! » Ilparla haut et fut entendu ; mais que d'obstacles il eut àvaincre ! que d'ennemis ignorants et jaloux méconnurent lepatriotisme de ses luttes et l'héroïsme de sapersévérance ! Le triomphe de ses idées futle prix de ses efforts, et la postérité, si elle n'estpas ingrate , reconnaîtra qu'il a ouvert la source des millionsqu'il a fait gagner à la France , et cela aux dépens deses longues fatigues et de l'épuisement presque entier de safortune.
 
Qu'on nous permette de citer les dernières lignes de labrochure ci-dessus inscrite : « Le sort de notre cavalerieest attaché à la production du cheval de service, deluxe, et le sort de la France peut un jour être attachéà une bonne cavalerie. En effet, dit le généralFleury, dans sa lettre à l'Empereur, la production du cheval deservice, fortement stimulée et encouragée, deviendrabientôt un élément de richesse pour la France, enmême temps qu'elle assurera d'une manière certaine lacréation du cheval de guerre, c'est-à-dire de celui quiimporte le plus à l'honneur et à la défense dupays. - Et nuncintelligite !  »
 
Les chevaux français enAngleterre, 1865, par M. E.Houël, inspecteur général honoraire des haras.St-Lo, Delamare, in-8° de 32 p.
 
M. Houël, mis trop tôt en retraite, ne resta pasoisif ; il s'occupa longtemps encore à prêcher auxgouvernements, surtout à la France et à l'Angleterre, sesvues profondes et fécondes et les améliorationsincessantes, but de toute sa vie. Retiré du monde, ilvécut au sein d'une famille honorable, composée de sonépouse, née Treouret de Kerstrat, d'un fils, nomméfort jeune receveur particulier des finances, et de deux filles, dontl'une est religieuse, et dont l'autre, vivant près de samère, a soigné avec une tendre affection et des soinsconstants son excellent père, affaibli par ses travaux et parles années. Disons pourtant qu'avant que sa santés'altérât, il eut des joies auxquelles il aspirait depuislongtemps. Le triomphe de quelques chevaux français en France eten Angleterre le poussèrent à écrire deuxbrochures, celle de 1865 et celle de 1867. Voici le titre de lapremière :
  
Les chevaux français enAngleterre. Paris, MmeBouchard-Huzard, 1885, grand in-8° de 32 p.
 
 Les victoires de Fille-de-l'Airet de Gladiateur sontjustement aux yeux de l'auteur des gloires légitimes pour notreélevage. - Voici le titre de la seconde :
   
De l'amélioration ducheval chez tous lespeuples de l'univers. St-Lo, Jean Delamare, 1867, gr. in-8°de 80p. Un avis sans titre en tête de l'ouvrage est attristant.L'auteur prévoit l'indifférence qui accueillera sabrochure ; il a foi cependant à un retour de l'opinion,rappelle à juste titre les principes qu'il a professés etque son patriotisme a fait prévaloir; mais ce savant hippologue,à l'imagination aventureuse, n'a-t-il pas fait celte fois unvoyage dans le pays d'Utopie ? Après le résumé detant de conseils utiles, comment peut-il se flatter de fairecréer un haras de chevaux arabes dans les environs de l'Irak,haras qui serait entretenu par dix grands états, haras-souche,où des haras secondaires de chaque contrée iraients'approvisionner selon leurs besoins? Ce plan est magnifique; mais ilfaut en ajourner l'application à l'époque où serabien assise la paix perpétuelle de l'abbé de Saint-Pierre.
 
Il me reste à mentionner une dernière brochurechevaline :
 
Le chevalnormand au moyen âge. Caen, Le Blane-Hardel,1881, in-8° de 28 p.
 
M. Houël, lassé, maladif, retiré avec lessiens au château de Montrabot, avait parfois encore desvelléités d'écrire, et je me doute qu'il alaissé quelques manuscrits inachevés. Il m'envoyal'article que je mentionne ici, et, suivant son désir, je le fisimprimer dans l'*Annuaire normand*et tirer à cent exemplairespour lui et pour nos amis.
  
A tant de publications de M. Houël, il me resteà ajouter sa collaboration active et constante au Journal desHaras qu'il acheta vers 1846 (achat désastreux) et qu'ilenrichit de nombreux articles. C'est dans ses colonnes qu'ilinséra ses leçons aux élèves del'École des haras ; c'est là qu'il entreprit unechaleureuse polémique pour soutenir son administration contreles attaques des éleveurs et de tant de hauts personnages quiles protégeaient sans souci de leur propre ignorance.C'était une lutte acharnée entre l'industrieprivée et les haras. Ce grand et utile journal rendit àl'État de sérieux services, c'est dans ses colonnes qu'onpeut lire encore des morceaux d'une logique irréprochable. C'estlà qu'on trouve un rapport au ministre qui avait envoyéM. Houël en Amérique pour étudier les institutionshippiques des deux parties de ce pays immense, rapport trèsprécis, très instructif, inséré parl'auteur à la fin de la deuxième édition de sescourses au trot (1852). C'est encore dans le Journal des Haras qu'onpeut lire une réponse à une lettre que M. Dureau de laMalle avait insérée dans le Moniteur du 16 mars 1855(Notice sur les races domestiques des chevaux). Cette réponse,datée de St-Lo, 30 avril 1857, ne fut inséréequ'en avril 1858,après la mort de M. de la Malle. Elle est calme et victorieuse.
  
Nous n'en finirions pas si nous voulions tout dire sur lesservices rendus à la France par M. Houël, l'homme de chevalpar excellence, l'homme loyal et désintéressé,aimant le bien par nature et toujours à la recherche du mieux,ami sincère et dévoué, ferme, doux et brave autantqu'on peut l'être. On lit dans une nécrologie de M.Charles Dubois, qui n'a malheureusement que deuxpages : « Lorsque l'ennemi envahit laHaute-Normandie en 1870, son patriotisme le porta à fairevolontairement appel aux cavaliers de la Manche pour former l'escadrondes guides qui, quelques semaines après sa formation, servità encadrer les compagnies de batterie d'artilleriecréées à St-Lo par ordre du gouvernement de laDéfense nationale. Ce fut là que nous eûmesl'honneur d'entrer en relations avec lui, et qu'en servant sous sesordres nous pûmes apprécier l'aménité de soncaractère, sa modestie et son inépuisable bonté.» Un peu plus loin il ajoute : « La mortprématurée de son fils, dont la carrière dans lesfinances laissait concevoir le plus bel avenir, porta un coup funesteà sa santé, et, à partir de ce moment, ilvécut dans la solitude, ne s'intéressant plus que de loinen loin aux questions hippiques. »
 
Dans les longs jours de cette tristesse, au fond d'une campagneisolée, il dut se reporter souvent aux souvenirs d'opusculeslittéraires qui avaient fait diversion aux soucis que lui causatant de fois l'opposition d'esprits arriérés à sesidées neuves sur l'équitation. Comme délassement,il avait composé et fait imprimer des brochures dont il me resteà parler brièvement, car elles ne sont qu'un accessoiredans sa vie si accidentée et si laborieuse. Les voici par ordrede date :
   
Le Mont-Saint-Michel.Fontaine, Bréel'aîné, 1835, in-8° de 23 pages.
    
La critique historique n'était pas lefort du jeune littérateur. Son imagination s'éprenaitfacilement des légendes, et ses récits, souvent peuvéridiques, donnaient le change aux lecteurs crédules.
   
Le Mont-Saint-Michel,2me édition.Avranches, Tostain, 1839, in-8° de 45 p.,précédée d'une introduction intéressante deXV p.
 
Le Mont-Saint-Michel, 3eédition, augmentée du Guidedes Voyageurs. Avranches, Tostain, in-12 de 145 p. Cetteédition est augmentée de 72 p.
  
Le Cheval noir et la Marqueblanche. St-Lo, Potier,1839, in-8° de 14 p.
    
Conte du temps passé, scène dechevalerie où le diable joue an rôle et est joué.Fantaisie assez ingénieuse.

Erostrate, drame entrois actes,par le baron de Morainville (pseudonyme de M. Houël). Paris,Schneider, 1850, in-8° de 45 p.
  
Cette pièce est-elle un drame? Non, c'est unecatastrophe historique qui a permis à M. Houël dedévelopper des opinions politiques et philosophiques, surtoutdans le deuxième acte, opinions dont les plus judicieuses sontles plus satiriques. On s'y rallie sans peine, et on l'approuved'avoir, dans l'intérêt de sa place, gardél'anonyme.
   
Un spirite à M. Renan.St-Lo, JeanDelamare, 1867, in-8° de 8 pages.

Cette lettre est une profession de foi catholique trèssérieuse, très honorable, mais quidégénère en une foi aveugle au spiritismesuperstitieux, aux tables tournantes, aux bois parlants, aux crayonsécrivants, etc., foi que je n'ai pu détruire dansl'esprit de mon cher élève, vraiment trop abusé.
   
Le Bon-Sauveur de St-Lo.St-Lo, Elie fils, 1876, in-8° de32 pages.
 
 L'histoire de ce couvent, éminemment charitable,fut humble à son début. Sa fondatrice fut une jeunefille, née à la Barre-de-Semilly, près St-Lo. Ellese nommait Elisabeth de Surville et s'associa trois compagnes par actenotarié de 1712; la communauté obtint deslettres-patentes, datées de Fontainebleau l'an 1726. Elleprospéra à un point extraordinaire. Au moment oùM. Houël écrivait, elle comptait une centaine de soeurs,dont 25 occupées à l'instruction des enfants ; les autresdonnaient leurs soins aux pauvres de la ville et au traitement desaliénés. Les détails d'acquisitions de terrains,de constructions de toute espèce, etc., sont consignésavec précision et simplicité; le style estirréprochable.
  
Saint-Lo était une ville qu'affectionnait M.Houël; il y a passé ces années d'étudesoù l'amour des hautes et belles connaissances s'éprend detoutes les sortes de chefs-d'oeuvre. Il aborda , tout à la fois,l'histoire, l'archéologie, l'histoire naturelle, même lapoésie, et, dès 1833, il fondait la Sociétéd'agriculture, d'archéologie et d'histoire naturelle dudépartement de la Manche ; il en fut le secrétairependant plusieurs années, puis le président. Depuis 1833,j'étais à Falaise, où j'ai passé cinq anscomme principal du collège, et je le fis nommer correspondantd'une société littéraire que MM. Gateron, PierreDavid, Forget, etc. avaient fondée. Plus tard, quand je fusélu secrétaire de l'Académie des sciences , artset belles-lettres de Caen, je l'en fis nommer membre correspondant.
 
Les articles qu'il a fournis à une foule de journaux etde revues sont généralement remarquables par leurutilité pratique et toujours écrits en vue duprogrès.
 
Une telle vie recommande sa mémoire à la Francequ'il a enrichie en l'éclairant sur la routine deséleveurs, en établissant scientifiquement les conditionsde l'élevage , en luttant avec la dernière énergiecontre l'industrie privée pour sauver les haras. Quelle adû être sa joie quand il a su, avant de mourir, que sacause était gagnée, et que Saint-Lo, secondé parle gouvernement, bâtissait un magnifique dépôt quipourrait contenir au moins 250 étalons !
 
Qu'il me soit permis en finissant d'émettre un voeu. Jedésirerais qu'un buste en bronze, représentant M. EphremHouël, fût placé, soit en face du buste de M. LeVerrier, à l'Hôtel-de-Ville de Saint-Lo, soit dans lacour d'honneur du dépôt d'étalons, quand il seraterminé, et qu'au-dessous de ce buste on gravât en lettresd'or sur une table de marbre :

1807-1885
A M. EPHREM HOUEL DU HAMEL,
ANCIEN INSPECTEUR GÉNÉRAL DES HARAS,
INTRÉPIDE ET INTÈGRE DÉFENSEUR DE CETTEADMINISTRATION,
LA VILLE DE SAINT-LO RECONNAISSANTE.