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[LE MONNIER,Guillaume Antoine, abbé].- Rosièrede Passais ou Piété filiale de Jeanne Closier,récompensée par L. A.SS. MM. les ducs deChartres, de Montpensier & Mademoiselle d'Orléans.-Caen : L.J. Poisson, 1787.- 22 p ; 20 cm. Saisie du texte : S. Pestel pour lacollectionélectronique de la MédiathèqueAndréMalraux de Lisieux (27.I.2006). Texte relu par : A. Guézou Adresse : Médiathèque André Malraux,B.P. 27216,14107 Lisieux cedex -Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01 Courriel : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros]obogros@ville-lisieux.fr http://www.bmlisieux.com/ Diffusion libre et gratuite (freeware) Orthographe etgraphie conservées. Les s longs, les i/j et u/v ontété restituées et lesabréviations résolues. Texte établi sur l'exemplairede la Médiathèque (Bm Lx : norm brc 09). ROSIÈREDE PASSAIS, OU PIÉTÉ FILIALE DE JEANNE CLOSIER. RÉCOMPENSÉE Par L. A. SS. MM. Les DUCS DE CHARTRES,DE MONPENSIER & Mademoiselle D’ORLÉANS. ~~~~ Videant pauperes &lætentur. Pf. 68. Pauvres, Voyez & réjouissez-vous. CERTIFICAT De la conduite de JEANNE CLOSIER. NOUS Curé,Ecclésiastiques, Syndic &Habitans de la Paroisse de la Conception, Election de Domfront ;attestons que Jeanne Closier, âgée de 28 ans, estdepuis 14 chargée de soigner & nourrir Marie Ruault,veuve Closier, sa mere, grabataire & absolument infirme ; queladite Jeanne Closier s’acquite de ce devoir avec un courage& une piété dignes de louange ; que,quoique réduite à la plus grandepauvreté, elle n’a jamais eu recours àla mendicité ; mais qu’elle a toujours nourri parson travail sa mere, qui est également affligéed’une maladie cruelle & d’unappétit extraordinaire : que cette jeune Fillemérite notre estime par sa fidélitéà remplir ses devoirs & par la pureté desa conduite. Plusieurs de Nous ont aussi connoissance de ce que cettepauvre Mere, aujourd’hui infirme, avoit pendant sa jeunessesoigné & alimenté bien fidellementpendant nombre d’années son vieux pere, lequels’appelloit la Fleur, & avoitété longtemps Soldat,rétiré sans paye. Il étoittombé dans une grande misére, dans laquelle MarieRuault lui rendit toujours les mêmes soins qu’ellereçoit aujourd’hui de Jeanne Closier. Ce que nousavons voulu attester pour rendre public un exemple aussi louable. A laConception en Passais, ce 10 Juillet 1785. Signé HEROUX,Curé,&c. (Les autres Signans sont au moins 30.) ~*~ LETTRE De M. de B.à M. L. M. en lui envoyant le Certificat. JE vous ai promis, Monsieur, de vousproduire un de ces exemples devertu que vous aimez à couronner. Vous le trouverez dans leCertificat ci-joint. Je vous observe avec vérité,que le portrait est fort modeste, que chaque témoins’est récrié en signant qu’onpouvoit en dire davantage ; que rien n’est plus vrai ni plustouchant que la vertu de cette pauvre Fille ainsi que ses souffrances.Je pourrois ajouter que j’ai proposé de fairerecevoir la Mere dans une maison de Charité, elle y auroitconsenti ; mais la Fille m’a supplié de ne pas luiôter sa Mere. J’ai alors proposéà cette Fille de lui faire une petite dot, de lui donner unpetit azile, & de l’établir avec un jeuneMari qui lui aidât à gagner avec quoi faire vivrecette pauvre Femme. Elle m’a remercié &refusé en me disant les larmes aux yeux. « Non,Monsieur, il mépriseroit ma Mere. La malheureuse infirme estcouverte d’ulcéres & mange comme deux,quand il y a du pain à la maison. » LA jeune Fille est d’une figure& d’unetaille fort agréables, quoique flétrie par lapauvreté ; mais elle est déjàaffectée de rhumatismes qu’elle a acquis enveillant pendant les nuits froides, soit pour filer, soit pour soignersa Mere. On se souvient que pendant le cruel hiver de 1776 elle sedépouilla de ses habits pour ajouter quelque chose aumisérable chiffon qui servoit de couverture à saMere, & elle se couvroit avec des genêts. Vous seriezému, Monsieur, si vous entendiez les bonnes gens quil’avoisinent vous dire avec la plus vive expression,c’est une si bonne Fille ! elle a si bien soin de sa Mere !elle la tient si blanchement ! si blanchement, cela est exactementvrai. Comment fait-elle ? presque point de linge, point de cendre,point de savon. Par la bonté des Cieux, le ruisseau couleauprès de sa cabane & elle lave, lave des lambeauxqui sont d’une propreté surprenante. ELLE n’a jamais mendié.Quelques personnesl’aident un peu, mais l’année est simalheureuse pour le peuple, que les secours ne peuvent venir qued’en haut. Vous, M., &c. AuDésert, 5 Août 1785. LE Certificat & la Lettreci-dessus ontété envoyés à M. lePrieur-Curé de Salenci avec priére de fairestatuer sa Paroisse sur le mérite de Jeanne Closier. Cetterespectable Communauté s’est expliquéeen ces termes : APRÈS avoir recueilli les voix,Nous avons tous dit que laconduite de Jeanne Closier mérite les plus grandséloges, & est très-édifiante ;qu’il ne lui manque aucune des qualités requises,soit du côté des moeurs, soit ducôté de la famille, pour êtrecouronnée Rosiére,& que si elleétoit née à Salenci, Nous nous ferionsun vrai plaisir de lui déférer cet honneur. EXTRAIT du Registre desDélibérations de laParoisse de Notre-Dame de la Conception en Passais, Diocésedu Mans. AUJOURD’HUI Dimanche 6Août 1786, en la Paroisse dela Conception en Passais, la Paroisse assemblée avant laGrande-Messe, Mr L. M. s’est présenté& a dit : « Messieurs, vous m’avezadressé l’an dernier un Certificat honorable de laconduite de Jeanne Closier, duquel suit la teneur. (Le Certificat aété lu & transcrit surle registre.) Je vous dois compte, Messieurs, de l’usage quej’ai fait de ce certificat : je vais avoirl’honneur de vous l’expliquer. J’en aifait passer une copie certifiée véritable auxHabitans de la Paroisse de St-Médard de Salenci, &les ai priés de délibérer &statuer sur le mérite de votre bonne Fille. Ilsl’ont déclarée digne de la Couronne,par une délibération dont copie, extraite de leurregistre & certifiée par leur digne Prieur,m’a été envoyée, &de laquelle lecture va vous être donnée. (Lalecture s’est faite.) Ensuite il a ajouté : MGR le Duc de Chartres, Mgr le Duc deMontpensier &Mademoiselle d’Orléans, informés de labonne conduite de Jeanne Closier, & de la justice que luirendent les Habitans de Salenci, ont voulu donner des preuves del’estime qu’ils font de la Vertu, de la protectionqu’ils s’honorent de lui accorder, & de laconsidération quils attachent au Certificat donnépar votre Paroisse, & pour cet effet ils ontdésiré doter & marier Jeanne Closier,& ont choisi pour leurs représentant la personne deM. de B. fils, qui tiendra lieu de pere à ladite Fille,comme votre Paroisse entiére lui sert de mere. (La mereétoit morte depuis quelques mois.) ENSUITE M. L. M. adéclaré qu’avant deprocéder au couronnement il trouvoit convenable de demanderà la Paroisse si Jeanne Closier a persisté danssa bonne conduite, & si la Paroisse approuve le choix deFrançois Sallé pour époux de laditeJeanne Closier. Ce qui ayant étéaffirmé par l’acclamationgénérale, & en particulier par letémoignage de M. le Curé de cette Paroisse qui adit : « Jeanne Closier est au-dessus de touséloges. La conduite qu’elle a tenue chez moidepuis la mort de sa mere, a infiniment ajouté àla haute opinion que j’avois antérieurement de savertu. » SUR cela M. L. M. a dit : « Mrs,c’est donc votrevoeu que nous allons remplir en couronnant &récompensant votre bonne Fille. Nous allons accompagner M.de B. Fils avec la Paroisse & aller prendre la futureRosiére chez M. le Curé pour la conduireà l’Eglise & lui rendre les honneursd’usage à Salenci. » ET lorsqu’on alloit se mettre enmarche, M. de B. fils adéclaré que S. A. S. Mgr le Ducd’Orléans a voulu contribuer à labonne-oeuvre de ses Augustes Enfans, & accorder auxPauvres de cette Paroisse une aumône de 600 liv. pourêtre distribuée par Jeanne Closier,d’après les lumiéres de M. leCuré & des Notables, le jour du Service qui serafait pour le repos de l’Ame de feu Mgr le Ducd’Orléans ; laquelle somme de 600 liv. il aprésentement exhibée & remiseà M. le Curé & aux Notables qui en ontchargé M. l’Abbé du Tartre, lequelguidera la Rosiére dans la répartition,d’après un état des Pauvres qui lui aété remis avec ladite somme, & leditService a été fixé au jour de demain,& le mariage de Jeanne Closier avec FrançoisSallé au jour de mardi prochain ; àl’effet de quoi, & pour se conformer au Rituel duDiocèse, les Fiançailles serontcélébrées aujourd’huiaprès les Vêpres. LA Paroisse,pénétrée de labonté & de lagénérosité de leurs A. SS. aprié M. Son Curé de vouloir bien exprimer sessentimens de respect & de gratitude envers Elles, &d’apporter Dimanche prochain un projet de lettre deremerciement que la Paroisse s’empressera de signer,&c. (Tous ceux qui savent signer ontsigné.) APRÈSl’Assemblée on aprocédé au couronnement en la maniéreusitée à Salenci. M. de B. fils, suivi de laParoisse, est allé chercher la bonne Fille chez M. leCuré ; deux jeunes Dlles lui ontprésenté & attaché le bouquetde roses. Elle a été reçueà la porte principale de l’Eglise par leClergé en Chapes ; Croix, Banniére, Encens,Eau-bénite ; elle y a étéfélicitée. La Paroisse sous les armes ; laMaréchaussée le sabre nud, faisoient son escorte.Elle & le représentant des Princes ontété placés au milieu duchoeur sur un tapis ; fauteuils & Prie-Dieu. Avantl’Evangile la couronne a étébénie & placée sur la tête dela bonne Fille. Après l’Evangile lePrône, les Priéres Nominales pour Jeanne Closier,comme Dame & Patronne de la Paroisse. Dans le Discoursprononcé à ce sujet on a fait mention de ladistribution de l’Aumône ordonnée parJeanne Closier. Elle & son futur ont communié avectoute édification. Après les Vêpresle Te Deumsolennellement chanté & ensuite lesFiançailles : & pour finir la journée, laRosiére est allée dans le Hameau où saMere a demeuré ; elle y a exercé lacharité & fait ses largesses aux pauvres Habitansqui l’avoient assistée pendant sadétresse. LE lundi elle a distribué les 600livresd’aumône aux Pauvres, après avoir faitles honneurs du Service célébré pourfeu Mgr le Duc d’Orléans. LE mardi elle a étémariée avecFrançois Sallé. Sa nouvelle Famille, quijusques-là ne l’avoit regardée quecomme Dame de la Paroisse, a mêlé la tendreaffection au respect. Tout présage que cette union seraheureuse. L’AUGUSTE solemnité dela Fête, lesprincipaux traits de la vie de Jeanne Closier ont inspiré ledésir de célébrer le tout en vers, quipuissent être chantez dans les Villages, & y faireaimer les vertus que Dieu avoit placées dans lecoeur de cette bonne Fille & qu’il apubliquement récompensées. Faire servir le Chant& la Poësie aux louanges du Tout-Puissant &à l’éloge de la vertu, c’estles ramener l’un & l’autre àleur institution premiére. ~*~ ROMANCE SUR LA PIÉTÉ FILIALE OU HISTOIRE ÉDIFIANTE DE JEANNE CLOSIER. Sur L’AIR : Tout roule aujourd’hui dans le Monde ; Ou sur L’AIR : Du Serin qui te fait envie ; Ou sur un AIR Nouveau ; Ou encore sur L’AIR De la Romance des Trois Fermiers : Faut attendre avec patience. ______________________ RASSEMBLEZ-VOUS, jeunesse tendre, Accourez vous édifier, Accourez, vous allez entendre L’histoire de Jeanne Closier : Vous verrez si la Providence Acquite ses engagemens, Et comment elle récompense Les soins qu’on prend de ses Parens. C’EST-TOI, Filiale tendresse, C’est-toi que je vais célébrer, Fais-moi sentir ta douce yvresse, Soutiens ma voix, viens m’inspirer : Volupté des ames sensibles, Plaisir qui nous ouvre les Cieux, Les ingrats seuls trouvent pénibles Tes momens les plus douloureux. JEANNE CLOSIER perdit son Pere Avant de quitter le berceau, Son Ayeul plus qu’octogénaire (1) Erroit sur les bords du tombeau ; Pour substanter l’Enfant qui pleure Et le Vieillard près du trépas, La Fille-Mere offre à toute heure Son sein & le gain de ses bras. PENDANT quatorze ans Dieu prolonge De ces malheureux l’affreux sort ; L’ayeul termine enfin le songe Qu’on appelle vie, il est mort : Ne croyez pas que la misére Pour cela quitte leur séjour ; Le Tout-Puissant frappe la Mere Et de Jeanne éprouve l’amour. SUR un lit de douleur gisante, Le corps d’ulcéres tout couvert, En proie à la faim dévorante, Telle est celle que Jeanne sert ; Mais la malheureuse est sa Mere, Le devoir devient un plaisir, La peine lui paroît légère Quand elle est seule à la sentir. PENDANT quatorze autres années Le Dieu des vertus se complaît A tenir ces infortunées Comme un or pur dans le creuset : S’il faut subir tant de souffrances Pour te plaire, ô Dieu de bonté, Comment punis-tu les offenses Que l’on fait à ta Majesté ? NUIT & jour à l’ouvrage ardente, Jeanne songe à gagner le pain, Qui de sa Mere défaillante Doit calmer la cruelle faim ; S’il diminue, alors la Fille A jeun fait bien s’aller coucher ; Ainsi la Poule à sa famille Offre un épi sans y toucher. QUAND la bonne Mere soupçonne Que le besoin la fait m’aigrir, Elle reprimande, elle ordonne A sa Fille de se nourrir ; Jeanne alors employant la ruse (2) A la tromper sait réussir. Enfant, veux-tu que Dieu t’excuse ? Il faut ainsi désobéir. ON ne peut tromper la nature Comme on peut tromper ses Parens, Lui refuser la nourriture, C’est la frauder à nos dépens : Jeanne, une trop longue abstinence Eteignoit tes précieux jours ; Mais une utile défaillance Pour toi demanda du secours. (3) L’HIVER, pour échauffer sa Mere, Jeanne chauffe au feu des voisins L’eau qu’enferme un vase de terre, Des cailloux au lieu de coussins ; (4) Mais sitôt que la nuit est close Chez les voisins on n’ose aller, Chacuns d’eux sur son lit repose, On ne voudrait pas les troubler. L’AMITIÉ, dit la Bible Sainte, Est aussi forte que la mort, De son feu sacré l’ame atteinte Trouve aisé le plus rude effort, Jeanne met toute couverture Sur sa Mere en ces nuits d’hiver Et gèle en bravant la froidure Sous des branches de genêt verd. (5) LAISSONS-LA rire de sa peine, Elle n’en rira pas long-tems, De zéphire la douce haleine Va nous ramener le printemps, Déjà la diligente Abeille Ne croit plus le repos permis, L’amour du butin la réveille, Il éveille aussi les Fourmis. FOURMIS, modèle de prudence, Vous deviez bien vous contenter D’entasser avec prévoyance Le grain qui vous fait subsister ; En venant ronger chaque ulcére D’un cadavre encore vivant (6) Il falloit prévoir la colére De sa tendre & sensible Enfant. Pour la Mere on offre un azile A l’abri des soins, du besoin, Dans ce séjour calme & tranquille, D’elle on prendra le plus grand soin : Ce mot, ne m’ôtez pas ma Mere, Pour toujours l’engage à rester. Sent-on le poids de la misére Quand on est deux à le porter ? (7) UNE épreuve plus séduisante, C’est l’offre d’un aimable Epoux ; Pour la Mere foible & souffrante, On l’annonce Enfant tendre & doux ; Mais Jeanne autrement conjecture Et d’un bannit tous Maris ; Les douleurs que ma Mere endure Sont bien assez sans les mépris. DIEU, qui dans sa juste balance Pèse les Bergers & les Rois, Dieu qui punit & récompense En suivant d’immuables Loix, Vient juger la Fille & la Mere ; A l’une s’il ouvre les Cieux, Il veut que l’autre sur la terre Goûte un fort calme & glorieux. SALENCI dont mon coeur révére (8) Les moeurs, les loix, la bonne foi, Jeanne pure & servant sa Mere Seroit-elle digne de toi ? Parle, je suivrai ta réponse : On délibére à Salenci ; D’une voix son sénat prononce, Closier mérite un Trône ici. TROIS Enfans d’AUGUSTE FAMILLE, Du bon HENRI trois descendans (9) Se sont les Peres d’une Fille Digne modèle des Enfans : En la dotant ils croyoient suivre Un mouvement d’humanité ; Mais l’Éternel sur son grand livre Les nomme agents de sa bonté. GRAND Dieu que ta grace est puissante ! Qui pourroit n’y pas recourir ? Des Pauvres la plus indigente A son tour va les sécourir : Un Prince généreux s’honore (10) En lui confiant ses bienfaits. Le Soleil est beau ; mais l’Aurore Nous fait mieux sentir ses attraits. QUI peindra la brillance Fête Qu’ornoient Jeanne & la Piété ? Quand la Couronne est sur sa tête Dans son coeur est l’humilité ; Comme Dame on la préconise, (11) Ce grand honneur la touche peu, La première place à l’Eglise Pour elle est la Table de Dieu. SUR Jeanne on verse l’opulence, Et l’or pour elle est sans appas, Ce qu’elle en offre à l’indigence Est le seul dont elle fait cas : Quelle vive & pure allégresse Embellissoit encor ses yeux, Quand elle allégeoit la d’étresse De ses Freres les malheureux ! (12) LA Paroisse entiére désigne Le sage & fortuné mortel Qui doit avoir l’honneur insigne De conduire Jeanne à l’Autel ; La vertu dicte & l’amour signe Leur engagement solemnel. Un tel mariage est bien digne D’un sourire de l’Éternel. FIN. ~*~ NOTES SUR LA ROMANCE (1). COMME cette Romance est faite pour les pauvres Gens de laCampagne, on leur observe que Octogénaire signifie, qui a80 ans. L’ayeul cité avoit alors 82 ans, &est mort âgé de 96. (2). Quand la Mere se fâchoit trop de ce que sa Fille nemangeoit point, Jeanne coupoit du pain, sortoit comme pour le manger augrand air, le rapportoit dans sa poche, le mettoit dans la soupe de saMere qui ne s’en appercevoit pas. (3). Jeanne appellée pour travailler chez M. de B. tomba endéfaillance aux pieds des femmes qui la chargeoint de linge.On la releva, un verre de vin lui rendit l’usage de ses sens; les informations apprirent ce qu’elle vouloit cacher. Onsçut que depuis deux jours elle se refusoit tout aliment, ilrestoit cependant du pain chez elle ; mais il diminuoit, elle vouloitle faire durer jusqu’au jour qu’elle devoit vendreson fil. Ce fait a été certifié pardes témoins oculaires. La rougeur de Jeanne l’aconfirmé. (4). Jeanne étoit trop pauvre pour acheter du bois,& trop honnête pour en voler. (5). Voyez la Lettre de M. de B. (6). La maison qu’on prêtoit par charitéà la Mere & à la Fille estcrévassée ; elle est adosséeà une haye qui sert de retraite à de grossesfourmis rouges. Ces insectes venoient ronger les ulcéres dela pauvre Infirme. Si Jeanne s’est jamaisimpatientée, c’est contre ces fourmis. Ellen’en parle point encore sans émotion. (7). Voyez la Lettre de M. de B. (8). Salenci est un Village de Picardie, peu distant de la ville deNoyon. Dans le Ve Siécle St-Médard,Evêque de Noyon & Seigneur de Salenci, ordonna quetous les ans, à perpétuité, oncouronnât de roses la Fille la plus sage & la plusvertueuse. Depuis XII Siécles cette respectable institutionsubsiste & a produit les fruits qu’on en devoitattendre. Jamais la justice humaine n’a eu à punirun habitant de Salenci ; jamais ils n’ont eu deprocès les uns avec les autres. (9). Monseigneur le Duc de Chartres, Monseigneur le Duc de Montpensier,Mademoiselle d’Orléans. Voyez leprocès-verbal de la Fête. (10). Monseigneur le Duc d’Orléans. (11). Jeanne Closier & François Sallédestiné à l’épouser,communiérent avec toute édification àla Messe du couronnement. On avoit recommandé Jeanne Closieraux Priéres du Prône, comme Dame &Patronne de la Paroisse. On avoit ordonné en son nom unedistribution de 600 liv. aux Pauvres. Elle oublioit tout au pied desAutels. (12). Jeanne, en revenant du Hameau où sa Mere est morte& où elle venoit de distribuer ses aumônesaux Pauvres qui l’avoient assistée pendant sadétresse, disoit à l’auteur, du ton leplus touchant : l’argent que je viens de donner me fait plusde plaisir que tout celui qui est pour moi. J’en auraistoujours bien gagné. Je sais travailler. Elle gagnoit troissols par jour quand elle alloit à sa journée,& elle recevoit 50 louis de lagénérosité des Princes. __________________________________________ Permis d’imprimer à Caen ce 17 Mars 1787. LE HARIVEL DE GONNEVILLE. |