![Revue lexovienne Illustrée - Août 1910 [Pdf] Revue lexovienne Illustrée - Août 1910 [Pdf]](/sites/www.mediatheques-lisieuxnormandie.fr/files/images/patrimoine/www.bmlisieux.com/images/revlex20_t.jpg)
La fête nationale a étécélébrée cette année à Lisieux, avec un entrain patriotique plus vifque les années précédentes. L’affluence était plus grande partout,grâce à un temps favorable, égayé par un doux soleil.
La revue des troupes passée sur la place Thiers, présentait un intérêtparticulier, en dehors de l’attrait du défilé qui éveille toujours lacuriosité publique.
Après la remise à M. Crem, gendarme à Trouville, de la médaille deCasablanca (Maroc) par M. le lieutenant colonel Largillier et le défiléqui s’est accompli avec une régularité parfaite, la Société deGymnastique et de Préparation Militaire “ La Lexovienne ”, recevait sondrapeau des mains de la municipalité de Lisieux.
Devant ce drapeau que le maire de la ville a remis à M. Ragot,président de la Société, les enfants des écoles municipales sous laconduite de leurs directeurs et directrices : MM. Degrenne, Hue, MllesLemaître et Prestavoine, ont défilé, saluant en passant l’emblêmenational que tient fièrement le porte-drapeau. Ce défilé, que soutenaitd’airs entraînants la musique municipale, a été fort réussi et a causéune excellente impression. C’est pour la jeunesse une fortifiante leçonde choses que cette participation aux manifestations patriotiques.
Il serait désirable qu’on lui réservât aussi une participation directeà la fête du travail qui revient chaque année et qui offre à tous lefortifiant exemple donné par tous ceux dont on récompense l’honnêteté,l’énergie dans les épreuves de la vie et le dévouement au travail. Iln’est pas de leçon plus utile à donner à l’enfance que celle qui luiapprend à honorer le travail persévérant qui soutient dans la vie etdonne à l’homme la conscience de sa dignité et de sa valeur morale.
Au cours de la fête du travail, qui a eu lieu à l’Hôtel-de-Ville, huitprix de mérite on été distribués et trois machines à coudre ont étéremises à des titulaires particulièrement dignes d’intérêt.
Dans l’après-midi, la jeune société de gymnastique “ La Lexovienne ” aexécuté sur la place Thiers une série d’exercices qui ont vivementintéressé un public fort nombreux. Les jeunes gymnastes dont la tenueexcellente et l’entrain ont été fort remarqués, ont accompli avecprécision plusieurs mouvements d’ensemble. Les exercices à la barrefixe, les sauts très hardis et fort réussis ont provoqué desapplaudissements mérités.
Terminée par l’exécution de deux pyramides que nos gravuresreproduisent, ces premiers exercices de “ La Lexovienne ” font honneurà la jeune société et à son chef distingué, M. Michaut, sergent au 119ede ligne.
Grâce au beau temps, les jeux nautiques au pont de Caen ont obtenu unfranc succès de gaîté ; la foule s’y est copieusement amusée et denombreux auditeurs ont applaudi l’orphéon “ Les Enfants de Lisieux ”qui s’est fait entendre en divers endroits du quartier de Saint-Désir.
Les courses vélocipédiques au vélodrome d’Orival dont les épreuves ontété disputées par une trentaine de coureurs avaient attiré une fouleconsidérable.
Nous donnons plus loin les impressions du jeune aéronaute, M. RaymondBlanche, qui faisait sa première ascension à bord du ballon “ Ville deLisieux ”, monté par M. E. Boyteux, des Prés-Saint-Gervais et quiemmenait également M. Blanche, conseiller municipal. Le ballon, parti à7 heures, après s’être élevé à une hauteur de 550 mètres environ, estallé atterrir au Pré-d’Auge dans la propriété de M. Decauville.
La soirée du 14 juillet s’est terminée par un grand concert, donné parla Musique Municipale, sur la place Thiers, fort brillamment illuminée.Un magnifique feu d’artifice, fourni par la maison Duchemin, de Rouen,a été tiré au Grand-Jardin où la presque unanimité de la populations’était transportée. Enfin un bal a réuni à la Halle-au-Beurre bonnombre de danseurs qui ne se sont séparés qu’aux premières lueurs dujour.
Les impressions d’une ascension en ballon
Le ballon “ La Ville de Lisieux ” était monté par M. Boyteux,aéronaute, qui avait pris avec lui à son bord, M. Blanche, conseillermunicipal et son fils, M. Raymond Blanche.
Celui-ci a fait de la façon suivante, le récit de ses impressions aucours de cette ascension qui s’est terminée par un heureux atterrissagedans la propriété de M. Decauville, le sympathique maire du Pré-d'Auge.
Il faut avoir fait une ascension en ballon libre pour être capabled’exprimer la douce sensation que l’on en ressent. S’il est possiblequ’au moment d’un premier départ une vague appréhension envahisse levoyageur, cette appréhension est bien vite remplacée par un sentimenttout différent : l’admiration. C’est à trois que nous avons pu éprouverce sentiment lorsque le “ Ville de Lisieux ” s’est élevé dans les airsle 14 juillet dernier.
Il est sept heures lorsque du ballon on commande le “ lâchez tout ”.Bien tôt, à mesure que l’altitude augmente, les grandes lignes du solse resserrent et la ville que nous venons de quitter nous donne peu àpeu l’impression d’un immense plan en relief. Mais une faible brise,que nous ne pouvons ressentir, nous pousse vers l’Ouest. Nous voyonslongtemps encore la place que nous avons quittée. Puis, nous élevant deplus en plus, nous ne distinguons plus de la ville qu’une grande tachegrise se détachant au milieu d’un immense tapis vert. Nous sommes alorsau-dessus de la route de Caen et à une altitude de 500 mètres. Lacampagne est magnifique et présente une curieuse particularité.L’ensemble d’un vert foncé est nettement séparé par une longue traînéebeaucoup plus claire, dirigée du Sud au Nord. Cette traînée, qui n’estautre que la vallée de la Touques, ne semble pas plus large qu’une denos rues. Mais alors, les routes, que deviennent-elles ? Elles sontréduites à des rubans blancs qui, d’en haut, peuvent avoir au plus unelargeur de quelques centimètres et qui se détachent nettement sur lacampagne environnante. Nous avons pu aussi assister à l’arrivée dutrain de Caen, vers sept heures un quart. Nous croyions voir alors unsimple jouet d’enfant animé d’une très faible vitesse. Cependant, nousavançons lentement et nous quittons un peu la route de Caen. Lesbestiaux, dans les herbages, sont réduits à des points de couleursdifférentes. Enfin les champs cultivés nous apparaissent comme descarrés de dimensions minimes.
Malheureusement, notre ascension ne peut se prolonger longtemps encore.Nous sommes trois et la force ascensionnelle diminue. De plus, il estdéjà sept heures et demie et la nuit serait défavorable à un bonatterrissage. Nous prenons donc à regret le parti de descendre. Leguide-rope traîne bientôt sur le sol et s’enroule autour d’un pommier.Nous sommes captifs et nous ne tardons pas à voir apparaître denombreux habitants qui veulent bien nous aider dans cette manœuvre aumilieu des pommiers. Mais où sommes-nous ? Le hasard, qui fait bien leschoses, nous a conduits dans la propriété de M Decauville, maire duPrédauge, où nous avons trouvé MM. Constant Petit et Trèche, deLisieux. Nous sommes reçus très cordialement et, après quelques courtesascensions faites par plusieurs personnes présentes, nous procédons audégonflement du ballon. L’enveloppe est repliée, ainsi que le filet,et, après une heure de travail, nous sommes prêts à repartir. Notons,de plus, qu’au moment de notre atterrissage, nous avons envoyé unedépêche, grâce à quelques pigeons que nous avions emportés. Un pigeonappartenant à M. Doublet, vice-président de la société “ La Colombe ”,et deux autres que nous avait confiés M. Colette sont partis duPrédauge à sept heures et demie et, avant huit heures, la nouvelleétait connue à Lisieux. Il était dix heures lorsque nous rentrâmes enville dans une voiture que M. Decauville avait mise aimablement à notredisposition.
En somme, notre ascension a été excellente, bien qu’un peu courte, maiselle a suffi pour nous faire connaître tous les délices del’aérostation. N’est-ce pas là un sport idéal ? On ne se sent pasentraîné et aucune secousse ne se produit. De plus, l’action de l’airne peut se faire sentir, puisque nous sommes emportés par lui. Nous nesaurions donc trop remercier M. Boyteux, notre excellent pilote, qui afait tout son possible pour faire partir à trois et qui a fait de nousde nouveaux adeptes de l’aérostation. Merci enfin à toutes lespersonnes qui ont bien voulu, lors de l’atterrissage, nous apporterleur précieux concours.
Raymond BLANCHE.