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GUELPA, Leon. (18..-19..) : Comment retarder la chute et la canitiedes cheveux ?(1910)
Numérisation du texte : O. Bogros pour la collectionélectronique de la MédiathèqueAndréMalraux de Lisieux (05.I.2013)
[Ce texte n'ayantpas fait l'objet d'une seconde lecture contient immanquablement desfautes non corrigées].
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Orthographe etgraphie conservées.
Texte établi sur l'exemplaire de la Médiathèque du n°3 - VIe série- 1.2.1910 deLA REVUE (ancienne Revue des Revues).


Comment retarder la chute
et
la canitie des cheveux ?

par le

 Dr GUELPA
_____

[NOTE DE LA REDACTION] Nous rappelons à nos lecteurs l'article: Comment renouveler et rajeunir notre organisme, publié par le Dr Guelpa, ici même (Voir La Revue,dit 1er janvier 1909). - La thèse soutenue par notre distinguécollaborateur avait soulevé tout d'abord maintes protestations dans lemonde médical. Pourtant, les idées qui avaient paru scandaliser tant demédecins éminents, ont fait, depuis, leur chemin. Sans vouloir suivrele Dr Guelpa jusqu'aux limites extrêmes de sa théorie, il fautcependant constater que celle-ci est appliquée avec beaucoup de succèspar maints praticiens et par les malades eux-mêmes. Car ce qui nouspermet d'offrir l'hospitalité de La Revueau Dr Guelpa c'est, entre autres, ce fait que les moyens hygiéniquespréconisés par lui peuvent être employés en dehors de son intervention.Notre collaborateur énonce ce qu'il croit être la vérité ; mais nepréconise aucunement ni drogue spéciale, ni la nécessité de sesconseils personnels. Ajoutons que l'auteur se borne à présenter ici sathéorie d'une façon accessible au grand public. Son développementtechnique, de même que sa justification scientifique paraîtrontultérieurement dans le Bulletin de la Société de Médecine de Paris.

Tout le monde a sans doute, remarqué ce phénomène bizarre, que les gensqui préconisent des remèdes contre la calvitie sont, d'ordinaire,chauves. Il suffit d'entrer dans un grand établissement de coiffurepour observer ce fait amusant, que les employés qui vous recommandentavec la plus grande ardeur des médicaments miraculeux pour fairerepousser les cheveux disparus, en ont eux-mêmes aussi peu quepassible. Ils ressemblent aux inventeurs de moyens infaillibles pourgagner à la roulette. Ceux-ci ont toujours besoin d'une pièce de vingtfrancs pour tenter l'expérience. Et, soyez-en convaincus, ils perdrontinfailliblement les louis d'or que vous leur accordez, comme tous ceuxqu'ils ont eus précédemment à leur disposition.

Constatation non moins amusante: les inventeurs de produits capillaireseux-mêmes se trouvent, d'ordinaire, dans une situation des pluslamentables en ce qui concerne leur chevelure. La raison est biensimple : ils avaient cru et ils croient à l'efficacité de leursremèdes, et ils en sont les premières victimes.


I

Le Dr Sabourau, au moment de la grande vogue de la spécificité desbactéries, avait cru avoir découvert le microbe de la calvitie. Et,comme dans toutes ses recherches, il avait constaté la présence,presque en culture pure, de ces très nombreux microbacillesparticuliers, il n'avait pas hésité un instant à les croire et à lesaffirmer spécifiques de cette maladie du cuir chevelu. De là à l'idéede combattre la calvitie à force d'antiseptiques, il n'y avait qu'unpas. Les résultats définitifs le démontrent tous les jours. Je necrains plus de me tromper en affirmant que, dans ce cas, l'effet avaitété pris pour la cause.

Ce n'est pas que j'aie l'intention de contester la présence réelle desmicrobacilles. Loin de là ; mais ce que je trouve erroné, c'en estl'interprétation.

Pour me faire mieux comprendre, qu'on me permette une comparaison. Si,dans un terrain épuisé, abandonné, on voit pousser du gros chiendent(cynodon dactylon), personne n'aura la pensée de faire de cettevégétation nouvelle la cause de l'appauvrissement du terrain et de ladisparition des arbres vivaces qui s'y trouvaient précédemment. Demême, dans la calvitie, le microbacille doit être considéré commel'hôte capable de vivre dans un mauvais terrain, comme une desexpressions de la misère physiologique du cuir chevelu, où la bonneherbe - cheveu - ne peut plus vivre, non pas à cause de la présence dumicrobacille, mais par le fait de la compression exagérée et de lanutrition insuffisante.

Cette cause n'est pas la, seule. Il y en a une autre, plus générale etplus profonde, qui détermine la chute des cheveux. C'est par elle ques'explique la calvitie, en rapport avec l'arthritisme,l'artério-sclérose, la syphilis, la vieillesse, etc.

Nous savons que le cuir chevelu est irrigué, nourri par les différentsgroupes d'artères qui cheminent de la périphérie au vertex. Ce sontelles qui apportent à la papille du cheveu l'aliment nourricier.Lorsque, par la compression (chapeau), ou par les artérites dedifférentes origines, ces artères n'ont plus le calibre voulu, nil'élasticité suffisante, alors, une partie de l'aliment nécessairevient à faire défaut ; et inévitablement, une certaine étendue du cuirchevelu va se dégarnir progressivement de sa production-cheveu,identiquement à ce qui se passerait dans une prairie où, petit à petit,on réduirait l'apport des canaux irrigateurs. Et pour continuer cettecomparaison, où l'herbe commence-t-elle à s'étioler et à disparaître,sinon aux points extrêmes de la canalisation ? Nous observonsprécisément la même marche dans la calvitie, qui, en effet, sedéveloppe toujours progressivement à partir des points terminaux de lavascularisation artérielle. C'est pour cela qu'elle débute toujours auvertex et au contour du front, et de là s'avance régulièrement versl'origine des temporales et des occipitales. A ce propos, je tiens àaffirmer ma conviction que les artères frontales ne prennent aucunepart à l'irrigation productrice des cheveux. Ce sont les temporalesseules qui sont chargées de ce rôle dans la région antérieure de latête. S'il en était autrement, dans la première période de la calvitie,nous devrions observer des îlots de cheveux dans les parties plusbasses du cuir chevelu frontal. Cette interprétation nous faitcomprendre, au contraire, pourquoi la calvitie débute généralement parle front. Et la disposition anatomique profonde des occipitales, à leurorigine, sous la protection d'une épaisse masse musculaire, nousexplique la longue conservation habituelle, à la nuque, d'une zone decheveux bien colorés.


II

Jusqu'à présent, nous n'avons parlé que de la calvitie. C'est presqueavec un soin particulier que j'ai évité de prononcer le mot canitie,pour ne pas exposer le lecteur à confondre ces deux manifestations dela vie du cuir chevelu. En effet, quoique, régulièrement, ces deuxexpressions de l'évolution des cheveux soient concomitantes, il nousest donné quelquefois d'observer des têtes en grande partie chauves,sans qu'aucun des cheveux qui restent soient décolorés ; comme, d'autrepart, nous pouvons voir d'abondantes chevelures totalement blanches,sans la moindre trace de calvitie. Il est donc évident que la calvitieet la canitie sont deux états absolument différents, et qui peuventêtre complètement indépendants l'un de l'autre.

On se trouve facilement d'accord sur cette définition superficielle quela canitie est la décoloration des cheveux. Mais on est loin d'êtrefixé sur le processus qui produit ce blanchiment. En général, on admetque la pigmentation normale des poils dépend du dépôt, entre lescellules de l'écorce, de granulations pigmentaires, incorporées dansles fluides fournis par la région profonde et vasculaire du follicule.Ces fluides, après s'être répandus de cellule en cellule dans toutesles parties de la tige, iraient s'évaporer à sa surface, d'autant plusrapidement que le cheveu serait moins protégé par l'enduithuileux-sébacé normal. La diminution de la production pigmentaire sousla dépendance des différents états pathologiques, ou son évaporationtrop rapide à la surface des cheveux, constitueraient le processushabituel et normal de la canitie.

Il y a quelques années, Metchnikoff a émis une autre hypothèse. Dansles cas de canitie, il avait constaté que dans l'intérieur descellules, d'origine épidermique, de grosses cellules macrophagescontenaient des granulations pigmentaires. Partant de ce fait positif,Metchnikoff en conclut que la canitie était la conséquence dudéveloppement exagéré des macrophages, contre lesquels il avaitconseillé des pratiques de surchauffage. Indubitablement, la théorie deMetchnikoff est très séduisante. Mais sans contester aucunement le faiten lui-même, j'ai lieu de croire que son interprétation biologique estprobablement erronée, et que sa conception thérapeutique estcertainement nuisible.

Les macrophages avalent-ils les granulations pigmentaires comme lepense Metchnikoff ? Ou bien sont-ils, simplement chargés d'un servicede police, sorte d'agents de déblayage des granulations pigmentairesqu'un obstacle gêne ou arrête dans leur marche ascensionnelle ? C'est,pourtant, cette deuxième manière de voir qui doit être la vraie, etnous en serons vite convaincus si nous voulons bien abandonner lesspéculations théoriques pour nous, appuyer simplement sur les faits decanitie les plus frappants, et sur les résultats incontestables dessoins employés.

Nous avons vu que le poil, né de la papille, avant de sortir dufollicule, baigne dans l'ampoule terminale des, glandes sébacées, où ils'enduit du fluide huileux, qui accentue sa coloration, ralentit ladestruction du pigment et augmente l'imperméabilité et la résistancedes cheveux aux influences atmosphériques. Or, toutes les fois qu'unecause agit sur ce fluide sébacé, immédiatement l'effet se traduit dansl'intensité de la couleur et dans la vigueur du cheveu.

Sur une personne qui commence à blanchir, essayez des lavages avec dessolutions alcoolisées ou alcalines, ou bien faites des surchauffages,comme le conseille Metchnikoff, et vous constaterez sans retard que lacanitie apparaîtra immédiatement, et sera, par la suite, deux fois plusprécoce. Par contre, répétant ce que tant de fois j'ai expérimenté surmoi-même et sur d'autres personnes, accompagnez le nettoyage habitueld'une friction du cuir chevelu avec un corps gras quelconque (moelle debœuf, huile d'amandes douces, huile antique, vaseline pure, etc.), demanière à restituer à l'épiderme et aux poils l'enduit graisseux que lenettoyage pourrait enlever, et vous verrez que la quantité de cheveuxblancs aura beaucoup diminué. De même le poil des animaux blanchit làoù la peau est plus irritée et comprimée (sous le harnais chez lecheval), ou bien là où elle a été remplacée par du tissu cicatriciel àla, suite des plaies.

Nous en avons une démonstration encore plus, évidente, dans le fait quim'avait été signalé par mon regretté ami, M. Mouveux, que le poil desanimaux blanchit d'abord, et longtemps à l'avance, dans les endroitsqui, par les habitudes de la bête, sont plus souvent mouillés, parexemple les pattes et le museau.

Il en est de même de la barbe chez l'homme, qui, lavée souvent à l'eauet exposée à l'oxygène de l'air, contre lequel elle n'est jamais,abritée, est toujours plus claire et plus, vite décolorée que les poilsdes autres régions.


III

On pourrait m'objecter ici que, si ce que j'avance était toujoursexact, nous ne devrions pas constater le fait absolument opposé,c'est-à-dire le blanchiment de la barbe régulièrement plus tardif quecelui des cheveux. En effet, à cause des soins les plus élémentaires depropreté, la barbe est lavée à l'eau et souvent au savon, au moins unefois par jour. Je ne cache pas que c'est là une objection qui m'aembarrassé au premier abord. Mais, après un peu de réflexion, je trouveen elle une démonstration de plus de la thèse que j'avance. Car il nefaut pas oublier que le poil-barbe est plus jeune que le poil-cheveu,au minimum d'une quinzaine d'années, et de plus, que le poil-barbe nenaît pas d'une papille plus ou moins comprimée, comme l'est celle quialimente les cheveux. Or, comme la canitie de l'un et de l'autre sesuivent à très peu d'années de distance, il est évident que, enréalité, par l'effet des soins hygiéniques, la vie colorée de la barbedevient d'une durée plus courte que celle des cheveux.

C'est encore par le jeu des mêmes causes que la canitie et la calvitiesont, sans comparaison, moins précoces et moins fréquentes chez lafemme que chez l'homme. En effet, la femme lave sa tête à l'eaubeaucoup moins sauvent que l'homme ; et, si capricieuse que soit sacoiffure, elle ne porte jamais de couvre-chef comprimant autant quechez l'homme les vaisseaux nourriciers du cuir chevelu. En outre, dansce cas, il faut encore tenir le plus grand compte de la dimension descheveux. Car les cheveux étant le moyen naturel de protection, dedéfense de la tête contre les agents extérieurs, et surtout contre lesmodifications de chaleur et d'humidité de l'atmosphère, lorsqu'onsupprime ce vêtement naturel, mauvais conducteur de la, chaleur,forcément la peau sous-jacente va subir les impressions de latempérature ambiante. Et alors vont avoir beau jeu ces dispositionsrhumatisantes, ces influences thyroïdiennes et ces modificationsartérielles qui altèrent les fluides du cuir chevelu et finissent paren épuiser la vitalité. je suis fermement convaincu que c'est en celaque réside lz principale cause déterminante de la perte prématurée descheveux chez les arthritiques qui, plus que les autres, sont exposés àsubir le contre-coup des vicissitudes atmosphériques. Et ces pauvresmalheureux, pour les prémunir contre leur disposition à la calvitieprécoce, ou pour les guérir de cette maladie morale et histologique, onles martyrise avec des coupes de cheveux ras, avec des brossagesénergiques et avec des schampoings ou des douches d'eau froide ! Et lesmédecins n'ont pas un mot de protestation, ne donnent pas un conseilvraiment salutaire pour défendre le cuir chevelu de leurs malades.Eux­mêmes, bien souvent, laissent diriger l'entretien de leur chevelurepar le coiffeur, lequel, par intérêt et par ignorance, ne sait et neveut que leur appliquer les rafraîchissements fréquents des cheveux, etles lavages encore plus fréquents, avec leurs solutions presque toutesaqueuses ou alcoolisées. On a prétendu, - et c'est là une opinionpresque générale, - que la chevelure plus abondante et plus vigoureusede la femme était un état de nature, et non la conséquence des soinsdifférents imposés par la vie sociale. C'est encore un préjugé, qu'onne s'est pas donné la peine de contrôler. Car il n'est pas difficiled'en démontrer la complète inanité.

Ces faits doivent nous mettre en garde contre une mauvaise habitudequ'est celle de raser le cuir chevelu des convalescents de gravesmaladies, dans le but d'empêcher la chute des cheveux. C'est un simplepréjugé, et nuisible au surplus ; car sans parler des désavantagesesthétiques chez une femme, il présente l'inconvénient certain derendre la tête et même tout l'organisme plus sensible aux influencesoffensives thermo-hygrométriques.


IV

Les constatations que nous venons de faire nous fournissent déjà desindications importantes pour la conservation scientifique des cheveux.Dans ce but, nous devons d'abord éviter tout obstacle à la liberté et àl'activité de l'irrigation sanguine. Et pour cela, nous recommandonsque le chapeau soit léger et mou, ou bien qu'il porte, sur les côtés,des espaces évasés, afin de permettre le libre fonctionnement desvaisseaux nourriciers, surtout les temporales.

Un autre conseil, non moins précieux et rationnel, est celui de masserun peu, tous les jours, le cuir chevelu, afin d'assurer le pluspossible cette activité de la circulation. A ce sujet, on me permettraune digression non sans importance. On sait avec quelle crainte etquelle circonspection les malades se servent du petit peigne,lorsqu'ils s'aperçoivent qu'il amène des cheveux avec lui. Ils sebercent de l'illusion qu'ils peuvent arrêter la chute en évitant touteviolence au cheveu. Ils ne se doutent pas que les cheveux qui viennentavec le peigne sont déjà des cheveux malades, qui ne peuvent continuerà vivre, et qui tomberont quand même tout seuls, quelques jours ouquelques semaines plus tard. Dans ces conditions, on a tout avantage àles arracher au plus tôt du follicule, où ils n'agissent plus que commecorps étrangers, afin de permettre à la papille de refaire, dans desconditions plus saines, sa sécrétion capillaire. On sait que lescheveux repoussent toujours plus drus après leur arrachement, comme lesmédecins ont eu l'occasion de le constater régulièrement, lorsque letraitement de la teigne se faisait par l'épilation ; d'où l'indicationscientifique de masser, encore plus rudement, le cuir chevelu,lorsqu'on constate une perte plus abondante des cheveux. Ce massagedoit être assez énergique, dans le double but d'exercer une pressionsur les conduits sébacés, et en même temps de favoriser la circulation,en empêchant le tassement et l'envahissement de la couche adipeuse.

Je crois qu'on peut établir en principe que tout cheveu arraché esttoujours remplacé par un autre plus vigoureux, et qu'un cheveu quitombe tout seul n'est, souvent, remplacé que par un autre plus faible,et ainsi successivement jusqu'à la disparition définitive.

Il convient de pratiquer le massage avec un corps gras, qui rendra plusfacile le ramollissement du comédon, et son expulsion, et quicomplètera, remplacera l'enduit sébacé, souvent en défaut.

On voit par là l'inconséquence des soins qu'on trouve indiqués dans lesouvrages scientifiques les plus connus. On y conseille régulièrementles lavages de la tête, avec des lotions, soit alcoolines, soitalcalines, soit vinaigrées ou simplement aqueuses ; ou bien encore avecdes solutions antiseptiques, bien souvent à base de sublimé. Tout lemonde suit à peu près cette pratique, sans se douter combien elle estpernicieuse. En effet, quand, en histologie, on veut durcir des piècesanatomiques, qu'est-ce qu'on fait ? On les traite par l'alcool ou parles solutions de sublimé, etc. Et quand on veut décolorer despréparations, n'est-ce pas aux solutions alcoolisées, alcalines ouacides qu'on fait appel ? Eh bien ! dans notre cas particulier, il n'enpeut être autrement. Avec ces solutions, on ne fait que durcir lestéguments, et par conséquent diminuer leur vitalité, et on rend lecomédon encore plus dur, plus résistant ; on le scelle encore plus dansl'étranglement utriculaire.

De plus, en nettoyant la tête avec des lotions aujourd'huihabituellement employées, ou tout simplement avec de l'eau, on ne faitque dépouiller le cuir chevelu de cet enduit gras, son protecteurnaturel. Il arrive fatalement que la peau se refroidit, occasionnant lacourbature et l'immobilisation du muscle du poil, et, comme nousl'avons vu, l'action décolorante et desséchante de ces lotionsdétériore et blanchit rapidement les cheveux.

Le grand inconvénient de ces pratiques est encore augmenté, nous lerépétons, par la mauvaise habitude de porter les cheveux trop courts,ce qui les empêche de protéger la tête contre les modifications nocivesde la température et de l'humidité de l'atmosphère. Vraiment, pouraboutir à la dénudation du crâne, on ne pourrait s'y prendre mieux !


V

Les défenseurs de l'hygiène actuelle pourront m'objecter, avec uneapparence de raison, qu'indubitablement on observe, quelquefois, unediminution de la chute et qu'on croit, même les cheveux repousser à lasuite des lotions alcoolisées ou alcalines, ou antiseptiquesordinaires. Je n'ai aucune peine à reconnaître ce fait.Malheureusement, ce résultat n'est jamais durable ; il ne sert qu'àdonner l'illusion, en cachant l'effet ultime désastreux. Si vousfouettez un cheval qui, fatigué, ralentit ses efforts, certainement,sous l'impression douloureuse des coups, il aura un sursaut d'énergieet paraîtra alerte, plus vigoureux. Mais si vous continuez ce système,croyez-vous que votre cheval vivra plus vieux, et que, somme toute, ilproduira une plus grande quantité de travail ? Personne ne voudraitl'affirmer. Il en est de même de la papille qui produit le cheveu. Sousl'influence de l'irritation violente, déterminée par la lotion, lapapille peut acquérir, pendant une courte période, une suractivitééphémère, qui fera place, dans un court délai, à l'épuisement deux foisplus précoce, à cause de l'action sclérosante ultime des moyensemployés.

J’ai fait, à ce sujet, une expérience végétale, qui est d'un grandenseignement. Convaincu que la compression par les glandes sébacéeshypertrophiées, et par le contour dermo-épidermique sclérosé, devaitêtre la cause principale de la canitie, j'ai eu l'idée de contrôlercette opinion par une expérience comparative sur des arbres. Je me suisdit qu'en fixant autour de quelques branches un 1ien circulaireinextensible (fil de fer), serré modérément ; afin de gênerprogressivement, par l'effet de la croissance, mais non d'interromprebrusquement ni complètement la circulation, j'observerais probablementune diminution progressive de la coloration des feuilles des branchesliées. Je dois avouer qu'au premier abord j'éprouvai une grandedésillusion. Contrairement à mon attente, le feuillage en questionétait devenu même un peu plus foncé et plus vivace que le feuillage desbranches témoins. Je ne savais que penser, lorsqu'une plus mûreréflexion me fit supposer que, sans doute, le lien circulaire, avant deréduire la circulation, comme premier effet de l'irritation, devaittemporairement l'exagérer, jusqu'à ce que le serrement manifestedéfinitivement son effet étrangleur. Mais, dans ce cas, je me disaisque, si l'expérience devait correspondre à mes prévisions, les feuillesdes branches traitées devaient finalement se flétrir et tomber plus tôtque les autres. Or, c'est bien comme cela que les choses se sontpassées. En effet, les branches liées, à l'arrivée de l’automne, sesont flétries et défeuillées d'une manière très précoce, relativementaux autres, qui restaient encore, en grande partie, vertes.

Cette expérience me paraît une réponse assez persuasive à ceux qui sebasent sur l'apparente repousse momentanée des cheveux pour recommanderles moyens qui, logiquement et scientifiquement, ne peuvent que lesdétruire.

J'ajouterai que, pour expliquer l'arrêt brusque de la chute des cheveuxqu'on observe à la suite de ces pratiques, il faut réfléchir que lescheveux qui sont en train de tomber sont des cheveux à bulbe plein,c'est-à-dire privés de vie, séparés de la papille, quoique encoreimplantés dans la profondeur des follicules. Naturellement, enappliquant sur le cuir chevelu des préparations qui le sclérosent, lecanal du follicule devient momentanément plus serré autour du cheveumort, qui par suite peut paraître implanté un peu plus fermement, commeun poteau ou un arbre mort qui reste debout plus solidement quand leterrain est plus comprimé.

Mais cet avantage apparent n'est que temporaire. La chute des cheveuxne tarde pas à reprendre sa marche fatale, avec accentuation plusévidente et plus définitive de la calvitie. Je pense avoir démontrécombien la canitie et la calvitie sont, en grande partie, le fait decauses locales, que nous pouvons modifier et retarder. Il ne faudraitpourtant pas croire que je ne veuille pas tenir compte des conditionsgénérales de l'organisme. C'est dans celles-ci, au contraire, que,réellement, nous devons reconnaître la cause première de ces déchéancescapillaires. C'est ici que se manifeste surtout l'influenceprépondérante de l'état arthritique, qui par la modification acide destissus et des humeurs, altérant 1a contractilité des vaisseaux, etfavorisant la solidification de la sécrétion sébacée, avec formationdes comédons, est la cause première de la vieillesse du cuir chevelu.Il en est de même de l'influence exercée par les longues et profondesmaladies, qui sont suivies très souvent de calvitie temporaire. Cetteinfluence très nette est encore plus évidente dans cet étatdystrophique, polymorphe, constitué pas les altérations dufonctionnement thyroïdien, auquel nous devons les si belles études duD' Léopold Lévy.

Ces influences sont du domaine de la pathologie et de la thérapeutiquegénérales. Nous les constatons et nous en reconnaissons l'importancecapitale ; mais nous n'avons pas 1a prétention d'en faire l'objet decette étude.

Conclusions.

Des faits et des considérations qui précèdent je me crois donc autoriséà déduire les conclusions suivantes :

I° La canitie est la décoloration des cheveux, déterminée par lacompression morbide que la couche dermique sclérosée, le comédon, etles glandes sébacées, hypertrophiées exercent sur la tige pilaire, enfaisant obstacle à la montée en elle des granulations pigmentaires.

2° La calvitie est l'expression de la mort des cheveux par atrophiéde la papille, déterminée soit par insuffisance de la circulationnormale, soit par intoxication, soit par la compression progressiveconsécutive à l'hypertrophie des glandes sébacées et l'épaississementexagéré de la couche adipeuse.

3° Ces deux états, si différents à leur point de départ, s'ajoutenthabituellement l'un a l'autre pour constituer l'expression la pluscomplète de la vieillesse du cuir chevelu.

4° L'hygiène actuelle, basée sur le nettoyage avec l'eau et les lotionsalcoolisées, alcalines, acides et antiseptiques, est funeste à la viedes cheveux, et doit être absolument abandonnée, en dehors deconditions spéciales, exceptionnelles. Car rien ne nettoie et neconserve mieux la peau que les corps gras.

5° Les soins rationnels, vraiment utiles à la vie complète des cheveux,doivent avoir pour but de :

a) Favoriser la circulation de la tête en évitant toute constriction.

b) Entretenir la souplesse et l'élasticité du cuir chevelu, soit avecdes nettoyages et des frictions simples, soit avec des massagesprofonds, à l'aide de corps gras, qui compenseront l'insuffisance del'enduit huileux naturel.

c) Eviter avec soin les causes de refroidissement de la tête, et àl'occasion en combattre sans retard les effets. Dans ce but, ilconvient de renoncer à l'habitude pernicieuse de couper les cheveuxras, et on doit, par contre, leur conserver au moins quelquescentimètres de longueur, pour ne pas priver totalement le cuir chevelude sa protection naturelle.

d) Ne pas négliger les causes générales, surtout l'arthritisme, quidisposent à la canitie et à la calvitie ; et leur opposer, sans retard,et avec la persistance nécessaire, les traitements spécialementindiqués.   

Dr GUELPA