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SCHOELCHER,Victor (1804-1893): Les amours dediligence(1832).
Saisie du texte : S. Pestel pour la collectionélectronique de la Médiathèque André Malraux deLisieux (25.VI.2008)
Texte relu par : A. Guézou
Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex
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Texte établi sur un exemplaire (BmLx : nc)de Paris ou le livre des cent-et-un, Tome huitième,publié à Paris : Chez Ladvocat en 1832.
 
Lesamours de diligence
par
Victor Schoelcher

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C’était une femme comme on en trouve beaucoup à Paris, mais comme iln’y en a qu’à Paris : élégante, belle, jeune avec trente ans, et richeavec dix mille francs de rente. Ces femmes-là sont, pour l’ordinaire,réellement veuves, et gardent un fils de sept ou huit ans dans un desdeux grands colléges. Quelquefois leur mariage les a fait baronnes,mais elles n’en tirent nulle vanité ; elles comptent trop surelles-mêmes pour se parer d’un mot. Elles ont des cheveux blonds, unepeau de satin, des ongles blancs, un corps frèle, une physionomiedouce, des bas de fil d’Écosse, des robes faites par la bonne faiseuse,des mouchoirs de batiste, et des gants de Suède. Toute leur personneest d’une délicatesse exquise, et elles laissent après elles un parfumpresque insensible de mille odeurs délicieuses. Elles habitent unejolie maison dans la Chaussée-d’Antin, meublée avec recherche, toujoursornée de fleurs, dans laquelle on trouve un domestique attentif, unecuisinière indifférente, et une femme de chambre dévouée. Elles passentordinairement l’été à la campagne, ne reçoivent pas avant midi, sepromènent quelquefois sur les boulevarts, et jamais aux Tuileries.Elles ont une place le dimanche à Saint-Roch, et une loge le vendredi àl’Opéra. Saluées respectueusement par les vieillards, courtisées parles jeunes gens, beaucoup regardées par les jeunes femmes, elles vontdans le meilleur monde, où elles sont étudiées comme modèles de bonnecompagnie. Possédant au plus haut degré ce que l’on appelle le bongoût, elles dédaignent profondément les salons de Louis-Philippe ; etsi elles avaient assez de coeur pour avoir une opinion politique, ellesseraient républicaines. Du reste, elles sont fort ignorantes, lisentpeu, ont une écriture de mouches, qu’elles vous envoient, à propos detout, sur du papier bath,et ne savent l’orthographe que des mots courants. Leur conversation estgénéralement nulle, mais il y a dans leur langage quelque chose de fin,dans leur société quelque chose de parfumé qui charme et captive. Atout prendre, ce sont des objets d’une valeur réelle assez mince ; onpeut les considérer comme une monnaie sans cours hors du département dela Seine ; c’est enfin une création de fantaisie essentiellementparisienne, qui serait tenue pour inutile et vile, malgré ses formesséduisantes, par tout homme qui n’en connaîtrait pas l’usage, ou neserait pas accoutumé à la voir.

Quand vous rencontrerez une de ces femmes-là quelque part que ce soit,en chemin ou dans un salon, au théâtre ou dans la rue, tenez-vous survos gardes, autrement vous en aurez pour huit jours à penser à elle,car elles ne rougissent plus, il est vrai, mais elles ont une voixdouce comme celle des anges, des airs de tête et des regards à remuerl’âme la plus stoïque !

Or, celle dont je vous ai parlé au commencement de cette histoire,monta un matin dans le coupé de la diligence où je me trouvais pouraller je ne sais plus où ; n’importe ? Nous étions seuls, les chevauxcouraient vite, et la route était, autant que je puis me rappeler, peufréquentée. Sitôt qu’elle fut assise, elle tira gracieusement son gant,et passa ses doigts avec élégance dans les touffes de ses cheveux :cela voulait me dire qu’elle avait de beaux cheveux blonds, de longsdoigts bien effilés, et une grosse bague ciselée au dernier goût, nonpas avec ces vilains chiens qui courent gauchement après de vilainslièvres, mais avec des beaux feuillages enroulés, larges et brillants,comme les Anglais savent les faire.

Quand je vis cela, j’eus grand’peur, et je me mis à réfléchir sur cequ’il pouvait arriver de moi.

Peu de minutes après, elle respira un flacon de vinaigre ; je luidemandai si elle se sentait incommodée ; elle me répondit froidement :Non, monsieur. Ma demande était assez sotte pour me valoir cettefroideur. Je gardai le silence durant au moins un quart d’heure.

La femme était calme, et ne jeta sur moi, pendant cet espace de temps,qu’un coup d’oeil assez indifférent. C’était un coup d’oeil d’observation: elle voulait savoir à qui elle avait affaire. Ces femmes-là jugenttrès-bien un homme sur sa redingote et sa cravate. Cependant je merappelai que ma mère m’avait mis dans la poche, avant de partir, uneboîte de pastilles de chocolat. J’en mangeai une, et je présentai laboîte ; on me fit un petit sourire tout plein de grâce, mais on refusa.

Je n’avais plus qu’à regarder la campagne ; je commençais à être piqué: la diligence relaya, et je fus bien heureux d’avoir les chevaux àexaminer.

Il se passa ainsi pour le moins une grande demi-heure !

Alors elle me demanda le nom d’une ville que nous traversions, et commecette ville était célèbre par de grandes beautés d’art et d’antiquitésdont j’avais entendu parler, je me mis à en causer, et la conversations’engagea. Tout en bavardant, je lui faisais la cour sans savoir oùcela me conduirait, sans un but bien déterminé. Notre société estarrangée ainsi, que, sous peine de passer pour un homme mal élevé, vousdevez toujours être amoureux de la femme que vous voyez pour lapremière fois en tête à tête. Que voulez-vous que je fasse à cela ? Macompagne savait d’ailleurs trop bien son monde pour s’étonner de mesgalanteries, et peut-être ne les prenait-elle que comme un moyen depasser sa journée sans ennui. Froide et blasée, elle se croyait en étatde jouer impunément à ce jeu. Elle avait tort. Elle n’était pas sidévergondée assurément que de se prendre aux mots de tendresse d’unpremier venu, mais elle était assez pervertie pour chercher un combattoujours déshonorant, parce qu’elle se croyait sûre de la victoire.

Rien dans nos coquetteries ne fut d’abord personnel ; toutes les chosesd’amour se disaient indirectement, comme ces choses-là se disent enpareilles circonstances. Oh ! nous savions notre métier l’un et l’autre! il était évident néanmoins que mon adversaire avait beaucoup d’enviede se moquer de moi ; cette intention perçait malgré lui, et, de momenten moment, je me sentais frappé de traits ironiques, qui ne melaissaient pas de doute sur ses desseins.

Malheureusement il arriva ce qui m’arrive toujours : j’avais commencéen plaisantant, presque par devoir de société ; j’avais fait la cour àcette femme, en diligence, comme je l’aurais saluée dans un salon ;mais je ne puis prendre l’amour qu’au sérieux, mon coeur avided’émotions tendres s’épanche avec enivrement sitôt qu’il est ému, et jene sais plus tromper ; je deviens grave, pénétré, fougueux ; je suissincère. La belle dame me voyant ainsi, devint sérieuse à son tour ; envain voulut-elle se débarrasser par des moqueries et de la légèreté,elle n’était plus maîtresse d’elle-même ; et, soit entraînement, soittout autre sentiment que vous voudrez lui prêter, au bout de quelquesheures elle me regardait avec tendresse à ses pieds, et me répétait : «Ivan, je vous aime, » quand je lui disais : « Lina, je vous aime. »Comment nous avons été amenés là, on concevra bien qu’il m’estimpossible de le dire. Ce fut une foule de nuances qu’il faut renoncerà analyser, un échange de petites coquetteries et de mouvementspassionnés qui s’épuraient à mesure qu’ils devenaient plus vifs. Il yeut des colères, des souvenirs, des confidences, des jalousies, etmille projets romanesques.

Une fois, après être descendu de voiture pendant un relais, pour medélasser un peu et respirer, je la trouvai en remontant triste etpréoccupée. Il ne lui avait fallu qu’une minute de réflexion,disait-elle, pour être épouvantée de ce qu’elle avait fait, je devaismépriser une femme, ajoutait-elle, qui livrait ainsi son âme enquelques heures. Ce n’était là qu’une comédie. Restée seule un instant,elle avait déjà recouvré ses pensées du monde ; mais j’avais, moi, tropd’intérêt, je trouvais trop de contentement à maintenir son exaltation,pour la laisser faire : aussi j’employai de bien tendres paroles afinde chasser ces vieilles idées, afin de la mettre au-dessus de nosétroites conventions sociales, et de lui prouver que l’amour ne secalculait à la journée qu’au milieu d’une société corrompue comme lanôtre qui, pour déguiser ses vices à ses propres yeux, a tout réglé,tout étiqueté, même les sentiments les plus intimes. De tels principeslui plaisaient, l’ardeur que je mettais à les soutenir paraissaitexciter sa curiosité, elle m’écoutait attentivement, et à la fin, lasérénité reparut sur son beau visage. Elle souriait en me remerciant,je roulais ma tête dans ses blanches mains, ses lèvres touchaientdoucement mon front, les boucles odoriférantes de ses cheveux plus finsque la soie effleuraient ma figure, et je me mirais dans ses yeuxhumides. La route ne fut plus qu’une longue caresse d’une voluptueusechasteté ; nous sentions le besoin de paraître purs et candides auxyeux l’un de l’autre, de nous montrer dignes de cette passion rapide,qui était venue à nous comme un rayon du ciel, et, sans nous en rendrecompte, nous cherchions à nous faire illusion sur nous-mêmes ; carl’amour des enfants, cet amour sans regret et sans arrière-pensée, cetamour si vif et si doux, a tant de charmes dans son innocencevirginale, qu’on voudrait toujours y revenir, même lorsqu’on a goûtéles enivrements de la terre. Pour moi, quand nous vîmes les murs de laville où nous devions nous séparer, quand elle s’écria d’un ton deregret, Déjà ! j’éprouvai, je l’avoue, un véritable chagrin. J’étaisheureux du bonheur factice que je m’étais créé ; ne connaissant pas manouvelle maîtresse, je lui prêtais toutes mes qualités favorites, etelle les avait ; je la faisais tendre, suave, mélancolique, timide,malicieuse, et elle était tout cela ; mais je comprenais bien qu’unefois descendus de cette voiture, nous rentrerions dans la vie réellepour reprendre les vices et les doutes que nous venions d’oublier ; jecomprenais bien que la société viendrait tomber de toute sa prosaïquelourdeur entre elle et moi, et j’étais triste.

Peut-être avait-elle la même pensée, car elle était triste aussi !

Enfin il fallut se résigner ; nos adieux se firent long-temps d’avance,nous nous promîmes vingt fois de nous revoir dès notre retour à Paris,de nous écrire chaque matin ; il fut bien convenu que Dieu seul avaitpu faire en si peu de temps deux amants dévoués de deux indifférents,et qu’elle n’avait aucun reproche à s’adresser. La diligence arrêta ;on m’attendait : je descendis après lui avoir pressé la main, puis noussaluant avec respect devant le monde, elle continua son voyage.

Je ne sais si je me trompe, mais il me semble qu’il n’y a pas dejouissance intime égale à celle de saluer avec respect, devant lemonde, une belle femme bien habillée, à qui l’on peut toucher la mainsitôt que le monde ne vous regarde plus, à qui l’on peut dire toi sitôt que lemonde ne vous écoute plus. Concevez-vous en effet une joie plus vraieque celle de voir une femme entrer pompeuse et superbe dans un théâtre,de vous trouver au milieu de la foule qui se récrie et admire à sonaspect, et d’entendre cette divinité vous dire d’un regard plein detendresse : « A vous ce triomphe, mon ange, tout pour vous ? » Est-ilun bonheur plus ineffable que celui d’être ainsi deux tout seuls sur laterre ?

L’amour est au fond une impulsion simple et tranquille dont le coursrégulier ne peut engendrer que plaisir. Tel honnête fermier éprouve levéritable amour, et cependant n’aime pas autrement qu’il ne s’assied àtable avec un bon appétit pour prendre un bon repas ; mais il y a deshommes qui ont été amenés, je ne sais comment, à sentir tout autrementque ce brave fermier ; leur irritabilité n’est excitée que par laquintessence de perfections réelles ou imaginaires, et quand ilsdeviennent amoureux, ce qui leur arrive très-souvent, leur imaginationse monte à un tel diapason, qu’elle n’est plus d’accord avec rien : delà des extases, des ravissements, des joies du ciel ; mais bientôtaprès, des désappointements et des déceptions ; car il est presqueimpossible que ces gens-là rencontrent des femmes assez folles pourrépondre à leur délire par un délire égal.

Je n’ignorais pas ces choses, je n’ignorais pas que Lina avait perdu laprimeur de pensée nécessaire à l’idéalité que je voulais conserver ànotre union ; et cependant, dès le lendemain, je lui écrivis : mais jene tardai pas à être obligé de renoncer à toutes mes illusions ; seslettres étaient autant de modèles d’égoïsme, de lieux communs et departi pris ; rien de naturel ni de vrai dans cette correspondance, etc’était pitié de voir y grossir la froideur et l’insensibilité à mesureque le temps s’écoulait, à mesure que les souvenirs du voyages’effaçaient. La première lettre était triste, on voyait dans le styleles yeux de Lina à demi fermés, et elle disait en terminant, Je vouspresse sur mon coeur ; dans la seconde, elle écrivait plustranquillement, Tout à vous ; dans la troisième, Je vous serre la main; dans une autre, Mille tendres compliments ; une dernière enfin étaitclose presque avec civilité par, Je vous offre mes amitiés.

Quelques extraits de ces épîtres amuseront peut-être nos philosophespsychologistes. Je les leur livre sans accepter la responsabilité dustyle, je ne veux pas même corriger les fautes, afin de mieux conserverà toute cette histoire le cachet de la vérité. Dans la première ontrouvait encore quelque sensibilité, elle se ressentait de l’influencedu coupé de la diligence. « Votre lettre a été bien douce à mes yeux,écrivait Lina, car elle m’a appris que vous m’aimez encore. J’avaispeur vraiment, je suis si coupable ! Mais je réclame votre indulgence ;je ne puis vous dire par écrit ce que je voudrais vous confier, letemps me permettra un jour cette satisfaction.

« Dites-moi ce que vous faites et ce qui vous occupe. Si vous voulezque je vous le dise, mon bon Ivan, vous me paraissez un peu fou, maisc’est égal. Je veux partager vos peines et vos plaisirs. Adieu, monami, vos billets aimables seront reçus avec plaisir ; j’ai dit ce qu’ilfallait pour qu’on ne s’étonne pas que je les reçoive. Adieuencore, je vousserre sur mon coeur. »

Dans la seconde, il y avait déjà plus de calme, et moins d’intimité.

« Je voulais répondre hier à votre joli billet, mais impossible. Jesuis accablée des visites de gens que je ne connais pas, et quiviennent directement à moi pour savoir de mes nouvelles ; rien nem’amuse comme cet usage. J’ai déjà reçu vingt invitations à dîner. Ondit que c’est un honneur que l’on doit faire à ma famille.

« Votre lettre n’a pas servi à me rendre ma gaîté. Je suis d’un sombreà faire peur. Je connais tous mes torts, et quoi que vous disiez, votrejugement sur mon compte doit être défavorable. Je vous quitte, car jesuis peu disposée à être aimable aujourd’hui, et je crois que j’ai étédéjà dérangée dix fois de ma lettre. Pour me dédommager desimportunités dont je souffre, ne pouvant vous écrire en repos, je vous presse affectueusementla main. »

Voici l’avant-dernière. Elle est bien courte. Quinze grands jours deséparation avaient passé par-là.

« Je n’ai que le temps de vous dire que je pars demain. Vous ne pouvezdouter du regret que j’ai de ne pas vous avoir vu ici, mais j’espèreque j’aurai le plaisir de vous recevoir dès votre retour à Paris.J’écris au milieu des paquets, je ne puis vous en dire plus long, et jesuis toute honteuse de vous envoyer un pareil griffonnage, Mille tendres compliments

La dernière n’est pas la moins curieuse, je la reçois après m’êtreprésenté chez elle, lors de mon arrivée à Paris.

« Le hasard a voulu que je sois absente hier soir, j’espère qu’il voussera possible de revenir demain avant onze heures, heure à laquelle jepars pour la campagne, au château de Leach. Un mot. Je vous offre mes amitiés

Je n’ai pas besoin de dire que depuis longtemps je ne considérais pluscette aventure que comme un sujet d’observation ; je prenais intérêt àétudier les phases de cette rapide décroissance, et quoique je connussebien la mauvaise qualité de la matière que j’avais employée pour fairemon idole, j’avoue que je m’émerveillais encore à la voir si vite sedécomposer et tomber en poudre. Aussi je ne manquai pas d’être exact aurendez-vous de Lina, la chose en valait la peine. Je la trouvaibrillante, penchée sur un riche canapé, ravissante de bon air etd’hésitation. Jamais je n’ai vu de tenture d’appartement qui allâtmieux à une tête de femme, jamais je n’ai vu de petit jour qui fût plusavantageux à une figure un peu fatiguée. Je ne sais pas si l’ontrouvera beaucoup d’esprit dans sa correspondance, mais je sais qu’il yen avait énormément dans son cabinet. Elle me reçut avec une grâce à mefaire tourner la cervelle, et je crois que je serais retombé sous lecharme, si j’avais été moins prévenu d’avance ; mais j’arrivais froid,je restai froid. Elle, de son côté, était redevenue femme coquette,femme de Paris comme je l’ai décrite, belle, délicate, séduisante, maisblasée, vaniteuse, pleine de mensonges, sans passion et l’âmedesséchée. Elle se fit grande dame : elle parut confuse des souvenirsde la diligence ; elle voulait commencer une intrigue selon les règles,elle n’avait rien compris au rôle que je prétendais lui faire remplir ;mais elle joua le sien avec un charme inexprimable. Tout cela me parutpitoyable, et au bout d’une heure, je me levai plein de dégoût pourprendre congé. Je vis bien qu’elle comprenait ce qui se passait en moi.Mais elle ne voulut pas paraître s’en apercevoir, et me reconduisitjusqu’à la porte du salon avec une exquise politesse. Depuis je n’aijamais remis les pieds chez elle, et quand nous nous rencontrons authéâtre ou à la promenade, elle ne semble pas du tout embarrassée. Nousne nous saluons pas.

Quand une femme fixera sur vous ses regards, et vous laissera entendrede douces paroles, écoutez, mais doutez ; et si le lendemain elle adisparu, ne vous roulez pas dans la cendre, ne rasez pas votre tête, nefuyez pas au désert.

Voilà mon histoire. Elle paraîtra peut-être assez futile, surtout dansun temps où l’on s’occupe sérieusement de choses sérieuses ; à moicependant, il m’a semblé bon de l’écrire, pour l’instruction de ceux denos jeunes frères au coeur ardent, qui s’en vont voyager en diligencedans notre pays de France.

V. SCHOELCHER.